L’art de couper le jambon en Espagne: une discipline de plus en plus investie par les femmes

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Couper du « jamón » est tout un art en Espagne, qui peut parfois rapporter plusieurs milliers d’euros par pièce. Mais un art encore majoritairement masculin, que les femmes commencent à investir.

Dans les supermarchés espagnols, les femmes sont déjà nombreuses à manier le couteau pour trancher des jambons ibériques, qui s’exportent comme de vrais produits de luxe – une pièce entière peut coûter 3.000 euros en Chine. Au plus haut niveau en revanche, elles se font beaucoup plus rares.

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Quería escribir unas líneas a pocos días de la final del XI Campeonato Nacional de Cortadores de Jamón.
Después de mucho…

Geplaatst door Puri Garabaya Garcia op Dinsdag 22 januari 2019

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Fin janvier, Puri Garabaya, 31 ans, a été la première « cortadora » (coupeuse) à participer à la prestigieuse finale du championnat national des « cortadores de jamón » à Jabugo en Andalousie qui a couronné un homme, Aníbal Falcón. « C’est une fierté immense pour toutes les femmes, qui peuvent se dire: regarde, nous aussi on peut arriver jusque là ! », a-t-elle déclaré à l’AFP avant la finale. Les femmes s’autocensuraient jusqu’ici « par manque d’assurance » face aux exigences de ces compétitions où la découpe doit devenir un véritable spectacle, dit-elle: finesse de la tranche, présentation de l’assiette, tenue vestimentaire, célérité…

« Pour qu’un « cortador » devienne un maître de l’art, il doit être capable de transformer la découpe en sensations, en harmonie et en émotions », explique à l’AFP Florencio Sanchidrian, une célébrité dans ce domaine. Il a déjà coupé du jambon pour les acteurs Robert De Niro et Al Pacino, pour le pape Jean Paul II, le roi d’Espagne ou encore le président américain Barack Obama… Au tarif de 3.500 euros la séance de découpe, voire « parfois plus », indique-t-il.

« On est un peu comme des stars du rock, chacun a sa réputation », plaisante Raquel Acosta, qui fait partie avec Puri Garabaya des pionnières dans le monde masculin des concours de « cortadores ». Originaire de Burgos, à 250 km au nord de Madrid, cette étoile montante de 27 ans a débuté dans une boutique de jambons à Salamanque, plus à l’ouest. Mais à l’époque, « je ne connaissais pas de femme ayant déjà participé à un concours » et « on n’entendait même pas parler de « cortadora »! Si on cherchait le mot sur Google, on trouvait une machine qui coupe du jambon ».

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Aujourd’hui encore, les coupeuses de jambon qui ne se consacrent qu’à cette activité se comptent « sur les doigts » de deux mains, souligne Raquel Acosta. Elle a voyagé cette année à Berlin, Paris, Marseille et Londres pour promouvoir le jambon ibérique, une opportunité « inimaginable » pour elle auparavant. « Cela a demandé plus de travail aux femmes d’entrer dans ce monde », reconnaît Manuel Pradas, conseiller de « cortadores » à Barcelone et fin connaisseur du secteur depuis 50 ans. Selon lui, le jambon a « longtemps été coupé de manière rudimentaire », faisant écho à « une Espagne plus ancienne, plus profonde, plus machiste ». Mais les années 2000 ont vu émerger « une nouvelle image du cortador, qui a étudié toutes les techniques de découpe » et de présentation du jambon », et qui s’est modernisée, intégrant des femmes dans la profession.

Les réseaux sociaux ont aussi contribué à améliorer la visibilité des « cortadoras », selon Miriam Lopez, fondatrice du blog spécialisé Jamon Lovers. Raquel Acosta, avec 11.000 abonnés à son compte Instagram et son projet initial de monter une équipe de femmes, est « la plus reconnue », estime-t-elle. « J’avais Raquel en exemple », abonde Luz Maria Zamorano, 35 ans, trois ans d’expérience et 2.000 jambons à son actif. « C’est un monde masculin mais j’ai voulu croire qu’il était possible d’apporter une touche féminine », dit-elle. Comme la plupart des « cortaderas », elle affirme que les femmes coupent avec plus de délicatesse et plus de soin que leurs confrères masculins. Une « touche » sur laquelle misent des producteurs de jambon pour faire leur promotion, tout comme des hôtels ou des télévisions. Les « cortadoras » apportent « de la fraîcheur », « une esthétique nouvelle » à la corporation, explique Manuel Pradas, qui gère à Barcelone une équipe de 25 « cortadores » – dont sept femmes.

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