Phénomène : pourquoi nous rêvons tous d’un dressing de parfums

Isabelle Willot

Inspirée par la parfumerie de niche,  Valentino, Bottega Venetta, Fendi et Balmain ont sorti une collection de parfums. Oubliée la signature unique qui nous suit toute la vie. Les jus se collectionnent et se portent au gré de nos envies.

En juin dernier, Fendi rejoignait le club de moins en moins fermé des marques de mode ayant choisi de lancer une collection de parfums. Au menu de ce vestiaire olfactif: sept cartes blanches confiées à des stars de la parfumerie et toutes inspirées par une personnalité marquante de la famille à l’origine de la griffe romaine.

Fendi Roma, 330 euros les 100 ml.


Depuis lors, rien qu’en 2024, Balmain, Valentino et Bottega Veneta lui ont emboîté le pas pendant que les maisons déjà installées dans ce modèle inspiré par la parfumerie de niche étoffaient leurs offres. Alors que Chanel et Hermès viennent chacune d’enrichir d’un opus – Comète dans les Exclusifs et Oud Alezan dans les Hermessence – leurs lignes premium, Dior a décidé d’ajouter cette année une véritable extension de gamme à sa Collection Privée.

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

Baptisés Esprit de Parfum (395 euros les 80 ml), ceux-ci revisitent cinq des «parfums-totems» de la marque bousculés par le parfumeur Francis Kurkdjian. «J’ai souhaité que leur écriture affirme un véritable parti pris esthétique, que leurs sillages soient puissants», assure-t-il.


Naissance d’une niche

«En vingt ans à peine, le modèle traditionnel de la franchise – un parfum star comme N°5 ou J’Adore décliné à l’envi et incarné par une égérie dans de coûteuses campagnes publicitaires – semble avoir perdu de son attrait au profit d’une logique dite «à la Tom Ford», l’un des pionniers dans la mode à avoir opéré un basculement très lucratif vers la niche dès 2006», détaille Vincent Grégoire, directeur des tendances consommateurs chez Nelly Rodi à Paris. Avec une collection de parfums, les marques misent sur la logique du «moins mais mieux et plus cher».

Une approche qui, selon les prédictions du cabinet de conseil en stratégie, devrait encore s’intensifier dans la décennie à venir. Evalué à 3 milliards de dollars aujourd’hui, le marché mondial des parfums de niche devrait atteindre 7,4 milliards de dollars d’ici 2031. «En tournant le dos aux best-sellers de la parfumerie sélective dont les prix flirtent désormais avec ceux de la niche, les jeunes de la Gen Z, surtout, entendent montrer leur désir de se singulariser en optant pour des sillages qui reflètent leur personnalité», poursuit Vincent Grégoire.

Bottega Veneta, 390 euros les 100 ml.

Construit comme un véritable «dressing olfactif», le Vestiaire des Parfums d’Yves Saint Laurent constitue un parfait exemple de cette mouvance. Ici, chaque jus fait référence à une pièce iconique – Tuxedo, Saharienne, Lavallière – confortant ainsi l’idée que l’on se parfume aujourd’hui comme on s’habille, en fonction de l’humeur du moment ou des occupations que l’on a en vue.

Collectionnite aiguë

Le design des flacons – un modèle quasi identique, à un détail près, comme la couleur du verre ou du bouchon par exemple – incite aussi à les collectionner, faisant de cet élégant alignement un élément de déco qui claque sur les réseaux.

«Pour les fans de griffes comme Louis Vuitton ou Loewe, la collection de parfums est un bon moyen de marquer visuellement son appartenance à cette tribu… Même pour ceux et celles qui n’ont pas les moyens de s’acheter des vêtements ou des accessoires devenus de plus en plus chers ces dernières années, pointe Vincent Grégoire. Ces lignes, qui sont souvent vendues dans les boutiques des maisons et non dans les parfumeries classiques, leur permettent aussi de vivre une véritable expérience client, de ressortir de là avec un sac logoté.»

Clash de matières premières

Déclinée ainsi en une multitude de mini récits, la collection de parfum devient un formidable outil de «storytelling» pour des maisons disposant d’un riche patrimoine, formidable soutien à la création. Ainsi, lorsque Matthieu Blazy, actuel directeur artistique de Bottega Veneta, décide de lancer à son tour la première collection de parfums de la maison italienne, c’est sur l’héritage vénitien de celle-ci qu’il choisit de s’appuyer, le flacon en verre translucide faisant référence à la lagune qui entoure Venise.

Dries Van Noten, 295 euros les 100 ml.

Chez Balmain, Olivier Rousteing a même construit la gamme Les Eternels autour de quatre sillages iconiques de la maison tout droit sortis des archives et réinterprétés dans les codes d’aujourd’hui. Dries Van Noten l’a aussi bien compris: en proposant en 2022 non pas une mais dix fragrances, il tenait à refléter au mieux sa vision artistique.

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

«Dans ma mode, je propose toujours des collections étendues, généreuses, justifie-t-il. Je voulais rester dans une démarche de parfumerie de niche, avec des jus qui ne seraient pas testés, conçus autour de clashs de matières premières que l’on croirait a priori inconciliables.» On dirait bien que cela fonctionne… Le créateur belge a ouvert une boutique à Paris exclusivement dédiée aux fragrances et au maquillage. Et vient d’offrir à ses fans quatre nouvelles combinaisons intrigantes à souhait.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content