Aux Etats-Unis, la nature sauvage reprend ses droits en ville
Les pelouses en gazon, minutieusement entretenues, sont depuis longtemps une des images associées au rêve américain, mais un mouvement cherche désormais à reconquérir les jardins de manière écolo-responsable, pour laisser libre cours à la nature.
« Nous savons que mettre des produits chimiques sur l’herbe pour essayer de la garder verte était un procédé futile qui n’était bon ni pour les enfants qui jouent, ni pour l’environnement », raconte Anna Burger à l’AFP.
Cette retraitée vit à une minute d’une station de métro de Washington, la capitale des Etats-Unis, mais se réveille chaque matin, aux chants des nombreux oiseaux qui habitent son jardin, que viennent également visiter papillons, écureuils et même chevreuils.
Elle a cultivé cette propriété en mettant l’accent sur les espèces indigènes qui fournissent un espace de nidification et une nourriture à la faune locale.
À quelques pâtés de maisons de chez elle, Jim Nichols, un infirmier et massothérapeute, pointe la petite pancarte obtenue auprès d’une association locale qui certifie que son jardin est un lieu où la faune et la flore peuvent proliférer de manière sauvage.
Il évite d’utiliser des pesticides dans sa cour, dispose de sources d’eau et d’espaces de nidification : « Nous avons beaucoup d’insectes et j’essaie de travailler avec eux », indique-t-il particulièrement fier des abeilles mellifères qui viennent lui rendre visite.
Irving et Gail, deux enseignantes à la retraite, âgées de soixante-dix ans et originaires du même quartier, ont une cour remplie de sous-bois et de douzaines d’arbres, attirant cardinalidés, geais bleus et merles, mais aussi de nombreux moustiques. « Les gens viennent et soit ils aiment, soit ils pensent que c’est ingouvernable », raconte Gail en rigolant.
Les critiques sont souvent les mêmes: « Ca a l’air désordonné, ça a l’air mal rangé… » décrypte Chris Swan, un écologiste de l’Université du Maryland Baltimore County. « Je ne pense pas que cela dérange les gens d’avoir quelque chose qui ressemble à… un endroit sauvage ou une prairie mais ils n’aiment que ça soit trop haut. Tout ce qui dépasse un mètre commence à les rendre mal à l’aise », remarque-t-il.
Réhabiliter les centres-villes
Au-delà des banlieues relativement riches, M. Swan soutient que les efforts de reverdissement peuvent être encore plus positifs dans les centres-villes.
De 2014 à 2018, il a supervisé une expérience dans la ville de Baltimore, à 48 kilomètres au nord-est de Washington, où des décennies de déclin démographique ont laissé environ 17.000 immeubles et 14.000 lots vacants.
La plupart de ces terrains avaient un sol de très mauvaise qualité et étaient recouverts de débris, mais M. Swan et ses collègues ont montré qu’ils pouvaient transformer ces lieux en prairies urbaines en plantant des espèces indigènes qui ont prospéré au-delà de leurs attentes.
Selon le Service des forêts du ministère de l’Agriculture des Etats-Unis, environ 15% des terrains des villes américaines sont vacants, soit quasiment la taille de la Suisse. Et lorsque les jungles urbaines prennent vie, « la qualité de l’habitat change, il attire la faune, les oiseaux deviennent fous, et au printemps, nous constatons une augmentation du nombre de pollinisateurs « , dit M. Swan à propos du projet de prairie urbaine.
Et elles semblent avoir des bienfaits sur les hommes: une étude publiée l’an dernier par l’Académie Nationale de Sciences a remarqué une baisse de près de 30 % de la violence par arme à feu autour des terrains vacants reverdis dans la ville de Philadelphie.
Un autre article publié en 2018 par l’Association Médicale Américaine qui s’est également penché sur la ville de Philadelphie, a révélé que la mauvaise santé mentale auto-diagnostiquée avait chuté de plus de 60 % comparée à un groupe témoin.
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