Sacha Walckhoff, fournisseur de joie
Il y a quelques années, le directeur artistique de la maison Christian Lacroix faisait le grand écart créatif pour devenir un designer talentueux et prolifique. En janvier, au salon off de la Brafa à Bruxelles, il présentera Equus, des pièces de collection en porcelaine précieuse.
Passer de la mode au design n’est pas une mince affaire. La temporalité des deux mondes diffère complètement et l’approche créative, tout autant. Si l’esthétique du premier domaine est, par définition, liée à un corps humain, celle du second peut également s’envisager à des échelles bien plus imposantes. Malgré ces difficultés, Sacha Walckhoff a réalisé cette transition risquée avec brio, et même une certaine aisance.
Dans les années 80, ce dernier démarre sa carrière en travaillant pour différentes maisons françaises « toutes disparues ou presque »: Jean Rémy Daumas, Dorothée Bis et Michel Klein. Plus tard, en 1992 exactement, il rencontre le grand couturier Christian Lacroix, lors d’un entretien professionnel. Durant une heure, les deux hommes échangent sans jamais parler du boulot. Ils s’entendent et se comprennent à merveille. Si bien que le reste semble secondaire. C’est ainsi que Sacha commence à travailler pour la marque. D’abord en tant que styliste. Puis, tour à tour, comme directeur du studio prêt-à-porter, consultant, bras droit et, depuis janvier 2010, directeur de la création, suite au départ volontaire du fondateur. « En fait, j’ai passé plus de temps chez Lacroix que Christian lui-même. » Aujourd’hui, il perpétue l’esprit du label essentiellement au travers d’un département lifestyle très prolifique qu’il a lui-même initié. Désormais plus designer que styliste, il est enchanté d’avoir effectué ce changement, parce qu’il retrouve, avec joie, le temps dont il a besoin pour concevoir. Cela tombe plutôt bien pour celui qui se décrit, entre deux éclats de rire, comme « très lent, très suisse ». Si son sang ne l’est pas – de fait, ses origines sont russes et ouest-africaines du côté de son père; françaises pour la branche maternelle de son arbre généalogique – son éducation et sa mentalité, inévitablement, le sont. Après sa naissance dans l’Hexagone et une première année de vie hispanique, il habitera le pays helvète jusqu’à ses 19 ans. De ce joli parcours, de cette belle mixité, il garde la douce et agréable sensation de se sentir bien n’importe où, d’être chez lui en tout lieu. « Je suis de partout parce que je ne suis de nulle part », résume-t-il, poétiquement.
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En parallèle, le Français a également développé son propre vocabulaire en signant de son nom de nombreux projets collaboratifs (de précieux objets décoratifs, du mobilier, des verres, des vases, des totems monumentaux…) dont Equus – une collection de pièces uniques et numérotées en porcelaine, réalisées avec le soutien de la manufacture portugaise Vista Alegre et représentée par la galerie Maison Parisienne – qu’il introduira au monde, pour la première fois, lors du salon off de la Brafa, la foire d’art qui se tiendra à Bruxelles en janvier prochain. Touche-à-tout, le créatif aime, tout simplement, matérialiser une idée. De préférence une qui a germé dans plusieurs têtes. « J’apprécie oeuvrer en équipe et pousser les autres à confectionner des artefacts qu’ils pensaient impossibles. A priori, j’amène toujours des demandes irréalisables. Mais, à force de persuasion et d’essais, nous y arrivons. Je me prête volontiers au jeu du ping-pong et des allers-retours entre moi et le partenaire lorsqu’un détail n’est pas possible ou ne correspond pas à l’imaginaire de celui-ci. Je suis quelqu’un de très malléable mais je sais exactement où je veux aller. » Mais, tout compte fait, ce qu’il adore par-dessus tout, c’est quand le public s’approprie ses réalisations, qu’elles trouvent leur place dans un intérieur qui ne lui parle pas ou, mieux encore, quand elles sont détournées de leur usage premier. « Cela rend très humble. Finalement, je ne me vois pas comme un artiste mais plutôt comme un fournisseur au service des gens. Celui qui apporte de la joie. »
1962 Naissance en France.
1992 Il commence à travailler pour la maison Christian Lacroix en tant que styliste.
2010 Il devient directeur artistique de cette maison.
Du 22 au 26 janvier 2020 Il présente Equus au salon off de la Brafa qui se tient à Bruxelles.
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