Jeanne Damas
Jeanne Damas photographiée par Vincent Ferrané - DR

Rencontre avec Jeanne Damas, actrice et fondatrice de Rouje

Anne-Françoise Moyson

Elle a débuté à 14 ans avec un Tumblr comme un carnet de sa vie. Depuis, Jeanne Damas (32 ans) fait de la mode avec Rouje, sa marque parisienne, est ambassadrice de la Maison des femmes à Saint-Denis et incarne Paloma Picasso, l’inspiration de sa collection été, dans la série Becoming Karl Lagerfeld.

Icône de style, entrepreneuse à succès et désormais actrice aussi: tout réussirait donc à Jeanne Damas? Une chose est certaine, celle qui est suivie depuis 18 ans déjà par toujours plus de fans n’a pas pris la grosse tête pour autant, ainsi qu’elle l’a démontré lors de notre entretien-vérité. Rencontre avec une jeune femme bien dans son temps.

Son personnage

Paloma Picasso est inspirante. Je ne l’ai jamais rencontrée mais j’imagine qu’elle était timide quand elle avait la vingtaine et n’avait pas confiance en elle. Elle s’est alors créé un personnage. Elle aimait s’habiller décalé, en vintage, mélanger des imprimés, ne jamais sortir sans rouge à lèvres. Pour l’incarner dans Becoming Karl Lagerfeld, je me suis représenté une jeune fille née de parents peintres et pas n’importe lesquels, surtout son père. Elle aimait peindre et dessiner mais elle n’a pas continué, c’était trop impressionnant. Dans sa personnalité, ce qui est intéressant, c’est le paradoxe sur son acte de naissance, il est écrit «de père inconnu», même si elle a grandi avec Pablo Picasso. Son parcours montre qu’elle s’est battue pour être reconnue et se faire un prénom.

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Son credo

«Sois fière de toi.» C’est ce que je dirais si j’étais face à l’adolescente que j’étais à 16 ans. Parce qu’il est toujours question de confiance en soi et du syndrome de l’imposteur. Malgré tout ce que je fais et la réussite de ma marque, je me dis toujours que c’est juste de la chance.

Son rôle de mère

La maternité chamboule tout. Mon bébé est né en décembre 2020. J’ai eu un peu de mal à me sentir mère, à me sentir bien dans ce rôle. Mais j’ai la chance d’être deux. Avec mon mec, on part seuls quelques jours fin août, on l’appelle «la semaine pour sauver notre couple»!

Parce qu’à force de se lever à 5 heures du matin pour le bébé, on finit par avoir envie de s’entretuer. On le confie donc à ma mère et on s’offre une semaine pour se dire oui on s’aime, c’est devenu un rituel.

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Son parcours

L’errance m’a forgée. J’ai vécu une période floue à la fin du lycée, je ne savais pas trop quoi faire de ma vie. Je n’ai pas un parcours classique, j’ai beaucoup séché l’école, je n’ai pas fini le lycée. J’ai suivi des cours de théâtre le soir, je faisais du mannequinat, j’avais été repérée grâce à mon blog.

Mais j’étais en décalage avec mes amies qui étaient à la fac. Et comme j’étais souvent seule, j’allais beaucoup au cinéma, c’était mon refuge. Aujourd’hui je sais que j’étais inconsciemment en train de construire ce que j’allais faire plus tard.

Son succès

Une femme qui crée pour les femmes, cela plaît aux femmes. Ma marque me ressemble, elle est instinctive, très personnelle, je pense que c’est pour cette raison que les gens l’aiment. Mon challenge est de faire grandir Rouje, en gardant cette authenticité. D’ailleurs, cela ne marchera que si cela me ressemble. Dès le début, j’ai été entourée d’amies créatives, des photographes, mannequins, stylistes inspirantes. On a toujours mélangé vie privée et travail, il n’y a pas de frontière parce que c’est notre passion.

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Ses doutes

Je me pose parfois des questions existentielles. Est-ce que cela a un sens de faire de la mode? Je me suis rendu compte que j’avais une voix – une marque, c’est aussi avoir une voix, ce n’est pas seulement faire des vêtements, même si cela peut être noble. Il y a un panel de choses à faire autour – des rencontres, lever des fonds pour des associations comme La Maison des femmes à Saint-Denis ou mettre en lumière des artistes, des gens qui nous intéressent, comme l’ont fait Agnès B. ou Vivienne Westwood.

Son style

Il y a autant de façons d’être parisienne que de Parisiennes. La presse me voit comme «la Parisienne». Je trouve cela un peu cliché et en même temps, je sais que c’est cela qui a fait le succès de ma marque… Et ce n’est pas du marketing: je suis née à Paris, j’y ai grandi, je me suis inspirée de ce qui m’entourait et j’ai photographié ce que je voyais, rien n’était calculé.

Ses rêves

La photographie, c’est mon premier amour. On peut presque dire que j’ai grandi avec Harry Gruyaert, c’est le père de ma meilleure amie. On a grandi ensemble dans le quartier du restaurant de mes parents. Il nous prenait tout le temps en photo. Vers 13 ans, j’ai eu des Canon, des Olympus compact argentiques, je photographiais tout. Paris, mes amis, mes voyages, comme un journal de ma vie, mon regard sur le monde et les gens.

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C’est ainsi que j’ai commencé mon blog. J’ai découvert l’art par la photo. Mais je ne me vois pas comme une photographe, je n’ai pas la technique et peut-être la confiance. Dans une autre vie, j’aurais pu être photographe, pourquoi pas?

Becoming Karl Lagerfeld, série haute couture de Disney +, en streaming dès ce 7 juin. rouje.com

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