Treize mois à supporter un chantier depuis une roulotte installée à côté de sa maison en construction… On a connu plus idyllique. Pas de quoi empêcher cependant la propriétaire, architecte d’intérieur, d’en faire un cocon de rêve.
Sur le chantier, les ouvriers s’affairent encore, les matériaux de construction forment une pagaille maîtrisée. Mais cet été, ce sera enfin le moment tant attendu. Après plus de quinze mois, Kim Verbist et sa compagne Sofie pourront emménager dans leur nouvelle maison, nichée au cœur des polders verdoyants de Zélande. Il y a sept ans, elles ont acheté un terrain avec une vieille maison et une grange délabrée. A l’origine, leur plan était simple: habiter la demeure existante et transformer la grange en logements de vacances. «Puis le Covid est arrivé. On a passé trois mois ici, isolées, dans un silence total. C’est là qu’on s’est dit qu’on ne voudrait pas de l’agitation d’un parking et des touristes dans notre jardin», raconte Kim. A cela s’ajoutait que la grange était difficilement restaurable. La solution: diviser le terrain et transformer l’ancienne grange en leur maison de rêve. «On pensait vivre dans la bâtisse pendant les travaux. On l’avait entièrement rénovée, avec l’idée de la vendre une fois le projet terminé. Mais une amie nous a fait une offre, et on n’a pas voulu laisser passer cette opportunité. Combien de fois a-t-on la chance d’avoir ses amis comme voisins?»
Un coup de peinture et la caravane se modernise
Revivre à temps plein à Bruxelles et suivre le chantier de loin? Très peu pour Kim. Elle avait découvert la région en logeant dans un camping, où elle passait l’été dans un Airstream argenté de 1953. Elle avait également déjà transformé un van pour partir chaque année à Essaouira, au Maroc. Alors pourquoi ne pas tenter la vie en caravane cette fois? «J’adore ces petits espaces où chaque détail compte, où il faut ruser pour tout faire tenir.» Kim écume les sites de seconde main et finit par tomber sur une caravane de 1972.
De forme rectangulaire, avec une carrosserie nervurée blanc et beige, elle offre 24 m² habitables. Les essieux sont encore en bon état, tout comme la structure. «J’avais deux critères: il fallait qu’elle soit étanche, et je voulais absolument les petites fenêtres arrondies typiques. J’adore leurs profilés fins. Si on les remplace, on se retrouve avec des cadres à double vitrage de 6 ou 8 cm d’épaisseur. Ça change complètement la vue.» Des modèles pareils, confie Kim, finissent généralement à la casse plutôt que sur le marché. Une vraie aubaine, donc. «Quelques jours plus tard, un homme en sabots est venu la livrer en pick-up… depuis la Frise!»
J’adore ces petits espaces où chaque détail compte, où il faut ruser pour tout faire tenir.
Adieu les banquettes brun foncé, l’intérieur en plastique et le faux feu en forme de rocher. La carrosserie est repeinte en noir mat. Comme une maison des années 1970, la caravane est entièrement mise à nu, isolée, et équipée de nouvelles installations techniques. Une pompe à chaleur assure le chauffage et la climatisation; un système de ventilation typique des camping-cars américains est installé pour la cuisine et la chambre. L’eau et l’électricité sont raccordées à la maison principale.
Espaces réduits mais ultra cosy
«Ensuite, je me suis vraiment concentrée sur l’aspect chaleureux», explique Kim. La structure intérieure, réalisée en multiplex aux tons chauds, regorge de niches pratiques. Elles évitent de perdre les petits objets et permettent d’exposer livres et souvenirs du Maroc. Le poêle anglais miniature, au départ décoratif, s’est avéré bien utile durant les longs mois froids, humides et gris de 2024. La cuisine entièrement équipée, séparée du coin repas par une cloison ouverte, s’est elle aussi révélée ultrafonctionnelle. «Je suis certaine que celle de la nouvelle maison ne sera pas aussi pratique», rit-elle. Un simple demi-tour suffit pour entrer dans la salle de bains, laquée d’un rose éclatant. «Au début, on pensait mettre un rideau de douche, mais c’est franchement désagréable quand on manque d’espace. Maintenant, on pousse la petite table contre la porte, et le tour est joué.»
Les angles arrondis des portes et des encadrements renforcent l’effet «cabine de bateau» dans la chambre. Du lit, Kim et sa compagne profitent d’une vue imprenable sur un océan de champs et de polders.
L’ensemble de la rénovation a duré six semaines et coûté environ 40.000 euros. «Plus petit ne veut donc clairement pas dire moins cher», conclut l’habitante. Quand la maison de ses rêves sera enfin prête, il faudra aussi dire adieu à la caravane qui ne pourra pas rester dans le jardin. «Je me surprends, ces derniers temps, à me dire chaque soir: «Il faut vraiment que je profite encore de tout ça.» La lumière qui entre de trois côtés, la simplicité, la chaleur… Oui, cette vie me manquera. Même si j’ai hâte de retrouver nos amis autour d’une grande table. Et de redécouvrir tous les objets et meubles que nous avons stockés.»
Une deuxième vie pour cette tiny house?
La conclusion de toute cette aventure? «Je n’ai pas besoin de beaucoup d’espace ni de beaucoup d’affaires pour être heureuse, confie Kim. C’est l’environnement qui compte. Treize mois dans un camping m’auraient rendue folle. Ici, dans le jardin, c’était un vrai cadeau.» Que va devenir sa précieuse caravane? Faut-il qu’elle trouve un autre propriétaire en pleine rénovation? «On pourrait l’emmener vers le sud, pour y passer les hivers. La boule d’attelage est toujours là. On peut aller partout.»
EN BREF
Kim Verbist (57 ans)
Elle est née à Anvers et a étudié l’architecture d’intérieur à La Cambre, à Bruxelles.
Elle a débuté sa carrière chez Saint-Gobain, fabricant français de verre
puis a travaillé de nombreuses années comme architecte d’intérieur et consultante dans l’hôtellerie, notamment pour Marriott et Wyndham Hotels, dans des pays comme la Moldavie et le Kazakhstan.
Elle aménage aussi bien des hôtels que des bureaux ou des maisons.
Mr.Frank