H&M s’installe sur les Champs Elysées

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En s’installant sur la célèbre avenue dans un immeuble aménagé par Jean Nouvel, la marque suédoise réaffirme son sens acéré des bons coups.

Le low cost, c’est chic! Chaque saison, H&M nous susurre sa petite musique iconoclaste, dynamitant sans complexes les codes du luxe et du cheap pour mieux attirer les foules. Ses arguments pour l’hiver? D’abord, une nouvelle boutique XXL sur les Champs-Elysées, 2 800 mètres carrés sur trois étages ouverts après une bataille homérique avec la ville de Paris, celle-ci cherchant à enrayer la banalisation et surtout la « textilisation » de la plus belle avenue du monde. En vain. Car les Suédois, piqués au vif, ont su dégainer un argument massue en la personne de Jean Nouvel, architecte-star chargé de concevoir l’aménagement intérieur de cette bâtisse industrielle de 1970 (lire ci-dessous).

Pour faire chauffer le « buzzomètre » d’encore quelques degrés, H&M a mijoté, pour le lancement de ce nouveau magasin, une pub sexy à souhait, mettant en scène deux jeunes pousses du cinéma en pleine ascension, Elisa Sednaoui et Raphaël Personnaz. Un sens du marketing bien balancé.

Jean Nouvel chez H & M, avouez que l’affiche est aussi improbable et excitante que Karl Lagerfeld en 2004, quand le Kaiser avait imaginé une ligne cousue de paillettes pour le géant de la mode à petits prix. Plus fort encore, alors que les collections H&M semblaient ces derniers temps en sérieuse perte de vitesse d’un point de vue créatif, voilà que la marque invite Alber Elbaz, directeur artistique de Lanvin, à livrer à son tour une minicollection dès novembre prochain. Ou comment faire revenir en courant les plus snobs des folles de mode.

Quel chemin depuis l’arrivée de la chaîne dans la capitale, rue de Rivoli, en 1998! La griffe, née en 1947 et implantée dans le monde entier, de Séoul à Tel-Aviv, réalise aujourd’hui 7 % de ses ventes mondiales en France, son deuxième marché. Mais le centre névralgique de la création reste basé en Suède, à Stockholm, où 120 stylistes de toutes nationalités dessinent sous l’autorité d’Ann-Sofie Johansson, pétulante directrice du design.

« Notre inspiration vient de la rue, des expos du monde entier, des blogs de photos, des célébrités et bien sûr des podiums », reconnaît-elle sans hypocrisie. La force du studio tient surtout dans sa réactivité : « En deux semaines, nous pouvons rattraper une tendance que nous avions sous-estimée. » Un flux tendu qui alimente quasi quotidiennement les magasins.

Dernière tendance en date qui n’a pas échappé à H&M: l’écologie. Si la maison, très politiquement correcte, n’a jamais produit de fourrure, elle augmente chaque saison sa proportion de coton bio (6 % aujourd’hui). Au passage, on adorerait que H&M change le nom de sa ligne bio, baptisée cette année d’un très cucul « Jardin romantique », mais surtout qu’elle convertisse toute sa gamme au vert. Réponse de Caterina Midby, responsable du développement durable : « D’ici à 2020, 100 % de nos textiles seront bio ou recyclés. » Rendez-vous est pris.

Katell Pouliquen

88-90, avenue des Champs-Elysées, Paris (VIIIe). Ouvert depuis le 6 octobre.

3 questions à Jean Nouvel Quand vous bâtissez, vous êtes intéressé par le fait de proposer un mode de vie autant qu’une architecture. Quel est celui que vous avez imaginé pour ce magasin? H&M s’installe dans une bâtisse de 1970 en béton préfabriqué, autant dire pas du tout typique de la capitale. J’ai donc voulu remettre cet immeuble au coeur des Champs-Elysées et en faire une expérience parisienne. J’ai commencé par changer la matière, en introduisant de la pierre de Paris sur la façade et dans une succession de galeries voûtées au sol, sur les murs et les plafonds. Ça, c’est Paris!

Qu’en est-il de la scénographie intérieure? Si la réglementation est drastique pour la façade donnant sur l’avenue, nous avons une liberté inouïe à l’intérieur. J’ai imaginé des écrans plasma coulissants, de 3 mètres de longueur, sur lesquels seront projetées des vidéos – sur le dernier invité de la marque ou sur les produits par exemple. Ces écrans vont se promener le long des 60 mètres de la façade, et ils seront également mobiles verticalement. J’ai voulu un immense éventail des possibles : on pourra customiser un maximum de supports, chariots, étagères et éclairages. Tout est modulable et propice aux surprises. Je propose et, ensuite, c’est un peu « A votre bon coeur, m’sieur dame ! »

Etes-vous client de H&M? Pas vraiment, je porte plus volontiers Yohji Yamamoto et Issey Miyake. Mais qui sait… Je leur dessinerai peut-être un pull-over, comme je l’avais fait pour le Jardin des modes en 1988!

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