Que mettre dans la boîte à tartine de nos enfants: les conseils d’une nutrithérapeute

Habitude très belge, la boîte à tartines le midi pour les enfants est un choix pour certains, une nécessité pour d’autres. Mais sa version « deux tranches de pain et quelque chose entre les deux » est-elle la meilleure chose que l’on puisse offrir à nos enfants, pour qu’ils grandissent bien et passent de bonnes après-midi? Non, selon Véronique De Clercq, nutrithérapeute de son état, qui propose un atelier aux parents en manque de repères et d’idées pour composer des repas pour leurs bambins. Elle nous donne ses conseils et trucs pour que votre boîte à tartines soit un succès, pour la forme et pour le goût.

Le repas de midi de nos enfants est souvent contenu dans ce que l’on appelle la fameuse « boîte à tartines ». Mais, par habitude, méconnaissance ou manque d’imagination, ce repas, pourtant crucial, ne contient souvent pas ce qu’il faudrait. Pour y remédier, Véronique De Clercq, nutritionniste et mère de famille, a décidé de faire profiter les parents de ses connaissances, son expérience et ses recettes au cours de séances baptisées « la santé dans la boîte à tartine ». Pour que cette boîte ne soit pas juste le contenant de « deux tranches de pain avec un truc au milieu », ce repas froid un peu négligé puisque de toute façon lui répondra le repas chaud du soir. Erreurs à ne pas commettre, trucs pour diversifier, composition idéale, etc, elle nous donne ses conseils pour que le midi devienne un sain festin.

(ndlr: Ces conseils n’ont pas volonté à culpabiliser les parents, au contraire. Ils proposent d’amener de la nouveauté et de la diversité dans ces repas et offrir une vision alternative au repas tartines « traditionnel ». )

Quelles sont les principales erreurs que commettent les parents quand ils composent la boîte à tartines de leur enfant ?

Idée de repas : Rouleaux de jambon cuit + Crackers aux graines + Bâtonnets de concombre et carottes
Idée de repas : Rouleaux de jambon cuit + Crackers aux graines + Bâtonnets de concombre et carottes© DR

Nombreux sont encore les parents à considérer la boîte à tartines comme une véritable boîte à tartines, devant donc se composer essentiellement de deux tartines de pain avec quelque chose, (jambon, fromage, salami) entre les deux. La tartine y est encore, à tort, l’élément central. Or, on sait aujourd’hui que les besoins des enfants nécessitent d’autres réponses. Il ne suffit pas non plus de faire un sandwich et d’ajouter dans la boîte 2 bâtonnets de carotte ou 3 tomates cerises.

Il ne suffit pas non plus de faire un sandwich et d’ajouter dans la boîte 2 bâtonnets de carotte ou 3 tomates cerises

Pour que le repas du midi soit plus juste, il faut diminuer la quantité de pain, et parallèlement augmenter la proportion de protéines et de légumes. En fait, les ingrédients peuvent être les mêmes (glucides, protéines, légumes), mais leurs proportions respectives évoluent, pour répondre aux besoins du métabolisme de l’enfant.

D’autre part, le dessert n’est pas un besoin nutritionnel et tient plus de l’habitude sociale. Le vrai besoin en sucre aura lieu vers 16h. Si toutefois le dessert est ancré dans les habitudes de votre enfant, l’idéal sera de lui donner un morceau de fruit (et non un fruit entier) ou un carré de chocolat au plus noir.

Comment faire de la boîte à tartine une boîte à festin sain
Comment faire de la boîte à tartine une boîte à festin sain© istock

Quelle serait alors la composition idéale de la boîte à tartine, les règles à suivre?

La boîte à tartine idéale devrait contenir, par ordre d’importance en terme de quantité : des légumes, des protéines, des glucides lents et de bonnes graisses. Rappelons que le pain blanc est un sucre rapide, alors que le pain complet est un sucre lent. Leurs propriétés nutritionnelles sont donc très différentes. Trop de sucre rapide conduit à un pic de glycémie. Il faut déplacer le coeur du repas. Ce n’est plus la tartine qui est centrale.

