Ligne Roset le french flair

A Moscou, Dubai ou Miami, dites  » Ligne Roset « , on vous répondra  » mobilier haut de gamme « . Dès les seventies, la plus frenchy des marques de mobilier contemporain a su s’imposer à travers le monde. Aujourd’hui, avec sa soixantaine de designers, Ligne Roset est une référence mondiale.

Dans People or not People, Lauren Weisberger – l’auteur du fameux Le Diable s’habille en Prada – livre la chronique acidulée d’un microcosme new-yorkais branché qui ne jure que par Manolo Blahnik, Blackberry et… Ligne Roset. Surprenant ? Pas tant que ça si l’on en croit Michel Roset, directeur général de l’entreprise.  » Notre marque jouit d’une incroyable notoriété internationale, jubile-t-il. Nous sommes présents dans toutes les villes du monde, de Moscou à Los Angeles. Nous réalisons 70 % de notre chiffre d’affaires au-delà de nos frontières. Mais, attention, cela ne signifie pas que les gens savent forcément que c’est une marque française. En Allemagne par exemple, la plupart des clients croient que nous sommes allemands. Après tout, qu’est-ce que ça change ?  » Pourtant, c’est en France, et plus précisément dans l’Ain, que tout a commencé. Les meubles sont tous fabriqués là avant de s’exposer partout dans le monde et sur les publicités des magazines un brin osées mettant en scène bouche pulpeuse, galbe d’une jambe et corps dénudé avec le détail d’une création maison (la marque a remporté plusieurs prix publicitaires avec cette campagne).

Avec 1 350 salariés, 6 usines et 850 points de vente à travers le monde, cet empire né en 1860 et demeuré depuis dans la même famille a su surfer sur les vagues successives. Notamment grâce à ses dirigeants : Pierre, le président, l’entrepreneur, l’organisateur, le financier ; et Michel, le créatif passionné de déco, qui nous reçoit aujourd’hui.

A l’origine, à la fin du xixe siècle, étaient le manche de parapluie et la canne en bois. Quelques décennies plus tard, évolutions technologiques et reconstruction de la Seconde Guerre mondiale obligent, Jean Roset – petit-fils du fondateur, et père de Pierre et Michel – insuffle une énergie nouvelle à l’entreprise familiale. Fan de bois, il commence à collaborer en France avec des architectes pour bâtir des amphithéâtres, des chambres universitaires, du mobilier pour hôpitaux et hospices civils…  » Malheureusement, travailler pour l’Etat français, ça ne payait pas, raconte Michel Roset. Alors mon père s’est associé à Michel Ducaroy, étudiant aux Beaux-Arts de Lyon, pour se lancer dans le domestique.  » En 1968, pendant que les jeunes font la révolution dans la rue à Paris, Roset la fait dans les salons. Son truc ? Imaginer une façon différente d’habiter, publicités libertaires à l’appui. Meilleur exemple de cette tendance, le fauteuil Adria, premier siège en mousse dont l’assise rase le sol.

Le fauteuil Togo, mythe fondateur

Cinq ans plus tard, c’est la consécration : le designer imagine Togo, une création au succès jamais égalé.  » A l’époque, les gens nous prenaient pour des cinglés, se souvient Michel Roset. Il faut dire que ce canapé proposait des façons de s’asseoir originales et, surtout, il était très léger alors qu’une assise se devait d’être lourde pour avoir de la valeur.  » La dessinatrice Claire Bretecher le croque, Sonia Rykiel le customise et, trente-cinq ans après, les trentenaires qui, enfants, jouaient sur le modèle de leurs parents, s’offrent l’original et craquent pour le modèle XS pour la chambre de leur progéniture.

Faire du bien à l’£il et à l’âme

Dans les années 1970, tout s’accélère. Roset devient Ligne Roset. La société jongle entre ses activités de fabricant, d’éditeur et de distributeur. Les arts de la table, les luminaires, les tapis viennent progressivement tenir compagnie aux canapés, aux fauteuils et aux lits. La première boutique ouvre ses portes à Créteil. Ligne Roset mise d’emblée sur l’exportation, d’abord en Allemagne, en Belgique et aux Pays-Bas. Michel Roset lance Cinna  » pour s’amuser  » et donne un salvateur coup de pied à Ligne Roset qui, forte de ses succès, aurait pu se reposer sur ses lauriers.  » J’ai commencé à craindre que les créatifs de Ligne Roset s’encroûtent. J’ai donc décidé de miser sur les free-lances. Ils ont plus d’énergie à revendre.  » L’équipe des créateurs intégrés se réduit comme peau de chagrin et les collaborations extérieures ne cessent de se développer. Aujourd’hui, une soixantaine de designers indépendants signent chez Ligne Roset. Parmi eux, on trouve les incontournables Pascal Mourgue, Frédéric Ruyant, Arik Levy, Eric Jourdan ou Peter Maly qui, chaque année, posent leur regard sur un fauteuil, une table ou une lampe. Voilà la richesse de Ligne Roset. Cet hiver, Didier Gomez a livré Malhoun, un canapé jouant sur le contraste entre formes géométriques et confort du dossier capitonné. So tendance. La très talentueuse Inga Sempé vient de signer les majestueux fauteuils Moël au confort moelleux. Pierre Paulin promet de ressortir en 2008 quelques belles pièces de ses cartons tandis que Peter Maly devrait exposer une bibliothèque et un bahut  » défragmentés qui iront parfaitement avec les Facett aux allures d’origami de Ronan et Erwan Bouroullec « , confie Michel Roset. François Azambourg vient, lui, de créer Faisceau, une sculpture lumineuse en fibres optiques.

Place aux jeunes !

Avec une dizaine de propositions reçues chaque jour des quatre coins du monde, les portes ouvertes des écoles et les aides à la création du VIA (Valorisation de l’Innovation dans l’Ameublement), les propositions de jeunes designers pullulent. Beaucoup d’appelés, peu d’élus. Grégory Lacoua et Pierre-Léon Luneau font partie de ceux-là. Le premier avec son tapis transformable en pouf-tabouret, le second avec sa table à fermetures Eclair qui, en 2008, devrait être la pierre angulaire d’une collection d’extérieur. Un sacré tremplin pour des jeunes à peine diplômés… qui, lorsqu’ils sont adoubés par Michel Roset, ignorent qu’ils seront édités par Ligne Roset ou Cinna. Signer chez l’un ou l’autre,  » ça se tire à pile ou face, sourit Michel Roset. Ces deux marques sont concurrentes sur le marché français : elles se partagent le même créneau, ciblent la même clientèle. Cependant, au final, tout sort des mêmes fourneaux et, une fois à l’étranger, tous les produits se retrouvent sous l’appellation Ligne Roset.  » Fabricant, créateur, distributeur et découvreur de jeunes talents, Roset a définitivement inscrit ses lettres de noblesse dans notre monde contemporain.

Clémence Leboulanger

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