Delphine Kindermans
Y’a pas de mâle à se faire du bien
Si la mode est un éternel recommencement, elle n’est pas la seule. La beauté, entre autres, obéit également à ce paradigme. Mais encore faut-il choisir judicieusement son moment pour revenir sur le devant de la scène.
Prenez le cas du make-up pour homme, par exemple. Sur la liste des grandes tendances en matière de soin et de bien-être, il figure sans conteste en bonne position. Rien de neuf sous le soleil, cependant : à l’échelle de l’humanité, le maquillage a de tout temps compté parmi les attributs des deux sexes. Outre la préhistoire, au cours de laquelle il semble que nos ancêtres tant masculins que féminins se recouvraient le corps de peintures obtenues à partir de plantes et de glaise, les hiéroglyphes qui ont traversé les âges montrent que chez les Egyptiens, dès 3 000 av. J.-C., les rois et les reines étaient fardés. Les Romains, eux, n’hésitaient pas à masquer leur calvitie avec de la peinture. Et aux XVIIe et XVIIIe siècles, pas un aristocrate n’aurait eu l’indécence de se rendre à la cour le visage non poudré, sans perruque ou sans un peu de rouge aux joues.
À l’échelle de l’Humanité, le maquillage a de tout temps compté parmi les attributs des deux sexes.
Et pourtant, au tournant des années 2000, quand Jean Paul Gaultier ou Tom Ford ont développé des cosmétiques dédiés à ces messieurs, leurs tentatives se sont soldées par des échecs. La faute à l’air du temps, donc du marché, pas assez mature à l’époque, sans doute. Ce n’est visiblement plus vrai aujourd’hui, et les poids lourds du secteur l’ont compris, qui se sont quasi unanimement relancés à la conquête de ces consommateurs potentiels.
On peut citer Chanel avec Boy, Rimmel avec Brow and Beard for Men, ou Givenchy avec Mister, même si cette dernière, a contrario de ce que laisse entendre son appellation très genrée, soit mixte, comme la collection Backstage de Dior – » quand je pense maquillage au masculin, je pense avant tout égalité homme-femme « , confie Peter Philips, le Belge aux commandes de la création et de l’image pour la maison parisienne.
Des lignes simples, faciles d’utilisation et au nombre d’occurrences réduit : un baume à lèvres, un crayon à sourcils, une base matifiante, éventuellement un cache-cernes… Mais il n’empêche, on est ici bien au-delà du combo after-shave et crème hydratante, que beaucoup d’entre eux n’ont d’ailleurs toujours pas adopté, interprétant peut-être ces » artifices » comme une atteinte à leur virilité. Un raisonnement aussi stupide que celui qui consisterait à dire qu’une fille n’a pas de charme sans maquillage…
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