La tendance des podcasts culinaires, si bons pour les oreilles
On mange avec les yeux, mais pas que! La tendance est aux podcasts culinaires qui explorent les coulisses de la planète food avec une vision pointue ou engagée de l’alimentation, sans exclusion.
Ça commence toujours avec l’huile qui frétille. Le bruit reconnaissable des éclaboussures brûlantes, l’odeur mordante du liquide qui chauffe, la langue qui anticipe le goût enrobant du gras et très vite, l’aliment qui dore dans le fond de la poêle. Un crépitement et déjà, tous les sens sont au garde-à-vous. Le lancement du podcast Casseroles est simple, mais saisit en une fraction de seconde l’essence du genre: l’incroyable pouvoir de suggestion du son, qui chuchote à l’oreille ce que l’on goûte d’ordinaire. « Il suffit d’entendre un couteau sur une planche et une casserole qui frémit pour imaginer le plat qui mijote », s’émerveille encore la journaliste culinaire Zazie Tavitian après deux saisons.
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Casseroles est l’une des références du format en France, où l’on parle du prochain repas alors même qu’on est encore attablé. A ses côtés, Bouffons, Manger, A Poêle, J’ai faim, L’épicurieuse, Patate, La grosse bouffe… Le podcast food est surreprésenté et courtise aussi bien les grands chefs que les bonnes fourchettes. C’est que « tout le monde mange, et même plusieurs fois par jour », note Zazie Tavitian. En Belgique, on peut notamment compter sur Gaudeamus, une « discussion de comptoir » animée par trois historiens amateurs de houblon. « Si ce genre de programme est si populaire, c’est parce que c’est un sujet qui nous concerne tous. Il faut aussi dire qu’il y a un certain regain d’intérêt pour l’alimentation ces dernières années, avec toutes ces émissions de cuisine. Sauf qu’avec le podcast, on peut se permettre d’aller un peu plus loin », analyse Mathias Desbonnets, l’un des créateurs de Gaudeamus. Tous les mois, le trio sort ainsi un épisode qui mêle histoire de la bière et dégustation. « A la base, on pensait qu’on toucherait juste notre bande de potes, et puis on s’est retrouvés avec des épisodes à 700 ou 800 écoutes », se réjouit-il. Des chiffres encourageants pour un module brassé en dilettante et lancé il y a moins d’un an.
J’ai toujours eu l’intuition que la bouffe permettait de raconter le monde.
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Make food great again
L’Américain Gastropod vient quant à lui de fêter ses 5 ans. Comme tout ce qui touche au format, les Etats-Unis sont à la pointe des « foodcasts ». Ils y sont développés par de véritables pointures de la gastronomie, tel le célèbre chef David Chang et son Dave Chang Show. Mais les propositions y sont aussi radicalement plus engagées. Comme celle de Julia Turshen, l’une des figures de proue de l’activisme culinaire américain. « C’est le format idéal, parce qu’on est littéralement à l’intérieur de la tête des gens, explique la créatrice de Keep Calm and Cook On, qui raconte le lien qu’entretiennent racisme, pauvreté ou genre avec la cuisine. Et avec ce type d’accès, vient l’opportunité de partager des histoires qui font sens et qui peuvent inspirer les auditeurs à passer à l’action. »
Une manière de penser la nourriture comme arme politique qui fait son chemin, mais reste encore largement cantonnée à la marge – et convient donc merveilleusement bien à cette niche. « J’ai toujours eu l’intuition que la bouffe permettait de raconter le monde », appuie Zazie Tavitian. Elle touche à l’écologie, au féminisme, à la politique… Enregistrer des gens qui mangent, qui cuisinent ou qui parlent de nourriture, c’est raconter des histoires individuelles, mais qui ont une valeur universelle. »
Grande tradition culinaire oblige, la France continue de dominer le secteur des podcasts culinaires francophones, mais rebat quelques cartes.
Dans la tempête de révélations de la Ligue du LOL, plusieurs podcasts français ont pris l’eau. C’est le cas de Bouffons, dont l’ancien animateur a été débouté. Ni une ni deux, la journaliste Emilie Laystary a repris le flambeau et le micro de cette émission culinaire, y insufflant à la fois expertise et modestie. Nems, coriandre ou bouffe d’hôpital: chaque épisode investigue un produit, un lieu ou une controverse de l’alimentation avec deux invités.
À la recherche de Jeanne
Entre deux saisons de Casseroles (lire par ailleurs), Zazie Tavitian a déterré un trésor: le livre de recettes d’une lointaine aïeule. Tout le monde dans la famille a entendu parler de Jeanne, qui a grandi à Genève et a été déportée en 1943, mais qui la connaît vraiment? Pour le savoir, Zazie va parcourir l’Israël de son arrière-arrière-grand-mère et faire cuisiner ses recettes à celles et ceux qui l’ont côtoyée. Un nouveau podcast binge-audio, à découvrir en janvier 2020.
Ils et elles font la gastronomie d’aujourd’hui, et le reconverti Fabien Anelli les croque dans un podcast qui s’invite directement dans l’antre des chefs. Entre découpe des produits, alarmes de fours et parcours singuliers, Ouïe chef-fe propose une conversation à coeur et cuisine ouverts, spontanée et immersive. Autre singularité: il s’agit d’un podcast totalement indépendant.
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