Visite d’un chalet de bois et d’amour, au cœur des Alpes suisses
Envisager une maison sur une plage normande et se retrouver dans un chalet au cœur des Alpes suisses… Un projet de parc éolien offshore a forcé Emmanuel de Bayser à troquer son envie d’air marin contre l’odeur des forêts et la sérénité au milieu des montagnes.
Emmanuel de Bayser et Josef Voelk n’avaient au départ pas l’intention d’acheter un appartement dans la région de Gstaad, et encore moins dans les montagnes. Ils voulaient simplement un endroit où ils pourraient retrouver un contact avec la nature après quinze ans de navette entre Paris et Berlin.
Ils étaient sur le point d’acheter une maison dans le village normand de Varengeville, avec une vue spectaculaire sur la mer. Mais une semaine avant de signer le contrat, Emmanuel de Bayser est tombé sur un article du Figaro dans lequel des pêcheurs locaux exprimaient leur mécontentement face à l’installation d’un parc éolien offshore. «J’ai découvert que le projet était d’installer 60 turbines juste devant la maison», se souvient-il.
Leur rêve de plages préservées volait en éclats. Ils ont alors changé complètement de cap et se sont tournés vers les Alpes suisses. Etonnamment, c’est Josef qui a insisté pour aller à Gstaad, malgré la mésaventure qui lui était arrivée autrefois. «Dans les années 70, il avait été invité à y loger chez Elizabeth Taylor et Richard Burton. En arrivant, il a glissé sur une plaque de verglas, s’est cassé le bras et s’est retrouvé immobilisé dans un lit pendant les dix jours au lieu de séjourner chez les deux stars de cinéma», raconte
Emmanuel. Il faut savoir que Josef a commencé sa carrière dans le septième art en tant qu’assistant de Luchino Visconti, avant d’entrer dans le monde de la mode. En 2006, ils ont ouvert ensemble le premier de leurs deux concept stores berlinois, The Corner et The Square, ce dernier ayant été rénové récemment. On y trouve des vêtements de marques comme Céline, Off-White et Balenciaga, mais aussi des meubles et du design.
D’amour et de bois
Pour cet appartement en altitude, le couple avait deux souhaits: habiter sous les toits et avoir une vue. «J’aime les toits pentus, explique Emmanuel. Ils ont quelque chose de cosy.» L’appartement de 180 m2 qu’ils ont déniché correspondait parfaitement au premier critère. Mais pour la vue, il a fallu faire confiance au vendeur – «Nous avons visité l’appartement pendant une tempête de neige et on ne pouvait littéralement rien voir de ce qu’il y avait aux alentours.»
Une fois le bien acquis, le tandem a choisi de rénover l’espace existant. Un plafond surbaissé cachait en effet complètement la structure ; il y avait quatre chambres et toute une série de parois de séparation. Au lieu de cela, un seul espace de vie ouvert a été créé, avec deux chambres relativement compactes et une cuisine. Les nouveaux propriétaires ont aussi veillé à ce que tous les murs ne soient pas couverts de bois. «Parce que si on ne mise que là-dessus, l’ensemble peut finalement devenir un peu oppressant, souligne Emmanuel. L’alternance avec du plâtre blanc allège le tout et donne plus de verticalité à l’espace.»
Au niveau du style, c’est surtout ce dernier qui a un goût très tranché et est attiré depuis longtemps par le travail des maîtres français de la moitié du siècle dernier – Charlotte Perriand, Pierre Jeanneret et Jean Prouvé – en raison de leurs «qualités architecturales minimalistes». Mais, malgré que leurs appartements à Paris et Berlin soient remplis d’objets, il refuse qu’on le qualifie de collectionneur. «Je déteste ce mot, dit-il. J’aime simplement les objets et la manière dont ils fonctionnent ensemble.» A Gstaad, il a élargi son style en englobant le design scandinave du XXe siècle, avec des fauteuils moelleux de Flemming Lassen et Viggo Boesen, des lampes de Paavo Tynell et plusieurs pièces d’Axel Einar Hjorth. «Je les trouve à la fois rustiques et élégantes et elles fonctionnent bien dans un contexte de montagne, relève-t-il. Elles ont en plus été conçues à l’origine pour des endroits où il neige souvent.»
L’embarras du choix
Disposer tous ces trésors dans l’immense salon s’est cependant avéré un fameux défi. «Nous avions au moins 150 idées différentes», se rappelle l’habitant comme si c’était hier. Pour tester tous ces scénarios, le duo a réalisé une maquette miniature de l’espace et a bricolé les meubles en carton et polystyrène. Mais même cette approche avait ses limites. Le projet de placer dans l’entrée du logement une console scandinave de la fin du XIXe siècle a échoué. Une fois installé, le meuble semblait trop petit et disparaissait dans l’espace. Il a été remplacé par une table robuste de Rick Owens, un créateur qu’Emmanuel apprécie tout particulièrement. «Son travail s’inspire souvent de l’antiquité et a quelque chose de brutal et d’intemporel», estime-t-il. Les pieds rouges d’une chaise Prouvé Standard, des œuvres de Louise Bourgeois et Imi Knoebel, ainsi que des céramiques d’après-guerre d’André Borderie et Georges Jouve, dont plusieurs ont été acquises via Instagram, apportent une touche de couleur à l’ensemble.
Finalement, le couple a eu encore plus l’occasion de profiter de la nature que ce qu’il avait initialement espéré. Il venait de déménager lorsque la première vague de Covid-19 a déferlé sur l’Europe. Emmanuel et Josef ont passé plus d’un an avec leur shiba Aki. «Il ne pouvait pas y avoir de meilleur timing», juge notre interlocuteur. Aujourd’hui je considère les montagnes non seulement comme quelque chose de magique, mais j’ai aussi le sentiment qu’elles me protègent.»
En bref Emmanuel de Bayser
Le Parisien est amateur d’art et de design, principalement des arts décoratifs des années 50 et 60 et du travail de maîtres français comme Jean Prouvé et Charlotte Perriand. Il fait la navette depuis quinze ans entre la Ville lumière et Berlin, où il gère les deux concept stores les plus prisés de la ville, The Corner et The Square.
thecornerberlin.de et Instagram: thesquareberlinofficial
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