Portrait de huit Ukrainiennes qui ont tout (re)commencé en Belgique

© Yaqine Hamzaoui

D’un jour à l’autre, tout s’est effondré, et il a fallu tout recommencer. C’est ici, en Belgique, qu’elles ont ré-appris à se rassurer, avant de se chercher une nouvelle voie dans la mode, la restauration ou la culture. Portraits de ces Ukrainiennes qui revivent à leur manière.

Natalia Smischenko, harpiste

Travaillant comme harpiste au Théâtre d’opérette de Kiev, elle a quitté son pays au deuxième jour du conflit, y laissant son mari, ses parents… et son instrument.

natalia smischenko
© Yaqine Hamzaoui

«Quand nous sommes partis, je n’ai pas pensé à ma harpe. Je voulais juste m’assurer du bien-être de mes deux enfants. C’était effrayant. La famille qui nous a accueillis nous a beaucoup aidés pour les démarches et m’a permis de trouver une harpe, celle de la belle Sylviane Merchez. Je lui en serai éternellement reconnaissante ; elle m’a dit plus tard qu’elle avait vu la guerre dans mes yeux. Au début, j’éprouvais une peur animale pour mes enfants et de l’incompréhension. Plus tard, c’est devenu une colère féroce envers Poutine et ses partisans.

« Je savais que je devais jouer, pour rester forte pour ma famille. »

Je ne sais plus comment j’ai découvert Music Chain for Ukraine (NDLR: une structure regroupant des institutions musicales belges pour aider les musiciens ukrainiens) mais leur aide m’a permis de retrouver la créativité qui me manquait. Je savais que je devais jouer, pour rester forte pour ma famille. J’espérais rentrer cet automne mais ça s’est avéré impossible. La guerre m’a appris à ne rien planifier. J’essaye donc de normaliser ma vie ici. J’étudie le français, je fais du bénévolat et des concerts. J’ai traversé une dépression mais grâce au soutien des habitants, je retrouve mon état normal. J’ai déjà pu me produire dans votre belle ville de Charleroi et à Flagey. J’ai aussi ouvert la Journée de l’Europe au Parlement européen. Un honneur! J’avais choisi des morceaux de compositeurs ukrainiens. Et pour la première fois de ma vie, j’ai eu envie de pleurer pendant le spectacle.»

Veronika Danyliv

Veronika Danyliv, créatrice de mode

Elle a grandi à Kharkiv et appris la mode à Polimoda, Florence. C’est là qu’elle était le jour de l’invasion militaire russe. Depuis, elle a terminé ses études, quitté l’Italie, revu son Ukraine natale et fini par atterrir en Belgique, à Anvers où elle est stagiaire chez Christian Wijnants.

«Tout est tellement étrange, dit lentement Veronika. Il est arrivé ce que jamais je n’aurais imaginé et il faut désormais vivre avec ça. Je sais que nous sommes forts et je suis reconnaissante des sacrifices que les gens font pour moi.» Un ange passe pudiquement, la jeune créatrice de 21 ans murmure: «En parler me déprime…» mais volontaire, elle se reprend, elle doit «avancer», elle s’est juré d’apprendre tout ce qu’il y a à apprendre aux côtés de Christian Wijnants, avec le sérieux et la passion pour les imprimés, les couleurs, l’artisanat qui la caractérisent – son stage finira en mars, après, elle «avisera».

« J’avais commencé à créer ma collection avant la guerre, il a fallu que je la réinterprète, que je la connecte avec l’idée de faire revivre l’Ukraine. »

Elle est arrivée à Anvers mi-septembre. C’est un peu flou dans sa tête, elle se souvient juste qu’elle s’est pliée aux arguments de son père et de son amoureux – ils trouvaient qu’il ne faisait pas bon rester à Kiev, ni nulle part en Ukraine, qu’elle serait plus utile à l’étranger, qu’elle y développerait ses compétences et qu’alors elle pourrait revenir, de préférence quand la guerre serait finie. Ils avaient insisté pour mieux la convaincre: elle avait la possibilité de faire un stage chez Christian Wijnants «alors que d’autres n’avaient pas le choix», elle devait partir. «C’était une bonne décision…»

Pas un instant, elle n’avait imaginé vivre en Belgique. Pas même quand au début de l’année, la créatrice anversoise An Vandevorst jouait le rôle de mentor à ses côtés, au sein de l’école Polimoda où Veronika finalisait ses études et sa collection baptisée «Garden of Clouds». «C’est comme l’archétype de la représentation de mon moi le plus profond, constitué de mes souvenirs d’enfance, d’émotions, d’images de la maison de campagne, des pommiers en fleurs… J’avais commencé à la créer avant la guerre, il a fallu que je la réinterprète, que je la connecte avec l’idée de faire revivre l’Ukraine.» Il y est question de pureté, de blanc, de matière ouatée, «pour la sensation de protection» et de cotons doux, le tout brodé à la main, pour faire honneur à ses racines. En juin, elle faisait défiler ses créations, dans le public, sa mère et sa petite sœur Poline, 12 ans − «Ma famille me permet de survivre et de continuer à avancer.» Si aujourd’hui Veronika ne s’autorise aucun rêve, «on ne sait jamais ce qui peut advenir», elle se promet de lancer un jour sa collection à son nom à Kiev et d’être là-bas pour Noël.

