Décès de Franc’Pairon: hommage à la fondatrice de La Cambre Mode(s)

Franc'Pairon fondatrice de La Cambre Mode(s)
Franc'Pairon fondatrice de La Cambre Mode(s) © SDP
Anne-Françoise Moyson

Franc’Pairon, fondatrice de La Cambre Mode(s) et du Master Fashion and Accessory Design à l’IFM Paris, est décédée ce 12 février 2023. En grande dame, en insatiable curieuse, en magnifique accoucheuse de talents, en parfaite chevalier des arts et des lettres, elle a rejoint un « ailleurs ».  

Elle portait des grigris, des bracelets qui cliquetaient à ses poignets tout en rythmant joyeusement ses propos, des badges blancs ou à message, une bague qu’elle adorait et qui, pour les néophytes, aurait pu ressembler à un coup de poing américain, c’était un P en réalité, comme Pairon, et parfois aussi, autour du cou, une chaîne avec une loupe « pour continuer à voir le bonheur de près ».

Elle avait de l’énergie et de l’enthousiasme à revendre, des partis pris assumés, une franchise qui claquait au vent, elle disait « waouh c’est magnifique », mais pas systématiquement, pas à chaque fois, car elle n’était jamais dans le consensus ni la mièvrerie, « ah non, non, ça ce n’est pas possible ! » Avec Franc’Pairon, il y avait toujours quelque chose en mouvement, la légende veut qu’elle n’ait jamais appris à marcher, elle a d’abord couru. Toutes choses, qui en somme sont des valeurs, qui firent de son parcours professionnel un chemin de créativité.

Elle ne venait pas de la mode mais de l’architecture d’intérieur. « J’ai transposé des idées architecturales sur des idées de vêtements, disait-elle. Contrairement à l’architecture, avec la mode on peut tout faire avec ses mains, j’ai trouvé que c’était une liberté extraordinaire. » En 1986, elle crée l’atelier de stylisme au sein de l’ENSAV, à Bruxelles, qui sera baptisé plus tard très officiellement La Cambre Mode(s). Elle y invente une pédagogie singulière, alternative, qui a essaimé depuis. « Le medium, c’est la mode, la pierre angulaire, la création », disait-elle. En amont, elle avait demandé à un monstre sacré, le typographe Lucien De Roeck, l’inventeur du logo de l’Exposition universelle de 1958 : « Que pensez-vous que je devrais transmettre à mes étudiants ? ». Il lui avait répondu : « De l’énergie jusqu’à la fin de leurs jours. » Avec allure et avec la vitalité qui la caractérisait, Franc’Pairon s’est exécutée.

« Le medium, c’est la mode, la pierre angulaire, la création »

Durant treize ans, elle a innervé cet atelier en mettant la barre très haut – « la force de notre atelier, c’est qu’il exige de mettre les mains dans le cambouis, de maîtriser l’outil et de développer une écriture personnelle ». En 1999, elle en confiait les clefs à Tony Delcampe et s’en alla à Paris, fonder le Master Fashion and Accessory Design à l’Institut Français de la Mode, pour une même période fructueuse. « Mes années à La Cambre, c’était mettre les créatifs en écho avec eux-mêmes, à l’IFM, dynamiser l’industrie et créer des synergies avec les créateurs », analysait-elle.

Franc' Pairon
Franc’ Pairon fondatrice de La Cambre Modes et du Master Fashion and Accessory Design à l’IFM paris © SDP

Elle n’avait rien lâché, quand il fut question de retraite et encore moins de finitude, ces derniers mois… Jusqu’au bout, avec sa belle gestuelle, Franc’Pairon a gardé l’essence même de ce qui l’animait.

Un dernier hommage, rien de compassé surtout, lui sera rendu ce samedi 18 février à Bruxelles. S’y réchaufferont le cœur celles et ceux qui la rencontrèrent et dont elle changea la vie, ils savourent leur chance.

www.lacambremodes.be

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