La directrice artistique de la prestigieuse marque italienne a choisi de revenir aux sources mêmes de la maison. Avec un succès qui ne se dément pas… Rencontre avec Frida Giannini, une femme de tête et de cour.

Elle est 100 % romaine, mais a choisi d’installer son QG au c£ur de Florence, berceau de Gucci, dans un vieux palais de la piazza della Signoria. Silhouette fragile, mais caractère bien trempé, Frida Giannini, 34 ans, a réussi le tour de force de dissiper le souvenir des sulfureuses années Tom Ford et de redonner son identité à la prestigieuse marque italienne, à savoir une féminité légère, joyeuse, sans jamais être agressive. Entrée dans la maison en 2002, la nouvelle star de Gucci préside désormais aux destinées de l’ensemble de la marque – des accessoires au prêt-à-porter – dont les ventes connaissent une spectaculaire envolée. Pour Frida, la pression est évidemment à la mesure des enjeux… Ce qui ne l’empêche pas de prendre le temps de se raconter, en toute sérénité.

Ma collection de cet automne…

 » J’avais commencé à travailler autour des années 1940, une période d’une richesse incroyable et qui reste pour moi le symbole même de l’optimisme, de l’énergie, du retour à la vie après les années de guerre. Et puis, j’ai découvert par hasard la biographie de Lee Miller et j’ai été absolument fascinée par le personnage. Cette femme exceptionnelle a été la muse de Man Ray, elle a vécu en Egypte plusieurs années avant de devenir la seule photographe américaine correspondante de guerre… J’ai été séduite par son courage autant que par son style et sa beauté particulière, à la fois féminine et très androgyne, et j’ai eu envie de travailler autour de son image. Comme je déteste les traductions trop littérales, j’ai imaginé des silhouettes contemporaines avec des manteaux oversized en tweed, des blousons d’aviateur féminisés, des robes du soir très hollywoodiennes… J’aime beaucoup cette collection, sans doute parce qu’elle est aussi une façon de lui rendre hommage. « 

Mon histoire d’amour pour Gucci…

 » Je suis italienne et Gucci fait totalement partie de mon histoire, j’ai l’impression de connaître la griffe depuis ma naissance ! A Rome, où j’ai grandi, on considère que chaque partie de la ville a son créateur fétiche : le nord est plutôt Fendi ; le sud, Gucci… Moi, j’habitais dans le centre, mais, à 16 ans, mes premiers stilettos ont été des Gucci ! Quand j’ai rejoint la marque, en 2002, en tant que chef de studio de la maroquinerie sous la direction de Tom Ford, je me suis sentie comme chez moi. J’ai ensuite pris la responsabilité des accessoires en 2004, de la mode femme en 2005, de la mode homme en 2006, et ce sentiment n’a jamais varié. J’ai beaucoup de chance de pouvoir exprimer ma vision de la mode d’une façon aussi globale et je pense que cela apporte à Gucci une grande cohérence, une véritable force. Et puis, je prends beaucoup de plaisir à transposer mes inspirations d’une collection à l’autre, à décliner le même tweed pour un gilet d’homme et un blouson ultraféminin… « 

Mon goût pour les accessoires…

 » Je suis une folle de sacs ! Je possède une belle collection de modèles vintage, j’en dessine depuis maintenant douze ans et, chez Gucci, ils font totalement partie du « code génétique » de la griffe. Lorsque j’ai repris les accessoires, je me suis plongée dans les archives, car je voulais revenir aux sources de la maison ; revisiter les symboles, les icônes qui ont fait le succès de Gucci. J’ai dessiné le sac Flora en réinterprétant l’imprimé du foulard en soie créé en 1966 pour Grace Kelly. Le Guccissima, lancé dans la foulée, a été une façon de remettre sur le devant de la scène notre célèbre logo avec ses G entrelacés… Le succès de ces modèles ? Il tient largement à l’équilibre entre une modernité de forme, de matière et ces multiples références à la marque. C’est d’ailleurs dans ce même esprit que je dessine toutes mes collections : mode, joaillerie… Comme cette ligne de bijoux qui reprend la forme d’un mors de cheval, autre image emblématique de la maison. « 

Les femmes qui m’inspirent…

 » Elles sont nombreuses ! Spontanément, je citerais Peggy Guggenheim, Audrey Hepburn, Grace Kelly… Toujours des femmes qui possèdent une indépendance d’esprit, un vrai tempérament. Pour moi, le style est avant tout une attitude, un état d’esprit, l’expression de la personnalité. Nous avons choisi pour notre campagne de bijoux Drew Barrymore, parce qu’elle représente exactement ce genre de femmes. Elle est à mon avis le type même de l’American beauty, parfois dans la transgression et toujours dans une absolue féminité. Dans un tout autre style, Madonna est également une icône Gucci depuis qu’elle a choisi l’un de nos blousons pour la promotion de son album Confessions of a Dance Floor… Blouson qui est aussitôt devenu un nouveau best-seller !  »

Mon vestiaire, mon parfum…

 » Je porte évidemment du Gucci, parce que j’adore ça, mais j’ai aussi une prédilection pour les vestes Saint Laurent, les robes Balenciaga et les stilettos de Pierre Hardy. Côté parfums, je suis pour le moment fidèle à Quercus, de Penhaligon’s, mais j’attends avec impatience le lancement de ma prochaine création, Gucci by Gucci, un jus sublime fait de goyave et de fleurs de tiaré, dont j’ai suivi pas à pas l’élaboration. « 

Mes projets, mes envies…

 » Ils ne manquent pas ! Nous préparons un nouveau parfum masculin, nous peaufinons le design d’un nouveau concept de boutique, notamment de celles de Rome et de New York qui seront inaugurées au début de 2008. Et puis, nous allons poursuivre notre partenariat avec l’Unicef : depuis 2005, nous vendons de novembre à décembre 15 modèles exclusifs dont 25 % du prix est reversé à l’association ; en 2008, notre sac l’Incontournable restera en boutique toute l’année. Ce projet a été imaginé avec toute l’équipe et il nous tient particulièrement à c£ur. Parce que la mode est aussi affaire de générosité… « 

La suite de cet entretien sur www.weekend.be

Propos recueillis par Lydia Bacrie

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