Yulia Ostrohliad
Yulia Ostrohliad © Mathieu Van Winckel

Yulia Ostrohliad, chargée de projets dans le monde culturel

A Kiev, elle était en charge de la communication du Théâtre National. Elle a quitté la ville deux semaines après le début de la guerre, laissant son mari derrière elle. En 2014 déjà, Yulia avait dû tout abandonner lors de l’invasion russe de la Crimée.

« C’est très dur, ici, nous n’avons de l’électricité que quelques heures par jour, pas de chauffage. »

«Quand l’attaque russe a démarré le 24 février, c’était vraiment terrifiant car nous étions bombardés de missiles. Je faisais des crises de panique. Mon mari m’a poussée à partir au plus vite car il craignait pour ma santé mentale. Il est resté bien sûr. Tout cela résonnait très fort en moi car avant, je vivais à Lougansk dans le Donbass et j’ai déjà dû tout abandonner en 2014 lors de la première invasion russe. Je suis partie le 9 mars, à l’origine je devais me rendre en Allemagne. Mais à la frontière polonaise, j’ai rencontré le journaliste de la RTBF Mathieu Van Winckel, je l’ai aidé à trouver des témoins, j’ai aussi servi d’interprète. Quelques jours plus tard, il m’envoyait un message pour me dire qu’il avait trouvé un logement et un boulot pour moi au Théâtre National, à Bruxelles. Pierre Thys, le directeur, m’a proposé de documenter le travail des hommes et des femmes de théâtre en Ukraine, de faire entendre leurs voix. Ces témoignages peuvent être consultés sur le site du National.

Au moment où je vous parle, je suis à Lviv pour quelques semaines car j’avais trop le mal du pays. C’est très dur, ici, nous n’avons de l’électricité que quelques heures par jour, pas de chauffage. Les bombardements continuent dans tout le pays. Mais d’ici quelques jours, je vais rentrer en Belgique. On m’a proposé de collaborer sur un projet de documentaire avec la KULeuven, mené par la chercheuse Sofie de Smet et la réalisatrice ukrainienne Roza Sarkisian avec les étudiants ukrainiens de l’université.»

Liliia Maynosh

Liliia Maynosh, make-up artist

Elle a quitté Lviv au bout de deux semaines de conflit. C’est son hébergeuse, Camille, qui lui a trouvé son premier boulot. Liliia vit aujourd’hui dans une colocation multiculturelle qui abrite aussi un opposant russe.

«Je suis arrivée à Bruxelles pour rejoindre une amie d’enfance mais elle était en partance pour les Etats-Unis. J’avais deux semaines pour trouver un autre logement. Je me suis rendue sur le site mapahelp.me qui propose des hébergements. C’est par ce biais que j’ai rencontré Camille, une jeune fille incroyable qui m’a ouvert sa porte. C’était l’une des rares personnes qui avait ajouté une photo et un profil Instagram pour que l’on puisse l’identifier car j’avais besoin d’être rassurée, qu’il y avait bien une femme derrière le nom indiqué. Elle m’a aidée à trouver mon premier boulot ici en Belgique. J’ai été l’assistante d’un make-up artist sur un tournage de publicités et pour plusieurs shootings de mode. Je propose aussi des tutos sur mon compte Instagram @liliyamaynosh. J’ai eu beaucoup de chance de la rencontrer.

Il m’est arrivé aussi de travailler comme hôtesse d’accueil à la Commission européenne. C’est là d’ailleurs que j’ai trouvé la colocation dans laquelle j’habite désormais. J’y ai rencontré un citoyen belgo-russe qui a été forcé de quitter la Russie au début du conflit car comme opposant au régime, il avait même déjà fait de la prison là-bas. J’y suis retournée en septembre pour voir ma famille car il y avait des rumeurs comme quoi les femmes ne pourraient bientôt plus quitter le pays non plus. Cela m’a fait tellement de bien de les revoir. Depuis mon retour en Belgique, j’essaye de travailler à mon compte et de me faire un réseau.»

Diana Perchyk
Diana Perchyk © Yaqine Hamzaoui

Diana Perchyk, mixologiste

Etudiante en architecture, elle a quitté son pays juste après le début de la guerre. Positive mais perdue, elle officie auprès de la cheffe Isabelle Arpin.

