Le côté obscur du concentré de tomate

Une récente étude, réalisée par une université chinoise, montre que les individus mangeant des tomates deux à six fois par semaine ont 46 % de risque en moins de souffrir de dépression, par rapport à ceux qui n'en mange qu'une fois par semaine. Ce serait grâce au lypocène, un antioxydant présent dans la tomate. © Think Stock

Une enquête revient sur le concentré de tomate made in China que l’on retrouve partout. Dans les sauces, les surgelés et les pizzas de supermarchés, mais aussi du restaurant. Retour sur les coulisses peu ragoûtantes d’une industrie qui a envahi le monde.

Jean-Baptiste Malet s’était déjà fait remarquer avec son enquête sur les conditions de travail chez Amazon. Dans son dernier ouvrage, « l’empire de l’or rouge », qui parait 17 mai, il se penche sur l’industrie du concentré de tomate. Au terme d’une enquête de deux ans, il décrit les dessous peu reluisants de cette purée rouge, peu chère et sans goût que l’on retrouve partout.

La plupart des concentrés de tomates sont produits en Italie. Mais la tomate elle-même a souvent été cultivée ailleurs. Elle provient la plupart du temps de la région chinoise de Xinjiang. En moins de deux décennies, la Chine a phagocyté le marché européen et américain au point d’être omniprésente. Elle fournit aujourd’hui des géants comme Heinz, Kraft Foods ou Unilever.

Des généraux chinois

« Le point de départ de cette enquête, ce sont des barils de concentré de tomate que j’ai aperçus dans l’entreprise Le Cabanon, en Provence. J’ai vu qu’ils venaient de Chine, ça m’a interloqué. Pourquoi les faire venir de si loin ? », explique le journaliste de 30 ans dans Le Nouvel Obs. Cette entreprise a été reprise par un conglomérat chinois en 2004. Elle a été dépecée depuis. D’autres transformateurs de tomate en Europe et aux Etats-Unis ont subi le même sort. Un phénomène qui est appelé la « sino-militarisation » de la tomate, car la plupart de ces conglomérats sont dirigés par des généraux de l’Armée populaire de Chine.

Ces tomates gorgées de pesticides sont cueillies et transportées par des ouvriers sous-payés et parfois même par des enfants. A cela s’ajoute un système de faux étiquetage où la plupart du temps le made in Italy est usurpé puisque qu’à part la mise en boite rien ou presque n’est italien et des pratiques mafieuses à la « violence extrême » dit l’auteur sur BFM. « Leur chiffre d’affaires dans ce secteur est estimé à 15,4 milliards d’euros en 2014. Il n’a jamais été aussi facile pour les entreprises criminelles de faire fructifier des capitaux sales » dit-il encore.

Mais ce qui a surtout permis d’écraser la concurrence, c’est que la tomate utilisée a été génétiquement modifiée.

Pas de belles tomates rondes

Contrairement aux belles images imprimées sur les emballages, les tomates qui sont à la base de ce concentré ne ressemblent pas vraiment au fruit rond et rouge qu’on s’imagine. « La tomate destinée à être transformée en concentré n’est pas ronde, mais de forme oblongue. Elle est lourde, dense, très dure pour pouvoir être transportée par bennes sans s’abîmer. Quand on la croque, c’est très surprenant : sa peau croustille ! » dit encore le journaliste toujours dans Le Nouvel Obs.

Il faut dire que la tomate en question a été modifiée génétiquement par Heinz, dit encore le magazine. Elle aurait 30% de matière sèche, contre entre 3 et 5% pour les tomates normales. Et un pétoncle fragile pour faciliter la cueillette. Une tomate créée pour dominer le monde. Et c’est exactement ce qu’elle a fait.

Le saviez-vous ?

À l’arrivée des Savoie à Naples, en 1860, l’industrie de la tomate fut anéantie. Elle ne renaîtra que par la volonté d’un seul homme. Francesco Cirio, était analphabète ce qui ne l’a pas empêché d’être un expert dans la conservation des aliments en boîte. Grâce à des soutiens bien placés et une petite ristourne sur les chemins de fers, il sera l’architecte de la relance l’industrie de la tomate en Italie. « Depuis, l’industrie Cirio a connu bien des vicissitudes, mais la qualité de ses tomates San Marzano est restée intacte » dit U Mast.Un passionnant historique de la tomate d’Italie et en particulier de la San Marzano, le nec plus ultra des tomates italiennes la sauce des pâtes, est à lire en cliquant ici.

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