Livres pour enfants: nos 10 coups de coeur récents
Poétique, bucolique, graphique, historique ou militant, voici quelques coups de coeur récents au rayon livres pour enfants. A consommer sans modération.
La fille d’avril, d’Anne-Lise Heurtier, Casterman, 180 pages, 13,90 euros. A partir de 12 ans.
La fille d’Avril, c’est Catherine, une jeune Française de province de 15 ans, ado durant les années 60. Son quotidien ? Aider sa mère aux multiples tâches ménagères et aller à l’école pour un temps – à quoi cela sert-il que les filles y restent trop longtemps ? Elle se met un jour à courir par hasard, et se surprend à aimer cela, le coeur qui bat plus vite, l’adrénaline qui traverse le corps. Seulement voilà, en ce temps-là, quand on est une jeune fille bien dans le rang, on se prépare à sa future vie d’épouse, on ne se donne pas en public en faisant des efforts physiques… Dans ce roman forcément engagé, il est question d’émancipation, de la condition de la femme, des interdits imposés par la société, d’hésitations et de fougue aussi quand il s’agit de sortir des sentiers tout tracés… Valable il y a cinquante ans comme aujourd’hui encore, dans certaines parties du monde…
A travers, de Tom Haugomat, Editions Thierry Magnier, 185 pages, 20 euros. A partir de 6 ans.
C’est un livre inclassable, mais qui se lit d’une traite, le souffle coupé et le poil hérissé. Est-ce pour les enfants ? Ou pour les parents ? Les deux, en somme, tant le propos se distille par couches, tout en subtilité. Par la force de dessins ultra graphiques animés tout le long de cinq couleurs, on déroule la vie d’un homme, né un jour de mars 1956, décédé en avril 2026. Un passionné par le ciel, ses avions et ses fusées. Sa vie s’écoule, à travers des zooms, des plans larges et des changements de point de vue. Les pages de gauche et de droite se répondent, c’est un jeu de regards entre ce que le personnage vit et ce qu’il voit. Pas de mots, si ce n’est une date et un lieu, à chaque moment de sa vie. Pas besoin de plus, pour comprendre et s’éprendre de son parcours, pour sentir le temps qui s’écoule.
L’ours contre la montre, de Jolivet Fromental, Hélium, 48 pages, 15,90 euros. A partir de 3 ans
Il fait de son mieux, tous les matins, l’ours. Mais rien n’y fait. Il est en retard pour se préparer, arrive à l’école quand la grille est déjà fermée. Est à contretemps, et débarque au cours de musique en tenue d’éducation physique. Jamais à la bonne place, jamais au bon moment. Normal, il ne sait pas lire l’heure. Heureusement, c’est le weekend, sa famille dispose de deux jours pour lui expliquer le mouvement des aiguilles. En moins de deux, l’animal maîtrise son agenda comme personne, mais se laisse déborder par son emploi du temps ultra chargé… Doté de dessins colorés et graphiques, cet album rempli d’humour est parfait pour apprendre à lire l’heure, mais surtout pour prendre son temps et couler des jours heureux.
Cendrillon, de Charles Perrault illustré par Lucia Calfapietra, édition du Seuil, 15,50 euros.
C’est une nouvelle collection, pour jouer avec son livre et avec les plus célèbres contes. Ici, c’est Cendrillon qui est l’héroïne de ce carrousel de papier. S’y déploient quatre faces illustrées, représentant les lieux où se déroule l’histoire : la maison, la cuisine, le jardin et la salle de bal. Sur une planche cartonnée, les personnages principaux du récit sont prédécoupés et détachables, pour donner à l’ensemble une dimension en 3D. Les aventures de Charles Perrault sont quant à elles racontées dans un livret illustré par Lucia Calfapietra, dont le travail se retrouve de temps à autre dans les pages du Vif Weekend. A l’enfant de jouer les scènes emblématiques de Cendrillon, mais également d’inventer ses propres histoires. Ou comment faire revivre de façon originale des classiques de la littérature. Ludique au possible.
Les grandes personnes, d’Elisabeth Brami et Zelda Zonk, éditions Talents Hauts, 40 pages, 14 euros. À partir de 5 ans.
Il y a parfois un fossé entre la vision des enfants et celles des adultes. Et c’est ce fossé, ces deux façons de voir les choses que ce livre propose d’illustrer à travers une trentaine de conseils pour réconcilier les deux bords, qui ont parfois du mal à voir les choses de la même manière, question de point de vue, littéralement, qu’on soit une grande personne ou que l’on soit une petite personne. Car c’est malheureux, mais les grandes personnes ont souvent oublié comment elles pensaient elles-mêmes quand elles étaient des petites personnes. Ce livre vient le leur rappeler. Et ça fait du bien. Aux petits. Et aux grands.
Les filles, Agnès Rosenthiel, éditions La ville brûle, 52 pages, 14 euros
Voici une réédition qui, après 40 ans, trouve une résonnance toute particulière, climat féministe et combats girl power oblige. Une petite fille, un brin espiègle, aborde un petit garçon avec un « Moi je suis une fille, tu connais? ». Et de là, lui déroule ce qui fait d’elle une fille, une future femme, son plan de carrière, les rêves qui l’habitent. Elle s’invente son futur, ou rien n’est impossible, rien n’est figé. Ce petit livre en noir et blanc, au dessin et au graphisme efficaces, paru initialement en 1975, date à laquelle il fut publié par la fameuse Antoinette Fouque, militante féministe et figure emblématique du MLF, est en fait un véritable manifeste féministe à l’usage des petites filles et petits garçons. En 1975, les petites filles rêvaient déjà à tout. En 2018, c’est encore le cas. Et ça méritait d’être redit.
