La Pausa: le livre somptueux qui révèle la villa méditerranéenne de Gabrielle Chanel

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Lady Dunn et Gabrielle (Coco) Chanel, dans le jardin de la Pausa avec son chien Gigot. © John McMullin/Condé Nast via Getty Images
Kathleen Wuyard

La lecture n’est pas un passe-temps, c’est une promesse, celle de voyager dans le temps et l’espace au gré des ouvrages. Ivre de livres, Kathleen Wuyard vous emmène page à page dans ses périples papivores.

J’ai beau avoir pleinement conscience de tous les avantages qu’offrent les liseuses électroniques, je reste éperdument amoureuse du papier, de la sensualité qu’il y a à tourner les pages, sentir cette odeur immédiatement reconnaissable, prendre pleine mesure du poids de l’ouvrage.

Ce n’est jamais plus vrai que pour les beaux livres, cette catégorie littéraire si bien nommée, qui s’est récemment agrandie d’une nouvelle proposition aussi belle qu’élégante. La Pausa, l’ouvrage consacré par Flammarion à la villa méditerranéenne idéale de Gabrielle Chanel, est le genre de volume dont raffolent architectes d’intérieur et autres décorateurs. La moindre surface où il est nonchalamment posé jouit en effet instantanément d’un incroyable cachet, sa couverture en tissu voguant entre le saphir et le marine contribuant en outre à amener une touche de vitalité bienvenue.

«Les maisons sont comme le reste, il faut leur faire l’âme habitable», disait Mademoiselle Chanel.

Mieux: ses centaines de pages dont le papier est aussi luxueux que de la pulpe de bois peut l’être renferment anecdotes, secrets et autres tranches d’histoire qui menaçaient de tomber dans l’oubli.
Qui se souvient aujourd’hui qu’entre les cases «village de pêcheurs» et «lieu de villégiature favori des (ultra) riches», Saint-Tropez et la Côte d’Azur se sont développés grâce au tourisme sanitaire, et à la conviction des médecins du XIXe siècle que le seul remède envisagé contre la tuberculose, alors incurable, était le soleil?

Dès les années 1920, pourtant, le mythe de la Riviera est en marche, et dans la foulée de Marie-Laure et Charles de Noailles ou du couple Bussy, propriétaires de la villa La Souco où se pressent André Gide et Rudyard Kipling, Gabrielle Chanel décide elle aussi de planter des racines dans cette terre où les stars poussent plus vite que les oliviers.

«Les maisons sont comme le reste, il faut leur faire l’âme habitable. Et puis il faut qu’une maison soit naturelle, qu’elle vous ressemble un peu», estimait-elle. Près d’un siècle après sa construction, sa villa lumineuse de Roquebrune-Cap-Martin reste habitée de l’âme de celle qui n’en finit pas de fasciner, et dont l’esthétique est devenue synonyme d’une élégance intemporelle.

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Rénové en 2015 par la Maison Chanel, le lieu est aujourd’hui hybride, entre maison privée et espace de création, que l’architecte Peter Marino a eu pour mission de rendre à sa splendeur d’antan – mais certainement pas passée. C’est là tout le génie de son illustre commanditaire, qui affirmait qu’on «ne peut jamais être trop moderne», qui avait concrétisé avec cent ans d’avance l’austérité raffinée qui est le comble du luxe moderne.

De la lavande embaume votre jardin? C’est Gabrielle Chanel qui, la première, a eu l’idée de planter ce qui n’était jusque-là vu que comme une banale plante sauvage. Une ambiance monacale se dégage de votre intérieur monochrome à l’esthétique volontairement sévère? Bien avant que notre compatriote Vervoordt n’épure la demeure de Kim Kardashian, Coco avait déjà fait le choix de s’affranchir des fioritures à La Pausa.

C’est d’ailleurs à un autre esthète du royaume que la villa doit en partie son agencement, l’architecte Robert Streitz s’étant inspiré des préceptes de Victor Horta pour fluidifier le flux des interactions entre la maîtresse de maison, ses invités et le personnel chargé de les contenter.

Vertige du papier, ivresse d’images et de texte, on tourne les pages de ce bel objet littéraire comme on partirait en voyage, vers la Méditerranée mais aussi et surtout dans le temps. Un périple dont on revient ravi, déterminé à s’inspirer de Mademoiselle Chanel et à planter fissa un poivrier de Sichuan pour parfumer le quotidien d’autres horizons.

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© Flammarion


La Pausa, la villa méditerranéenne idéale de Gabrielle Chanel. Ouvrage collectif, Flammarion.

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