Sous son air apaisé, le romancier affronte ses démons en revisitant le mythe de Morphée. Entrons dans les dédales d’un homme séduisant.

Enfant, vous rêviez deà

Laurent Gaudé : Livres et de voyages. Il y avait une telle adhésion avec les histoires, que je ne distinguais pas la réalité de la fiction.

Et adulte ?

Toujours pareil, je reste une fabrique à rêves, qui voyage à travers les cartes, les guides et les magazines.

Dans la poche de quelle célébrité aimeriez-vous vous glisser ?

Dans celle de Laurence d’Arabie pour ses voyages, sa découverte de diverses civilisations et sa rencontre avec les Bédouins. Ce serait exaltant d’être témoin de la fureur et des convulsions de l’Histoire.

Quand vous sentez-vous au paradis ?

Quand j’écris cinq bonnes pages et que j’ai la force d’en écrire cinq autres. Ou que je bois l’apéro sur une terrasse napolitaine ou du côté des Pouilles. Face à une lumière de fin de journée, le temps est en suspens.

Et en enfer ?

Alors que le paradis est multiple, l’enfer est monochrome. Il correspond à mes moments de douleur.

Redoutez-vous la mort ?

Oui, la mienne et celle des autres. Je trouve la mort révoltante. Elle est un couperet, qui empêche le revirement.

En cas de rencontre avec la Mort, que lui diriez-vous ?

Ouvre les portes, laisse remonter les Morts le temps d’une soirée festive, à la mexicaine !

Quelle personnalité aimeriez-vous ramener de ce royaume ?

Frédéric II, le roi des deux Sicile, qui apparaît dans mon roman. Je suis fasciné par la folie parce que les limites acquises, entre le possible et l’impossible, sont enfouies en nous.

Le mythe de Morphée, rêve ou cauchemar ?

C’est un fantasme, une tentation réelle de pouvoir transgresser les frontières imperméables entre la vie et la mort.

Que seriez-vous prêt à faire par vengeance ?

Je l’ignore, mais je crains d’avoir ça en moi. Alors, je l’interroge de façon récurrente comme dans ce roman. La vengeance est le premier réflexe du bras armé de la colère.

Qu’est-ce que le courage ?

Aller au bout, sans abandonner. Si je tourne, sans cesse, autour du thème du passage, c’est parce qu’il faut beaucoup de courage pour être fidèle à soi-même.

L’objet à sauver en cas de tremblement de terre ?

Si c’était la fin du monde, je prendrais un stylo.

Quelle est la porte qui mène à Laurent Gaudé ?

( Sourire.) L’Italie, le théâtre et Montparnasse, car c’est là que je vis et que j’ai toujours vécu. Je ne sais pas d’où me vient cet amour profond pour le sud de Rome, mais en rencontrant l’amour, j’ai découvert les Pouilles par alliance. Là-bas, cela me plaît d’être à la fois familier et étranger.

La Porte des Enfers , roman, par Laurent Gaudé, Actes Sud, 272 pages. La Tribu de Malgoumi , album pour enfants, par Laurent Gaudé & Frédéric Sther, 80 pages.

Propos recueillis par Kerenn Elkaïm

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