Le 12 octobre prochain, l’éditeur italien Cassina ouvrira à Bruxelles un magasin monomarque de 800 m2. Objectif : séduire l’amateur de  » modernité raisonnable  » qui sommeille en nous.

Le constat n’est pas neuf : le Belge aime investir dans la brique et peut s’en offrir davantage, avec un même budget de base, que la plupart de ses voisins européens. Ce que l’on sait moins, en revanche, c’est que pour aménager son surplus de mètres carrés, il a aussi l’âme plus design que la moyenne. Si l’on estime à quelque 3,5 milliards d’euros le poids de l’industrie du meuble en Belgique, le business du mobilier design représenterait environ 5 % de ce marché complètement atomisé.  » Cela peut paraître très peu, mais en réalité c’est exceptionnel si l’on compare à ce qui se passe en France, en Allemagne ou aux Pays-Bas « , souligne Alessandro Buffoni, manager Benelux de Cassina (groupe Poltrona Frau). Notre petit pays peut aussi se vanter de voir augmenter chaque année son quota de millionnaires. Et ce malgré la crise. Depuis 2010, ils seraient plus de 75 000, parmi lesquels un bon millier – avec plus de 30 millions de dollars (22 millions d’euros) en poche – affichant une santé financière totalement  » recession proofed « .

Soucieux d’en savoir plus sur les motivations d’achat de nos compatriotes, l’industriel italien a commandité une enquête auprès de 2 000 personnes. Il en ressort qu’un Belge sur quatre se dit intéressé par le design. Et ce aussi bien en Flandre – dans laquelle ont été inclus les résultats de… Bruxelles ! – qu’en Wallonie. Le revenu mensuel moyen du ménage  » design addict  » tournerait autour des 4 000 euros nets par mois. Même s’ils n’en ont pas encore les moyens, 70 % de 18-28 ans confessent un intérêt marqué pour le secteur. Atteints du virus très jeunes, il y a donc de grandes chances qu’ils passent à l’acte… d’achat d’une pièce plus coûteuse le jour où leurs finances le leur permettront. On notera aussi que si 20 % des interrogés admettent investir 2 000 euros par an dans des meubles, pour la moitié d’entre eux, ce poste ne dépasse pas les 500 euros annuels.

DES GOÛTS CLASSIQUES

Toujours selon le pool sondé, le premier critère d’acquisition d’un meuble ne serait pas le prix mais la qualité. On veut donc du beau qui puisse durer. Ce qui se traduit notamment par une nette préférence pour la modernité… rassurante. Si le style contemporain a résolument la cote, les pièces très pointues ne rencontrent finalement que très peu d’amateurs. Les rééditions, par contre, font figure de valeurs sûres (lire aussi en pages 36 à 46) : la célèbre chaise longue LC4 de Le Corbusier est reconnue par 50 % des interrogés. Un Belge sur quatre est même capable de citer le nom de son créateur. À l’inverse, les logos des grands éditeurs de design ne dépassent pas 1 % de notoriété… Du pain béni pour les contrefacteurs spécialisés dans la copie de grands classiques.

 » Au vu de ces résultats, il est clair pour nous que ce n’est pas en bradant la qualité pour casser les prix que nous augmenterons notre chiffre d’affaires, mais en améliorant la connaissance que les Belges ont de notre marque et de nos produits « , justifie Alessandro Buffoni. Pour y parvenir, l’éditeur italien a décidé de réorganiser sa distribution en Belgique. En installant une filiale à Bruxelles par laquelle transitent désormais toutes les commandes des magasins. Mais surtout en ouvrant, le 12 octobre prochain, en collaboration avec Dominique Rigo, son premier showroom monomarque dans un hôtel de maître, au 154 de l’avenue Louise. En parallèle, Cassina entend également resserrer les liens avec les revendeurs multimarques en améliorant la présentation de ses corners au sein des boutiques mais aussi en développant avec eux des expositions thématiques.

 » Dans un flagship store 100 % Cassina, la marque peut s’exprimer comme elle l’entend et faire ressentir une expérience, plonger le visiteur dans son univers, explique Alessandro Buffoni. À l’inverse, le détaillant a un rapport de proximité – pas seulement géographique d’ailleurs – avec son client. Ces deux types de commerce ne sont pas concurrents, au contraire. Je suis persuadé que le surplus de visibilité et de notoriété qu’apportera le magasin monomarque profitera à tout le monde.  » À commencer par l’actionnaire, la marque entendant bien rentabiliser ses investissements en doublant son chiffre d’affaires d’ici cinq ans.

Sur trois étages et plus de 800 m2, le détenteur des droits des pièces cultes de Le Corbusier, Franco Albini et Frank Lloyd Wright, entre autres, mettra en scène de façon exhaustive ses collections Home et Contract. Mais il profitera également de l’ouverture de son nouveau showroom pour présenter en première mondiale de nouvelles rééditions de meubles signés Charlotte Perriand et Gerrit Rietveld. Des valeurs sûres si chères au (bon) goût des Belges.

PAR ISABELLE WILLOT

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