Notre-Dame, coeur de Paris et lieu symbolique fascinant

Touristes sur le toit de Notre Dame, en août 1968

Avec la fumée noire au-dessus des toits blessés de Notre-Dame, c’est le coeur de Paris qui s’est effondré lundi soir. La cathédrale célébrée par Victor Hugo, l’une des plus grandes d’Occident, est depuis son origine l’un des monuments les plus emblématiques de la ville et mondialement connu.

L’émotion qui s’est emparée des Parisiens, certains en larmes, massés sur les ponts qui enjambent la Seine, dit assez l’importance que revêt dans le coeur français – et bien au-delà de la chrétienté – la cathédrale millénaire, parmi les plus célèbres d’Occident, inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco et visitée chaque année par près de 14 millions de touristes et pélerins.

Le sentiment de perte est infini face aux flammes qui dévorent le bâtiment gothique aux impressionnantes gargouilles, dont la construction a commencé au Moyen-Age, à la fin du XIIè siècle – en l’état actuel des connaissances, la date retenue pour le début des travaux est 1163 – pour s’étaler durant deux siècles jusqu’en 1345.

Inscrite dans le ciel de Paris, gravée dans le coeur, les passions et la mémoire des Parisiens, Notre-Dame est intimement mêlée à leur histoire: c’est son gros bourdon qui, le 24 août 1944, leur annonce la Libération du joug nazi et qui, 26 ans plus tard, accueille les obsèques du patron de la Résistance, le général Charles de Gaulle.

Août 1944, arrivée de Charles de Gaulle sur le parvis de la cathédrale de Paris, symbole de la Libération
Août 1944, arrivée de Charles de Gaulle sur le parvis de la cathédrale de Paris, symbole de la Libération© Getty Images

Nerval et Gautier

« Notre-Dame est bien vieille : on la verra peut-être/ Enterrer cependant Paris qu’elle a vu naître » écrivait en 1832 Gérard de Nerval dans un poème intitulé « Notre-Dame de Paris ».

Un an auparavant Victor Hugo lui avait consacré un roman éponyme, dont la cathédrale constitue un personnage à part entière entre Quasimodo, le sonneur bossu, Esmeralda la tentatrice gitane et le prêtre Frollo. Alors qu’un projet de démolition menace l’édifice en raison de son état de délabrement, le roman résonne comme un appel salvateur pour sa restauration de la part du poète écrivain, conscience de la nation.

Chantre du romantisme compassé, le poète et romancier Théophile Gautier a opposé la singularité de la cathédrale aux « maisons sans pudeur de la ville païenne »: « Le peintre et le poète/ Trouvent là des couleurs pour charger leur palette/ Et des tableaux ardents à vous brûler les yeux » relevait-il avec emphase.

Au fil du temps, chacun a voulu apporter sa pierre à l’édifice monumental: une première flèche fut construite vers 1250, défaite cinq siècles plus tard.

Construction de la flèche par Viollet-Le-Duc
Construction de la flèche par Viollet-Le-Duc© Getty Images

Mais c’est à Eugène Viollet-le-Duc que l’on doit la flèche, controversée, qui s’est effondrée lundi dans un choeur de cris de Parisiens et touristes horrifiés: cet architecte du XIXè siècle a consacré sa vie à rénover les monuments médiévaux et signé là sa réalisation la plus contestée, imposant aux Parisiens en 1860 une flèche qui avait totalement disparu de leur mémoire.

Disney aussi

Après la littérature le cinéma s’est emparé à son tour de ce « monument » qui, plus que tout autre, mérite ce vocable : en 1956 le réalisateur français Jean Delannoy en fait le titre d’un long métrage avec Anthonuy Quinn dans le rôle de Quasimodo fasciné par les avantages de Gina Lollobrigida-Esmeralda.

Anthony Quinn dans le Notre Dame de Paris de Jean Delannoy
Anthony Quinn dans le Notre Dame de Paris de Jean Delannoy© Getty Images

Enfin, signe du rayonnement mondial de la cathédrale, même les studios de Walt Disney l’ont placée au coeur de leur dessin animé, le « Bossu de Notre-Dame » (1996), ou encore la comédie musicale éponyme écrite par le Canadien Luc Plamondon, véritable phénomène dans le monde francophone en 1998.

