Rencontre avec la Bruxelloise Yeba Olayé, créatrice de sacs à la poursuite de ses rêves

Un Y structure sa pochette, Yeba Olayé affiche son nom et son label avec une tranquille assurance. Elle fut ingénieur mais est désormais créatrice de sacs, une histoire de destinée à accomplir.

Rencontre avec la Bruxelloise Yeba Olayé, créatrice de sacs à la poursuite de ses rêves
© Tine Claerhout

Le monde est son royaume, même si pour l’instant, il a les dimensions de l’ex-cabinet médical de sa soeur qui, aubaine, vient de déménager. Yeba Olayé en a profité pour y installer son quartier général, avenue Louise, à Bruxelles, à quelques encablures du bois de la Cambre, cela fait deux jours seulement.

Sur une table, parce qu’elle attendait notre visite, elle s’est empressée d’aligner sa première collection de sacs : The First, décliné en cinq couleurs, bordeaux, camel, noir, fuchsia et rose pâle, The Signature qui affiche son Y existentiel, The Smart et The Friend, qui portent si joliment leur nom, l’effet est parfait. Pour un peu, elle applaudirait, et elle aurait raison, on lui emboîterait alors le pas.

La jeune femme, 37 ans et deux petits garçons de 3 et 6 ans, est à l’aube de sa seconde vie, qui en réalité a déjà débuté il y a deux ans, quand « très, très enceinte », elle décide de changer de cap, d’abandonner son boulot intense au sein d’un cabinet de conseil qui la voyait jongler avec la finance, les stratégies et les missions d’analyses du pourquoi et du comment Jérôme Kerviel a réussi à faire perdre tant d’argent à la Société Générale.

Mais rien finalement dans sa vie n’est rectiligne. A 5 ans, elle quitte son Bénin natal dans les valises de ce père diplomate qui vient s’établir en Belgique et lui inculque le culte de l’excellence – si elle est aujourd’hui ingénieur, diplômée de Solvay (2002), c’est parce qu’elle est intelligente, beaucoup, et obéissante, un peu.

Elle embrasse donc le monde des audits, chez Deloitte puis chez BearingPoint, donne naissance à son premier petit en 2010 et sent alors poindre quelques doutes. « Les enfants vous font réfléchir au sens de la vie, à ce qui est secondaire et vaut d’être sacrifié. » Mais elle laisse ces questions en suspens, travaille pour The House of Marketing où il est toujours question de banques et de finances et quand elle accouche de son deuxième fils, on est en 2013, elle trouve enfin la réponse à ce lancinant « Qui suis-je ? Où vais-je ? » : « Je vais ouvrir ma boîte à rêves. »

Ce qui chez Yeba Olayé se traduit par un label d’accessoires de maroquinerie, sacs, pochettes et bientôt cabas, qui porte son prénom de princesse. Quand elle annonce la nouvelle à son paternel, il doit lui rappeler qu’à 6 ans, elle jouait « tendances », découpait des tas d’images dans les magazines de mode de sa mère et disait à qui voulait l’entendre qu’un jour, quand elle serait grande, elle serait styliste. Sauf que cela ne s’improvise pas, elle suit deux cursus en même temps, à l’Ichec (PME Start) et à Solvay Entrepreneurs, invente son business model et ses sacs dictés par son amour des lignes, des structures, de l’architecture.

Elle rencontre Emilie Beaumont, créatrice formée à La Cambre, qui réalise les maquettes en feutre, « elle a été mes mains, merci », cherche et trouve les meilleurs fournisseurs de cuir, de Zip, de fermoir, elle est persévérante, elle apprend. Un ancien maître des ateliers Delvaux se prend d’affection pour cet ovni entêté et lui enseigne les secrets du métier, « il m’a donné le vocabulaire et l’oeil qui me manquaient, j’ai alors pu aller à l’essentiel ». Soit l’Italie, Florence, où elle déniche l’atelier familial qui lui fabrique ses prototypes, deux essais et l’affaire est dans le sac. Reste alors le catalogue et les photos, elles seront signées Tine Claerhout, même esthétique, même exigence, même pureté, même sensibilité – cela se voit sur ce portrait en pleine page.

Puis tout s’enchaîne très vite, un salon parisien, les conseils bienveillants de Sophie Helsmoortel, de la boutique bruxelloise Cachemire Coton Soie, qui lui commande quelques pochettes dans la foulée – « ce coup de pouce m’a donné du courage pour affronter ce monde », il ne semble pas lui faire défaut pourtant. Yeba Olayé est une guerrière, traduction moins martiale : rien ne lui est impossible, son père le lui a suffisamment répété, elle est née pour suivre sa destinée, n’est-ce pas l’exacte signification de son prénom venu du fond des âges et légué depuis d’aînée en aînée.

www.yeba-essentials.com

BIO EXPRESS

1978 Naissance à Cotonou, au Bénin.

1984 Arrivée en Belgique.

2002 Termine ses études d’ingénieur à Solvay.

2010 Premier fils, premières questions existentielles.

2015 Lancement de Yeba, sa marque de maroquinerie.

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