Visite d’un pavillon brutaliste vintage, au coeur de la forêt
Dans ce pavillon de style brutaliste datant de 1969, laissé délibérément dans son jus, Eef et Koen vivent en harmonie avec la forêt. Et écrivent une nouvelle page de la belle histoire de cette maison atypique.
Eef et Koen étaient à la recherche d’un lopin de terre dans les bois, avec un étang. Un endroit retiré où ils pourraient construire un jour un chalet pour leurs week-ends. « J’avais besoin d’un cocon dans lequel je puisse m’isoler pour écrire », confie Eef Rombaut.
En vrais citadins, ils n’avaient pas l’intention de quitter leur maison de maître à Saint-Nicolas. Jusqu’à ce que, un jour, à Waasmunster, en pleine nature, Eef tombe sur un panneau « à vendre ». « Lorsque je suis allée voir sur place, un monsieur âgé est sorti du bungalow et m’a gentiment invitée à le suivre à l’intérieur. Une heure et demie plus tard, cet homme m’avait raconté sa vie, et je savais que je voulais vivre là-bas. En fait, on n’achète pas une maison, mais une vie. J’avais le sentiment que nous étions les bonnes personnes pour écrire le chapitre suivant. Je voulais poursuivre cette histoire, au lieu de la gommer. »
Bain de nature
Ce récit particulier mérite d’être relaté. L’architecte, méconnu, Jean-Pierre De Fauw, a construit ce pavillon est-flandrien en 1969 pour les Schelstraete, un couple visionnaire qui travaillait dans le domaine de la radiothérapie, notamment en contribuant à la fondation du département de médecine nucléaire de l’hôpital universitaire de Gand. « Lorsque la dame de ce couple a été gravement brûlée dans un accident dû à une friteuse, son mari lui a construit une piscine intérieure en vue de sa rééducation. Bien entendu, pour nos quatre enfants, c’est un bonheur, s’exclame Eef.
Ces gens étaient de rigoureux scientifiques mais, bizarrement, ils étaient également fascinés par la mythologie norvégienne, comme en témoigne une oeuvre en caractères d’écriture runique, accrochée à la porte d’entrée. Dans le jardin situé devant la maison, ils ont planté un yggdrasil, un arbre-monde mythique qui relie le royaume des morts et la dimension cosmique.
Pour eux, la branche qui est encore aujourd’hui suspendue dans notre hall d’entrée avait une signification spirituelle. Ce qui est incroyable, c’est que peu de temps avant de découvrir cette maison, j’avais lu L’Arbre-Monde de Richard Powers: un magnifique livre à propos de neuf personnes qui ont perçu la force particulière des arbres. C’est pourquoi j’ai ressenti une connexion avec les propriétaires précédents, alors qu’ils travaillaient dans des domaines complètement différents des nôtres. »
A la demande du couple de scientifiques, l’architecture en béton et en briques s’est alignée sur la nature. Cette habitation a vraiment été conçue en vue d’une cohabitation avec les bois. En effet, la maison est presque ensevelie par les arbres qui l’entourent. Le chemin qui mène à la porte d’entrée a des allures de sentier de promenade. Et avec la patine, les briques façonnées à la main commencent à ressembler à de l’écorce.
Dans la villa, la présence de cette forêt est aussi très palpable. Les hautes fenêtres de la pièce de vie encadrent les troncs de sapins, ce qui donne la sensation que le plafond flotte. « Bien que nous habitions près de la sortie d’autoroute, on a l’impression d’être éloignés de tout, ajoute Koen. Les gens entrent par la porte arrière. Comme à la campagne. »
Un petit cadeau de Banksy
Depuis qu’Eef et Koen, photographe musical couronné de succès, se sont installés ici il y a deux étés, presque rien n’a changé. « En fait, nous n’avons rien rénové. La disposition est restée identique, même la moquette est d’origine. Nous avons racheté le buffet à l’ancien propriétaire. Et nous avons aussi repris son chat noir, Mira. Il faisait partie du lieu, ajoute Koen. D’une certaine manière, notre collection de meubles vintage a trouvé une place idéale ici. Mais j’ai également confectionné plusieurs armoires, dans le style de cet endroit. »
En fait, nous n’avons rien rénové. Même la moquette est d’origine.
Le résultat est une maison à la croisée entre une machine à remonter le temps et un décor de film à la Mad Men, mais avec de nombreuses touches contemporaines, surtout en matière d’art et de photographie. « Plusieurs photos de concerts grandeur nature que Koen a prises de The National et de Florence and The Machine sont accrochées aux murs. Nous essayons aussi d’acheter des oeuvres d’artistes dans lesquels nous croyons, comme Mous Lamrabat, David Bray, Verne, Sarah Eechaut, Lieven Segers, Thomas Sweertvaegher et Patricia Ghijsens-Ezcurdia, énumère Eef. Mais « l’oeuvre d’art » la plus particulière de notre collection est signée Banksy. Nous sommes tombés sur lui à New York lors de notre nuit de noces. Nous étions en train de nous balader lorsque, tout à coup, le gigantesque camion de Banksy a surgi. Telle la Faucheuse, il contournait un terrain de basket-ball éclairé par des lampes de discothèque. Nous n’avons pas pu voir son visage, mais nous avons reçu une affiche, que nous avons gardée en souvenir. »
Finalement, pas de chalet avec étang, mais Eef ne s’en plaint pas: cette maison est avant tout un lieu propice à l’écriture. La manière dont la lumière change, dont les arbres dégagent sérénité, sécurité et force: tout cela a de l’effet sur ses livres pour enfants. « Alors qu’avant, j’avais tendance à écrire à propos d’animaux des villes, je recours maintenant facilement à des animaux des bois. Cela influence inconsciemment mon imagination, dit-elle. Et cet espace n’inspire pas que nous. Des shootings publicitaires et des clips vidéo y sont tournés. Koen et moi l’avons déjà constaté: c’est une maison qui invite à la créativité. »
En bref: Eef Rombaut et Koen Keppens p>
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Eef Rombaut (45 ans) est didacticienne à l’UGent et assistante d’enseignement à l’UAntwerpen. Elle a écrit des livres pour enfants qui ont été primés et traduits dans plusieurs langues, ainsi qu’un ouvrage sur les nouveaux objectifs didactiques. p>
Koen Keppens (53 ans) est photographe spécialisé dans la mode, les concerts et les portraits. Depuis 2010, il est le photographe attitré de Rock Werchter. En 2010, il a concentré ses photos de concerts dans un livre, Music for the Deaf. La publication d’un deuxième tome est attendue pour fin 2020. p>
Ensemble, ils sont les (beaux-)parents d’Emma, Marcel, Ella et Olivia. p>
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