N’oublions pas que l’alimentation et la nutrition n’influent pas seulement sur la croissance. Elles jouent aussi un rôle sur l’humeur, l’immunité et sur le plus long terme, les maladies

On peut même aller plus loin et s’approcher d’un repas classique, mais froid. Ne pas oublier que l’association des aliments entre eux influe également sur la vitesse d’absorption. L’idée est d’éviter les pics de glycémie, à l’origine de coup de pompe ou selon les individus, de phases d’excitation empêchant la concentration. Car n’oublions pas que l’alimentation et la nutrition n’influent pas seulement sur la croissance. Elles jouent aussi un rôle sur l’humeur, l’immunité et sur le plus long terme, les maladies.

Ce repas-boîte à tartine doit contenir des légumes, en grande quantité, des protéines, et enfin des féculents (entre 2 et 4 cuillérées à soupe, selon l’âge). On est donc loin du pain surreprésenté. Deux facteurs conduisent à la sensation de satiété sur le long terme : une quantité de protéine juste et la présence suffisante de bonnes graisses, comme l’huile de colza et l’huile d’olive. Donc, il ne faut pas hésité à parfaire ce repas d’un filet d’huile, qui participera à son équilibre et à son efficacité. Les wraps ou les rouleaux de printemps sont de bons supports pour composer des menus équilibrés. Pensez aussi aux sardine, maquereau ou saumon, riches en oméga 3, au jambon sous forme de rouleau, aux crackers ou encore les petits bouquets de chou-fleur ou les bâtonnets de patates douces cuites à la vapeur.

Un autre bénéfice, plus pratique, est que, envisager comme ça, la pression sur le repas du soir est moins forte, dans la mesure où le contrat nutritionnel du repas de midi a été rempli. On aborde le souper avec plus de décontraction.

Tout cela est très convaincant, mais comment donner envie aux enfants de manger diversifié ?

Boulettes aux épices douces + Chou-fleur et noisettes + Patates douces
Boulettes aux épices douces + Chou-fleur et noisettes + Patates douces© DR

Deux clés permettent d’amener les enfants à manger de manière plus diversifiée. Même si certains enfants ne se lassent pas de manger tous les jours la même chose quand d’autres le supporteraient, d’un point de vue nutritionnel, il est important, voire indispensable, de varier les apports. Pour ce faire, du côté des parents, il est important d’intégrer la préparation des repas dans l’organisation domestique. Pratiquement, quand le parent prépare le repas du soir, il faut qu’il se projette dans la boîte à tartine du lendemain, et en profite pour cuire légumes, viande, etc qui la composeront ou qu’il augmente les quantité des ingrédients du soir pour avoir de la matière.

Insinuer ces nouveaux ingrédients, par petites quantités, tout en prévenant l’enfant. Mélanger de l’inconnu au déjà connu.

Côté enfants, il faut diversifier, mais de manière progressive. C’est-à-dire adaptée aux habitudes aux aliments que l’enfant apprécie déjà, des aliments nouveaux, face auquel l’enfant aurait tendance à se montrer récalcitrant. Insinuer ces nouveaux ingrédients, par petites quantités, tout en prévenant l’enfant. Mélanger de l’inconnu au déjà connu. Deux ou trois changements progressifs sur une ou deux semaines permettent de faire de véritables bonds. Par exemple, mélanger une cuillerée de quinoa à une portion de riz ne se fera pas sentir, mais sera mangée. Cela plusieurs fois. Puis deux, toujours sur plusieurs repas, puis au fur et à mesure, le quinoa prend de l’importance et entre dans le régime de l’enfant. Ceci fonctionne avec les légumes aussi. Profitez aussi du week-end pour tester de nouveaux aliments, combinaisons plutôt que d’y aller à l’aveugle. Et si les boîtes vous reviennent telles quelles, en tirer les enseignements. Il est important aussi de faire participer les enfants dans la composition de ses repas, en le faisant choisir entre les différentes options.

La boîte à tartine mise au goût du jour et mieux adaptées aux besoins nutritionnels de l’enfant, intéressons-nous à la boîte à goûter ? Que devrait-elle contenir.

