Envie de farniente sur la plage, de vieilles maisons coloniales et de clubs où danser la salsa jusqu’au bout de la nuit ? Voici la destination idéale.

Panama City est la première bonne surprise du pays, un cocktail urbain moitié Dallas moitié La Havane avec un zeste de quartiers métissés et épicés. Un goût de rêve américain avec ses banlieues proprettes où logeaient les administrateurs du canal venus des États-Unis, dilué dans les vagues à l’âme d’une population aux sangs mêlés. Dès l’atterrissage, les mondes s’entrechoquent : la jungle enserre encore une capitale hérissée de gratte-ciel qui se multiplient jour après jour. Des avenues larges comme des autoroutes sillonnent les bords d’une baie ouverte sur l’océan Pacifique, jusqu’aux portes de la vieille ville fortifiée de Casco Viejo.

En traversant de rutilants canyons de verre et d’acier entre la Via Israel et la Maimonides Street, on passe par le quartier juif, devenu le quartier ultratendance : tous les matins, ses habitants garent leurs Audi, Porsche et autres berlines sur le parking de la Panama Canal Railway Company. Sur la même voie ferrée, qui transportait la main-d’£uvre vers les terres inondées du canal en construction, un train luxueux les emmène jusqu’au port de Colon, sur l’Atlantique. Deuxième zone franche du monde en chiffre d’affaires après celle de Hongkong, ses revenus ont métamorphosé le pays. Ces entrepreneurs immigrés sont les nouveaux héros de la nation, chargés d’élargir le tracé du canal pour accueillir les nouveaux supergéants des flottes maritimes modernes. Sur l’isthme, cet étroit ruban de jungle, se sont croisés au fil d’une histoire agitée Indiens, conquistadors et esclaves africains, avant qu’y débarquent des armadas d’ouvriers de tous les pays, venus percer le canal. Plus de cent ans après que Ferdinand de Lesseps a creusé la terre sur 80 kilomètres et relié ainsi l’Atlantique au Pacifique, le canal reste le grand spectacle de Panama. Une route longe son parcours, où de gigantesques navires passent à quelques mètres de vous, comme surgis d’une jungle fantasmagorique.

FLEURS D’ARUMS

Aussi diverse que la population est la nature : là-bas, c’est encore les Caraïbes et déjà l’Amazonie. À quelques kilomètres de Colon, les rivières d’un parc national s’étalent en lagune à côté de Portobelo, où les trains de mules chargées d’or et d’argent embarquaient leurs cargaisons sur les galions espagnols guettés par les pirates. Les ruines des forts envahies de fleurs d’arums ont abandonné les parades des garnisons pour celles du carnaval des anciens esclaves congos parodiant leurs anciens maîtres. Le long de la côte, où s’ancrent les voileux, seules les pétarades de bus bardés d’images pieuses troublent les chants des hommes mêlés aux cris des pélicans sacrés.

Changement de décor de l’autre côté de la baie, où les souvenirs d’un passé hispanique et colonial hantent les rues pavées des quartiers populaires, qui finissent sur les remparts du Casco Viejo. Au contraire de La Havane, son éternelle rivale dans la course au titre de perle des Caraïbes, la vieille ville s’est refait une beauté et en met plein la vue à ses nouveaux admirateurs. Au milieu des échoppes des  » laveria spirituale  » (blanchisseries spirituelles !), des stands de  » Loteria  » de la plaza de los Aburridos (la place des ennuyés), jusqu’aux bords des anciens quartiers louches de la Zona Rossa, des bars branchés et des hôtels de charme se sont installés au c£ur d’un labyrinthe de balcons et d’arcades festonnés de ferronneries. Plus loin la Zona Viva, ses clubs et ses casinos vibrent toutes les nuits au son de la salsa.

COQUETS CHALETS

Passé le vieux Puente de las Americas on change de continent. Droit devant, c’est l’Amérique du Sud. On fonce sur l’Interamericana, le long des plages torrides de la côte pacifique, avant de gravir, comme un mirage de fraîcheur, les escarpements volcaniques de la province de Coclé. El Valle de Anton y est niché au creux d’un cratère tapissé de pâturages presque bavarois, ponctué de coquets chalets, où les orchidées remplacent les colchiques. Plus haut, l’eau cascade dans la forêt tropicale, au-dessus de Penonomé, où les brumes s’accrochent aux pics qu’on escalade à dos de mulet dans des nuages de papillons.

Cap au nord, dans un coucou surchargé de planches à voiles qui s’envole vers l’archipel de Bocas del Toro. Mer des Caraïbes oblige, les eaux y miroitent entre le jade et le turquoise, glissant des franges de sables roses jusqu’au c£ur des mangroves. D’un côté il y a le trépidant village de Bocas, peinturluré de couleurs acidulées, envahi par les surfeurs en goguette, le tintamarre des musiques créoles et les bastringues aux effluves de rhum où l’on chaloupe sous les palmes. À quelques encablures, des écolodges se sont réfugiés sur des petites islas où la distraction principale est de surprendre de drôles de petits singes au visage blanc guidés par les Indiens du coin, les Ngöbe et les Bugle.

Mais le bout du monde indien se trouve plus à l’est, sur l’archipel des San Blas, l’un des premiers territoires autonomes concédés aux populations indigènes lors d’une farouche révolution en 1925. C’est en pirogue ou à la voile qu’il faut aller se frotter à ces petits Indiens Kunas, orgueilleux à juste titre de l’indépendance de leurs 378 îlots, et de leur beauté inouïe. Si le paradis sur terre existe, il faut le chercher sur cette nuée d’îles de sable fin et frangées des mers parmi les plus pures du monde. Aux San Blas, le Panama a encore des allures de trésor bien gardé.

PAR JEAN-PASCAL BILLAUD

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