Parler avec les arbres, Sara Donati, 40 pages, 15,90 euros, à partir de 6 ans.
Cet album-là est l’album automnal par excellence. À une époque où la sylvothérapie est sur toutes les lèvres et l’art japonais du shirin yoku fait une percée dans les esprits occidentaux, ce livre tombe à point nommé. Communier avec la nature est peut-être plus évident quand on est enfant, où les règles de bienséance ne sont pas encore ancrées, le temps dédié à la contemplation est grand. Le petit héros va ici observer la nature, s’y sentir avec elle de plus en plus en accord, jusqu’à faire corps avec elle. Ce que le traitement graphique rend parfaitement, fondant de plus en plus le mini humain dans l’objet de son affection.
Si l’histoire m’était contée, Richard Unglik, Casterman, 240 pages, 29 euros. À partir de 8 ans.
« J’ai eu cette idée le 28 décembre 1999, le matin, juste avant l’an 2000. Ça a été comme un éclat fulgurant dans ma tête ».
Vous avez en tête leur slogan (« En avant les histoires ! »), c’est donc presque une évidence que les Playmobil s’attaquent à la grande Histoire, celle de l’Humanité. Après un Tour du Monde, la grande aventure des animaux et une Grande aventure de l’histoire, ce grand enfant qu’est Richard Unglik pour ne pas le citer, passionné des figurines plus que quarantenaires, retrouve ses joujous préférés – qui est aussi son moyen d’expression favori – pour relever le défi de relater la grande histoire de l’Humanité. En prenant successivement les casquettes d’assistant-réalisateur, de photographe, de graphiste, pour mettre en scène les avatars de nos aïeuls, illustres ou anonymes, les rôles principaux et figurants de cette palpitante aventure humaine. Car qui y a déjà joué le sait : les Playmobil sont capables de tout incarner. Entre épisodes fameux, périodes et personnages célèbres qui ont marqué son cours, ces reconstitutions spectaculaires offrent un point d’ancrage efficace pour les nombreux fans des ces petits bonhommes de quelques centimètres, à la coiffure et poignée de main reconnaissables entre mille, pour aborder la discipline historique. Une somme d’informations, qui donne envie d’aller plus loin. Et d’aller jouer soi-même.
Enfances, de Claude Ponti et Marie Desplechin, L’Ecole des loisirs, 2018. 16,80 euros. A partir de 11 ans.
Le trait et ses couleurs atemporels de Claude Ponti, papa de Foulbazar, et les mots de Marie Desplechin, prolixe auteur jeunesse, reviennent sur une soixantaines d’enfance, celle d’Andersen, désormais célèbre conteur, mais qui fut d’abord un enfant tenace sûr de son destin littéraire, Guillaume Tell, fils d’arbalétrier suisse, de Saint Nicolas ou encore Alan Turing à qui l’on doit l’invention de l’informatique. Les premières années d’enfants qui deviendront par la suite célèbres, marquant l’histoire du monde de leur personnalité ou de leurs actes. Ou qui resteront anonyme, en tout cas aux yeux du plus grand nombre. Les filles ne sont pas en reste puisqu’on y découvre les enfances d’ Eugénie Brazier , née en 1895, et première cheffe de cuisine, étoilée, d’Ada Lovelace , mathématicienne, Claudette Colvin, militante méconnue restée dans l’ombre de Rosa Parks, ou encore Nagiko Kiyohara, « Pointe Fine », et auteure née vers 965.
Un livre signé, par deux héritiers de leur héros, « l’enfant des grottes », qui a regardé la paroi d’une grotte un jour et ce tout premier geste: dessiner. Transformant ainsi la paroi qui s’est alors mise à raconter la très longue histoire de l’humanité. Un voyage à travers les enfances, extraordinaires et ordinaires – on pense au récit de celle de Pierre Bonhomme qui fait froid dans le dos – , mais aussi à travers les époques et les cultures. Un livre à mettre entre toutes les mains, qu’elles soient enfantines ou non.
Montessori à la maison, 9-12 ans, coédition Actes Sud-Kaizen, collection Je passe à l’acte, 64 pages, 9 euros. Pour les parents.
Petite exception à cette sélection que les enfants nous pardonneront: ce livre surtout destiné aux parents, se penche sur le cas des enfants âgés entre 9 et 12 ans, ces préado qui se comportent encore comme des enfants. A cet âge où l’on est comme coincé entre deux mondes.
Ce manuel pratique basé sur les préceptes – très à la mode – de la pédagogue italienne Maria Montessori, veut donner les clés et répondre à une question qui habite nombre de parents: comment explorer le besoin d’autonomie en le mettant en parallèle avec l’autodiscipline. Comment parvenir à instaurer une 3e voie située entre autoritarisme et permisivité afin que le passage dans l’adolescence de nos chers (ex) petits se fasse avec le minimum de heurts. Une série de conseils et de mises en situations pour accompagner la prise de liberté (inhérente au fait de grandir) en offrant à l’enfant les moyens progressifs de l’exercer. Des minis étapes à identifier et à franchir. L’une après l’autre. Utile.
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