La boîte à goûter doit être par essence sucrée. Plus par nécessité que par goût finalement. En effet, d’un point de vue chronobiologique, autour de 16h, se produit dans l’organisme un pic de sérotonine. Le besoin de sucré, une fois assouvi, permet ainsi d’apaiser les tensions de la journée qui s’achève. Pour bien faire donc, cette boîte doit contenir un fruit, des oléagineux type noix de cajou, amandes, et un morceau de chocolat le plus noir possible – plus il sera noir, plus il sera pauvre en sucre et riche en polyphénols, au pouvoir antioxydant . Ou d’un biscuit aux flocons d’avoine et chocolat.

Séance « La santé dans la boîte à tartine « , conseils, recettes. Durée 1 heure. Prix : 60 euros Toutes les infos sur www.foodupyourhealth.be

L’alimentation est un sujet très délicat, l’éducation de nos enfants aussi. La combinaison des deux est donc forcément sujet à polémique. A ces conseils de Véronique De Clerq, Magali Jacobs, psychologue et diététicienne, a opposé ses arguments dans un billet publier sur son blog. Pour pourquivre ce débat, d’où sortira forcément quelque bonne chose, voici la réponse de Véronique De Clerq:

 » Chère Madame,

Je me permets de répondre à votre réaction au sujet de la publication de l’article sur LeVif.be sur la boîte à tartines.

Afin d’expliquer les incompréhensions ou mauvaises interprétations faites des conseils repris dans l’article, permettez-moi de vous rassurer au sujet de la consommation de protéines par nos enfants.

Un excès de protéines (animales) est néfaste pour la santé et ne devrait pas être encouragé, je suis tout à fait d’accord avec vous sur ce sujet. Je n’encourage pas une alimentation hyper-protéinée comme vous semblez le croire (ni le régime paléo (?!) d’ailleurs). Il n’empêche que des tartines, miches, sandwich etc avec souvent à peine 1/2 voire 1/4 de tranche de jambon (pour reprendre l’exemple cité dans l’article, mais ça aurait pu être autre chose) ne constituent pas un repas équilibré.

Le message de l’article plaide en effet pour revoir les proportions du repas de midi de façon à ce qu’il soit équilibré. Des protéines, des glucides et des graisses, comme l’illustrent les 2 photos commentées.

En marge, reste le débat autour du poids idéal d’une tranche de jambon…

Au sujet du pain, une correction est cependant à apporter. L’ Index Glycémique du pain blanc (70 ou voire même 75 comme vous le mentionnez) illustre bien qu’il est à classer parmi les aliments à Index Glycémique élevé. L’IG d’un pain complet est plutôt de 65* pour des pains de chez nous, mais il y a plus intéressant que l’IG.

L’IG, vous dites, peut être modulé par ce qui accompagne le pain: oui! D’où, à nouveau, l’importance de bonnes proportions au repas: 10g ou 20g de jambon ne ralentiront pas beaucoup la vitesse du passage du glucose dans le sang d’une miche de pain blanc…

Un repas, par exemple composé de carottes et concombres, de jambon (ça aurait aussi pu être du poulet, du saumon,….), de crackers comme illustré dans l’article (ou de pain, je ne suis pas contre! mais quand même complet de préférence) veillera à un bon apport de nutriments et permettra d’éviter ce haut pic de glycémie.

Pain blanc, pain gris, quelle différence? il n’y a pas que la glycémie! Les apports en micro-nutriments: fibres, vitamines, minéraux sont différents. Les qualités nutritionnelles du pain complet sont sans conteste plus riches que celles du pain blanc, d’où ma recommandation.

N’oublions pas les autres messages de l’article: vive les légumes en plus grande quantité, vive la créativité, même dans la boîte à tartines (le pain n’est pas incontournable) et la variété (quinoa, riz, colza, sardines,… pour n’en citer que quelques uns mentionnés dans l’article).

Je ne peux en outre que regretter la polémique autour de « tranches de jambon » et de « pain gris ou blanc » alors que le message est clairement d’avoir un repas de midi équilibré, aux justes proportions et aux apports nutritionnels intéressants et variés.

Cordialement,

Véronique De Clercq  »

* http://www.diabete.fr/balance-glycemique/files/IG_FINAL.pdf« 

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