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« C’est la mémoire de Paris, c’est un navire de pierre qui a traversé l’histoire » s’est lamenté l’historien Fabrice d’Almeida sur la chaine France 2. « C’est l’âme de la nation française qui disparaît, l’âme même du coeur de Paris et de la France qui (sont) touchés aujourd’hui » a abondé Stéphane Bern, historien médiatique et fervent défenseur du patrimoine, alors que la silhouette dévorée par les flammes se détachait dans la nuit.

Notre-Dame de Paris, un édifice emblématique de la France

La cathédrale Notre-Dame de Paris, dévastée lundi par un incendie, est un édifice emblématique de la France et le monument historique le plus visité d’Europe.

Entre 12 et 14 millions de personnes, soit une moyenne de plus de 30.000 par jour, visitent chaque année ce chef-d’oeuvre de l’architecture gothique situé sur l’île de la Cité, au coeur du Paris médiéval.

La construction de cette église, entamée au milieu du XIIe siècle, s’est étalée sur environ 200 ans.

Au cours de la Révolution française, de nombreux actes de vandalisme visent la cathédrale, qui voit sa flèche démontée, son trésor pillé et les grandes statues du portail détruites.

Les révolutionnaires y ont même organisé un « Culte de la raison » le 10 novembre 1793, peu avant que le culte catholique ne soit interdit à Paris. La cathédrale se retrouve transformée en entrepôt.

Rendue au culte en 1802, elle sera le personnage central d’un roman de Victor Hugo publié en 1831. Peu après, Eugène Viollet-le-Duc sera notamment chargé de sa restauration. Il travaillera jusqu’à la fin de ses jours sur ce vaste chantier d’une vingtaine d’années.

Notre-Dame a été épargnée par les deux conflits mondiaux et ce sont ses cloches qui ont annoncé, le 25 août 1944, la libération de Paris.

Plus récemment, les neuf cloches géantes de la cathédrale ont été remplacées en 2013. Sa flèche, qui s’est effondrée ce lundi, était en cours de rénovation.

2.000 offices chaque année

En ses murs ont été célébrés la victoire de la Seconde Guerre mondiale, le début du procès de réhabilitation de Jeanne d’Arc, le mariage d’Henri de Navarre, futur Henri IV, avec Marguerite de Valois, le sacre de Napoléon Ier et, plus récemment, les cérémonies funèbres en l’honneur de chefs de l’Etat, comme Raymond Poincaré et le général de Gaulle, et de grands personnages, comme Paul Claudel ou l’Abbé Pierre.

La cathédrale qui est aussi un sanctuaire marial élevé au rang de basilique continue d’assurer ses fonctions d’édifice religieux: cinq offices y sont célébrés quotidiennement, et sept les dimanches. Avec les fêtes et célébrations exceptionnelles, ce sont plus de 2.000 offices qui résonnent chaque année sous ses voûtes.

Elle est aussi le point de départ kilométrique de toutes les routes nationales qui partent de Paris.

Ces derniers années, l’édifice a vécu au rythme des tragédies du pays, sonnant par exemple le glas au lendemain de l’assassinat des caricaturistes du journal satirique Charlie Hebdo en janvier 2015. Les plus hautes autorités civiles et religieuses s’y étaient aussi rassemblées en juillet 2016 pour une messe d’hommage au père Jacques Hamel, égorgé par deux jihadistes dans son église de Saint-Etienne-du-Rouvray, près de Rouen.

En septembre 2016, non loin de ce symbole de l’Europe « croisée » combattue par la propagande de l’organisation Etat islamique (EI), une voiture chargée de bonbonnes de gaz avait été découverte. Un commando de trois femmes de 19, 23 et 39 ans, téléguidé de Syrie par l’EI selon le procureur, avait été arrêté dans l’Essonne.

En juin 2017, un policier avait été attaqué au marteau sur le parvis de la cathédrale par un jihadiste disant agir « pour la Syrie ».

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