Les yeux clairs de Diana Perchyk (2002) évoquent des cieux froids après la neige comme on les voit stagner à l’est du continent Europe. Un voile humide leur donne cet éclat de beauté tragique. Ses bras croisés crient le besoin immense d’être rassuré de cette jeune femme dont le cœur est en permanence «suspendu aux dernières nouvelles» d’un pays où elle a laissé ses parents et qu’elle aimerait «revoir une semaine à Noël». «Un jour j’espère, le lendemain je sombre.» Son visage garde une trace de l’adolescence qu’elle a dû quitter sans préavis parce que «rattrapée par la politique» dont elle ne veut pas se mêler car cela l’effraie. «Je suis encore un bébé», répète-t-elle comme pour conjurer le destin et convoquer un hypothétique lieu où son enfance subsisterait intacte. Ces jours heureux, Diana les a passés dans la petite ville de Krasnoïlsk, à «un jet de pierre de la frontière roumaine». Quand elle l’évoque avec «ses potagers, ses animaux, son bus qui passe deux fois par jour et ses hivers rigoureux», son regard se fissure. Pourtant, depuis son exil, Diana n’a pas failli, elle qui est arrivée à Bruxelles «moins pour fuir la guerre que pour quitter un pays à l’arrêt dans lequel il y a un couvre-feu à 22 heures et aucune perspective d’études ou travail − il était impossible de rester inactive à me morfondre».

« Les débuts ont été durs, le choc culturel est énorme. »

Neuf mois plus tard, on est surpris que l’intéressée réponde à nos questions en français, langue dans laquelle elle pense désormais – il n’est pas difficile d’imaginer l’ampleur du trauma linguistique de cette diplômée en architecture qui a eu l’habitude de s’exprimer en russe, roumain et ukrainien. «Il arrive que je cherche mes mots en parlant au téléphone avec ma maman, c’est comme s’il y avait une barrière dans ma tête.» Grâce à une cousine travaillant chez Isabelle Arpin, Diana a saisi la chance que lui offraient la cheffe et son associée Dominika Herzig. «Les débuts ont été durs, le choc culturel est énorme. Heureusement, le sommelier Danny Perone m’a prise sous son aile, il m’a imposée aux clients.» En raison de sa volonté, dès le mois d’août, Diana Perchyk s’est vu proposer un plein-temps dans le nouveau restaurant d’Arpin, le Ciao dans l’ancien Palais de Mérode transformé en Private Social Club. Là, elle concocte les cocktails – «une passion désormais» –, accueille les clients «adorables avec moi» et continue à étudier par elle-même pendant son temps libre, sans savoir «de quoi demain sera fait, ni si ma vie s’écrira en Belgique ou en Ukraine, ni si je travaillerai dans la restauration ou l’architecture».

Elena Drozd

Elena Drozd, directrice d’hôtel

Passionnée de voyage, elle était en transit quand elle a appris que Kiev, où elle dirigeait un hôtel, était attaquée. Depuis, elle a retrouvé un emploi similaire à l’Indigo, à Bruxelles. Mais sa tête est en contact permanent avec là-bas.

Son goût pour l’ailleurs lui vient sans doute d’un père ukrainien et d’une mère russe qui se sont rencontrés en Azerbaïdjan avant de faire grandir Elena dans une petite ville traversée par le fleuve Amour, à la frontière avec la Chine. Le 24 février, cette diplômée en relations internationales et management hôtelier est sur le chemin du retour pour Kiev, où elle dirige l’hôte Bursa. En escale à Doha après un voyage au Sri Lanka, elle reçoit un SMS d’un ami. «L’info n’était pas encore à la télé, se souvient-elle. J’ai dû prendre des décisions vite et à distance, je ne pouvais pas rentrer. C’était fou. J’ai fermé l’hôtel par téléphone pour ne pas mettre le personnel en danger. Envoyer 75 employés au chômage sans leur dire en face, c’est difficile. Et on ne peut pas imaginer ce que cela représente, sur le plan psychologique, de se retrouver «accidentellement» en lieu sécurisé pendant que nos proches doivent affronter la guerre. On ne peut pas s’empêcher de se sentir coupable de ne pas pouvoir aider.»

