Chic et choc: un logis où tout est permis
Il a acheté sa bague de fiançailles dans un distributeur de chewing-gum. Elle métamorphose son intérieur au gré des saisons. Bienvenue dans l’univers décalé et plein de joie de vivre d’un couple à la tête d’une agence graphique.
« Faites de votre maison votre destination de voyage préférée. » Telle est la devise de Véronique Priem et Toon Stockman, qui n’aura jamais été aussi pertinente que durant cette crise de la Covid. Le couple, à la tête de l’agence graphique Gazeuse, en Flandre-Occidentale, met sa philosophie en pratique. Ainsi, une balade chez eux ressemble à un road trip aux escales des plus surprenantes. D’abord, on passe par la chambre à coucher avec son plafond vert, noir et violet, pour ensuite aller admirer un bureau rouge vif verni brillant et s’arrêter devant une cheminée à rayures bleu marine et blanches. La dernière halte est la cuisine ouverte avec ses carreaux rouges et ses portes en Skaï blanc, ce faux cuir rétro que l’on retrouvait dans les bars ringards des années 70.
Au fil des saisons
Ce décor n’est clairement pas destiné aux personnes en quête de tranquillité visuelle. « Cela fait longtemps que cette abondance ne nous frappe plus. A force de vivre ici tous les jours, une cheminée rayée devient tout aussi discrète qu’un mur blanc », déclare Toon Stockman. « Nous ne nous lassons jamais de notre intérieur, même si nous y vivons depuis dix-sept ans. Un mois sur deux, quelque chose change ici. Par exemple, en hiver, nous mettons notre table à manger ronde devant la cheminée, et en été le canapé migre parfois vers la terrasse. En réalité, j’aime déplacer les objets et les meubles. De cette manière, la maison semble toujours neuve », poursuit Véronique Priem.
Avant qu’ils ne la démolissent et la décorent avec toutes ces couleurs, « il s’agissait d’une habitation typique, avec une façade chic et un formidable jardin avant. Une demeure qui devait avoir l’air particulièrement distinguée. Par contre, à l’arrière, des briques de moindre qualité avaient été utilisées. Sans parler de l’horrible véranda marron. C’était tout pareil pour l’intérieur. Il était divisé en pièces séparées et dans les espaces de vie, les briques brutes et les lourdes poutres en bois dominaient. Cela va sans dire, nous n’avons pas acheté la maison pour sa valeur architecturale, car ce style fermette bon marché ne nous plaisait pas. Mais nous aimions son emplacement dans la périphérie de Roulers. Petit à petit, nous avons commencé à voir comment nous pouvions la transformer à notre goût. » Les propriétaires ont donc pris leur temps pour personnaliser leur intérieur. « Ce n’est jamais fini, car j’ai toujours envie de tout refaire », dit-elle.
Le Plein de surprises
Depuis, la façade et le jardin avant ont bien changé. En effet, l’architecte Alexander Dierendonck a ajouté un duplex minimaliste, servant d’espace de bureau. « A la base, il était contre l’idée que je peigne le plafond en kaki, mais je souhaitais que l’espace corresponde à notre style », dit-elle en riant. Cette nouvelle aile abrite désormais Gazeuse, leur agence de design spécialisée dans l’image de marque, la conception graphique et la communication. « Nous travaillons pour le frère d’Alexander, le boucher Hendrik Dierendonck, connu entre autres pour son restaurant Carcasse. Mais nous réalisons également des projets pour des entreprises comme Orac Decor, le fabricant de kitesurf Shinn ou encore Durlet », explique Toon, qui a fait ses armes chez Modular.
Véronique Priem et Toon Stockman se sont rencontrés en 1986. Il avait 13 ans, elle 15. Depuis, ils ne se sont jamais quittés. Lui et son équipe s’occupent de l’image de marque et du design de Gazeuse, tandis qu’elle est en charge du stylisme et des couleurs. « Nous nous sentons bien tous les deux, raconte-t-il. Mais les goûts de Véronique sont surprenants. C’est risqué de vouloir lui offrir un cadeau. C’est pourquoi j’ai eu la folle idée de sortir une alliance d’un distributeur de chewing-gum. Cela s’est avéré être un bon pari. » Tous leurs amis le savaient: un jour, ces deux-là se lanceraient dans la décoration intérieure. Et ils avaient raison: l’an dernier, le couple a conçu sa propre ligne de déco excentrique. Cette collection comprend une lampe en corde (Holiday), un miroir en denim ou en pied-de-poule (Poseur et Rendez-vous) ainsi qu’un plateau de service en Skaï (L’embarras du choix). Autant d’objets, fabriqués en Belgique, qui respirent la décontraction et le plaisir. Et Véronique d’ajouter: « S’amuser avec son intérieur est une autre de mes devises. N’ayez pas peur de combiner les choses. Ne vous demandez pas si cela va aller dans votre maison. Osez briser les prétendues règles de goût. Et osez faire des erreurs: rien n’est éternel dans votre aménagement. C’est très facile de changer un meuble ou de repeindre un mur. Et en cas de doute sur un achat: choisissez toujours l’objet qui vous plaît le plus, pas celui qui va avec le reste. »
Osez faire des erreurs: rien n’est éternel dans votre aménagement.
Raconter une histoire
La philosophie de vie de la quinqua est contagieuse, notamment sa joie de vivre et le cran avec lequel elle a aménagé son intérieur. En effet, elle a choisi des couleurs, des objets ou des combinaisons sans limites ni guide. « C’est vrai, je fais les choses à ma façon. Mais j’admire aussi les architectes d’intérieur ou les décorateurs qui ont développé leur propre style. Je pense à Jean-Philippe Demeyer, au Studio Dimore de Milan ou à César Manrique, l’architecte de Lanzarote. J’aime particulièrement les intérieurs qui racontent une histoire personnelle. Par exemple, le grand flacon de parfum Chanel qui se trouve dans notre bibliothèque provient d’une parfumerie de Roulers, où je me rendais étant adolescente, pour acheter des affiches et des pancartes. Je les accrochais dans ma chambre. La vendeuse m’avait promis qu’un jour j’aurais cette grande bouteille. Elle a tenu sa parole. Maintenant, elle trône dans notre bibliothèque. Juste à côté de la porcelaine du Val Saint Lambert de mes beaux-parents. Et à côté d’un dragon orange que nous avons acheté lors d’un voyage à Hong Kong. »
Toute leur habitation est parsemée d’objets inattendus. Par exemple, le mur de la salle à manger est orné de couvertures de leur magazine fictif Suchalike. Ou encore la gigantesque photographie dans leur salon. « C’était une invitation à une fête organisée ici, à la maison. On y voit une table tournante, et du champagne, mais aussi des croissants accompagnés de saucisses Zwan. Le message était le suivant: n’espérez pas trop de la nourriture, mais l’ambiance sera de mise. » Quelque chose nous dit que ce fut une fête réussie. Une fête no limit.
En bref: Véronique Priem (50 ans) et Toon Stockman (48 ans)
Ils se sont rencontrés en 1986. Il avait 13 ans, elle en avait 15. Ils habitent et travaillent à Roulers.
Toon a travaillé chez Modular et Rotor, Véronique chez Agnès b., Anvers et ‘t Casteelken.
En 2010, ils ont fondé ensemble Gazeuse, une agence spécialisée dans le branding, le packaging et le design graphique.
En 2015, ils ont lancé leur propre magazine fictif Suchalike.
L’an dernier, ils ont mis au point leur ligne de décoration, également sous le nom de Suchalike, qui comprend des miroirs, des plateaux et des lampes.
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