Exclu: Charlie Winston, chapeau bas

Ça se passe au Grand Sablon, à Bruxelles, dans un salon bon chic bon teint de l’antiquaire Costermans revu et corrigé par le décorateur/styliste/cuisto/esthète Gérald Watelet. Papier peint exotique à la mode du XVIIIe, baignoire en marbre, mobilier rocaille, miroirs à dorures, quelque part entre Marie-Antoinette et Joséphine de Beauharnais. En milieu de journée, un voisin, un certain Pierre Marcolini, viendra confirmer la touche Coppola fille avec quelques chocolats et macarons carrément décadents. Pour coller à la dégaine bohème de l’auteur du carton « Like a Hobo », c’est plutôt du côté de Forêt-Saint-Gilles qu’il aurait fallu dénicher un lieu de shooting, idoine certes, mais trop frontal, ton sur ton. Le twist boudoir aristo versus vagabundo promettait une excentricité raccord avec les racines british de notre apprenti clochard céleste.

Et puis Boboland, il connaît, il en revient, là, il a passé le week-end chez des amis, non loin du Bar du Matin. S’est offert une petite escapade dans le Limbourg pour assister à une représentation de Rosas de Anne Teresa De Keersmaeker et débarque en ce lundi matin pavé de bruine, chaussures Fluevog ouvertes sur des socquettes roses, froc à fond descendu Vivienne Westwood et pull customisé de deux trous à travers lesquels passe une cravate forcément dénouée. Ben oui, Charlie est cool. Mais contrairement à ce que pourrait laisser supposer ce petit commentaire indigne de La Bruyère, ce jeune homme de 33 ans ne se la ramène pas. Mais alors là pas du tout. Charlie Winston est sincèrement cool. Ulysse a gardé les pieds sur terre, malgré les tournées à succès et le chant des sirènes, comme il l’évoque dans Wild Ones, la plus Red Hot des douze morceaux qui forment Running Still, nouvel opus hip-pop-folk slalomant entre énergies viriles et fragilités post-rupture de coeur.

À la faveur d’une étrange alchimie, ce garçon au sourire éternel – « c’est la plus petite distance entre deux personnes », a-t-il l’habitude de dire – dégage en effet une indéniable confiance en son pouvoir de séduction tempérée par une attitude naturellement amène qui le sauve de toute insupportable dérive maniériste. Un bon Chap d’Albion, dans le fond, sensible à la mode sans y succomber, « l’apparence est le premier message que tu donnes aux autres et je fais attention aux signaux que j’envoie. Mais je n’ai pas besoin de dépenser des fortunes pour ça, j’adore les vêtements de récup. » Après inspection, on peut aussi vous assurer que ce garçon a un gros faible pour les accessoires, rehausseurs de look par excellence : badges, chaînes, épingles à nourrice, gants, … Sa signature perso, imposée sur chaque photo. Pas étonnant qu’il aime reprendre le Foule Sentimentale d’Alain Souchon sur scène, hymne anti-grégaire des années Claudia Schiffer. Et qu’il ait décidé de freiner sur le port du chapeau : « Je devenais une parodie de moi-même, je m’enfermais dans un personnage. » Et lucide avec ça.

Baudouin Galler

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