« Chez moi, pour 33 chambres et 2 restaurants, on a 75 employés, et ne demandez pas aux clients du bar d’aller passer commande au comptoir. »

Elena Drozd s’en ira à Varsovie, puis chez une amie à Hambourg, où elle passera deux mois à se ronger les ongles en cherchant un travail. Les entretiens se font à distance. Cinq ou six par jour. Jusqu’à ce que le propriétaire de l’hôtel Indigo, à Bruxelles, demande à la rencontrer «en vrai». Elle avait déjà vu notre capitale, mais elle ne savait pas qu’elle y travaillerait un jour. «C’est étrange, mais la ville me rappelle Kiev, par son architecture chaotique, ses espaces verts, le fait qu’on ne s’y sente jamais comme une étrangère… et ses châtaigniers.» La suite? Un petit appartement à Ixelles et une adaptation à la Belgian hospitality qui exige d’accepter qu’ici, il y a moins de personnel − «Chez moi, pour 33 chambres et 2 restaurants, on a 75 employés, et ne demandez pas aux clients du bar d’aller passer commande au comptoir. Les Ukrainiens sont beaucoup plus exigeants que les Belges au niveau des services.» Bien sûr, elle prend des nouvelles de Kiev en permanence. «Le matin, je dois savoir si mes parents vont bien et ce qu’ils font. J’aimerais qu’ils viennent vivre ici, mais ils n’ont pas envie de partir. Je peux comprendre. En septembre, je suis allée leur dire bonjour et j’ai ressenti des émotions contradictoires. D’un côté, il y avait les buildings détruits et les voitures criblées de balles. De l’autre, des gens qui plantaient des fleurs comme si la vie revenait. Retourner là-bas? C’est une question compliquée: après de longs mois d’incertitude, j’ai l’impression d’avoir trouvé un peu de calme, et je ne sais pas encore si je suis prête. Comme tous les Ukrainiens, on apprend à vivre littéralement au jour le jour…»

Victoria Yakusha
Victoria Yakusha © Yakusha Gallery

Victoria Yakusha, designer et architecte

Installée depuis trois ans en Belgique, où elle a établi sa marque et sa galerie Faina, elle a vécu la guerre par l’accueil d’exilés, le soutien humanitaire et la gestion de son équipe à Kiev. Elle œuvre aussi à la reconstruction architecturale et culturelle de son pays.

«Le téléphone a sonné en pleine nuit. Mes employés à Kiev m’ont dit: C’est la guerre! Depuis la Belgique, nous avons commencé à récolter des dons humanitaires. Notre maison à Uccle et ma galerie à Anvers ont vite débordé de cartons et mon mari a loué un camion pour les livrer en Ukraine. Des amis ont trouvé refuge chez nous. Mes employés, avec qui je restais en contact, ont repris la production après une dizaine de jours. Les premières victoires avaient fait retomber la panique initiale. Les Ukrainiens se sont mis à accepter leur nouvelle vie: face aux coupures d’eau, d’électricité, ils bricolent des solutions, inventent des activités à la bougie ou font du bortsch pour se donner de la force. Moi, je me concentre sur des projets qui font sens. J’ai esquissé les plans de reconstruction du musée de Chernigiv, qui a été bombardé, et ceux d’un futur musée dédié à l’artiste naïve Maria Prymachenko. A Miami Design à Bâle, j’ai montré une tapisserie parlant du lien des Ukrainiens à leur terre. Cette guerre n’a pas commencé en février, mais en 2014 ou il y a 300 ans. Quand elle sera finie, l’an prochain j’espère, nous pourrons nous retrouver. Etre nous-mêmes. Mais même pour les Russes, cela pourrait être une chance: celle de se libérer de cet impérialisme qui met leur propre futur en danger. Cela risque toutefois de prendre plus longtemps.»

Anastasiya Arzmasceva

faina.design

Anastasiya Arzmasceva, architecte d’intérieur

La conceptrice et ses filles ont trouvé refuge à Anvers. Une ville où elles ne sont pas seules. Peu à peu, avec leur petite communauté, elles trouvent leurs marques et envisagent un futur belge… et créatif.

« Repartir de zéro à notre âge n’est pas facile. »

«Après un mois à Cracovie, mes filles et moi avons rejoint ici mon amie Olga et sa famille. Trouver un appartement n’a pas été simple mais la générosité de deux femmes, Suzy et Lies, nous a permis de nous loger jusqu’en septembre. Nous vivons à présent près du KMSKA et de l’école des filles. Elles s’y plaisent. C’est créatif et tout le monde est accueillant. A Kiev, je concevais des vitrines et des décors de fêtes. Ici, on s’est associées avec Olga, qui gérait la plus grande discothèque d’Ukraine, et ma sœur Nataly qui, elle, organisait des festivals et est aussi arrivée en Belgique. Notre but est de créer des scénographies pour des magasins, pour l’horeca et l’événementiel. Je trouve Anvers très belle, mais elle le serait encore plus avec des agencements plus originaux… et plus abordables. Nous rêvons depuis des années de travailler pour Tomorrowland. C’est l’occasion de leur écrire, non? Mon mari nous a rejointes voici deux semaines. Architecte, il a commencé à travailler dans la construction. Repartir de zéro à notre âge n’est pas facile. Mais vu les incertitudes en Ukraine, nous n’avons pas le choix. Heureusement, nous formons ici une communauté d’une vingtaine d’amis. Cela aide.»

@events.noa

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