À Biarritz, lutte contre l’effet « seconde résidence » et la hausse des prix en vendant au moins offrant
Ils ne veulent pas participer à la « folie » immobilière. À Biarritz et dans le Pays Basque français, des propriétaires font le choix de vendre ou louer leur bien non au plus offrant, pour une seconde résidence, mais à ceux qui peinent à se loger ou s’installent durablement.
À Ahetze, village de 2.000 habitants sur la côte entre Biarritz et Saint-Jean-de-Luz, Amélie, 81 ans, termine tranquillement ses cartons. Après 22 ans dans sa maison, elle la cède à un bailleur social à un tarif bien inférieur à ce qu’elle aurait pu en tirer. Elle qui juge « insupportable » la situation des jeunes Basques face à la flambée des prix, a été échaudée par un prospectus d’agent immobilier lui proposant son aide pour « rentabiliser » au mieux son terrain.
« Je l’ai d’abord appelé pour lui dire ce que j’en pensais et puis j’ai réfléchi à ma succession, c’était hors de question que ma maison devienne une résidence secondaire », sourit l’octogénaire sans enfant.
Le maire de la commune la met alors en relation avec Habitat Sud Atlantic. « Amélie est un cas rare, pour ne pas dire unique ! », s’enthousiasme Lausséni Sangaré, directeur général du bailleur social. Ils ont recouru au viager libre, dispositif qui impliquait qu’Amélie quitte sa maison pour un appartement en location.
L’octogénaire tenait mordicus à la vocation sociale du projet. Sa maison abritera deux logements locatifs pour adultes porteurs de handicap, cinq logements familiaux en accession à la propriété, ainsi qu’un local médical pour quatre praticiens, d’ici fin 2025. « Notre souhait, c’est qu’il y ait des clones d’Amélie, ce type d’acte est possible et doit se multiplier », ajoute le dirigeant de HSA.
Des ventes préférentielles à la côte… et ailleurs,
Selon l’Insee, les résidences secondaires représentent aujourd’hui 21% du parc immobilier au Pays basque, et jusqu’à 50% dans certaines communes littorales. Depuis fin 2019, le prix du m² a augmenté de 35% sur le territoire selon la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim), atteignant 8.000 à 10.000 euros à Biarritz ou Saint-Jean-de-Luz.
Mais si beaucoup de propriétaires cèdent aux sirènes de la spéculation, d’autres optent pour des ventes préférentielles. Marion et son conjoint ont ainsi vendu leur appartement à Anglet, dans un quartier recherché en bord de mer, à un couple du même âge qui voulait en faire leur résidence principale, contrairement à la plupart des acheteurs potentiels.
« Quand on a mis l’annonce sur leboncoin, on a eu 50 demandes en une demi-heure, quasi toutes pour de la résidence secondaire, avec des gens qui précisaient qu’ils pouvaient payer cash ou plus cher que le prix fixé », raconte la trentenaire. Loin d’être appâtée par cette surenchère, elle a été « choquée ». « J’étais déjà gênée de le vendre à ce prix-là, ça ne m’est donc même pas venu à l’esprit d’accepter. »
Des lotissements protégés de la hausse des prix
Amaia Arizabaleta, auxiliaire de puériculture de 32 ans, s’estime chanceuse. Sa propriétaire « voulait vraiment quelqu’un qui vive à Ustaritz », village en périphérie de l’agglomération bayonnaise. « C’est ce qui m’a sauvée car j’avais l’un des pires dossiers sur le plan financier parmi les 80 candidatures reçues, m’a dit la propriétaire qui ne voulait pas louer à quelqu’un de passage », dit-elle.
Dans d’autres territoires, des collectivités passent à l’action, à l’instar de la commune de Plougasnou, dans le Finistère (nord-ouest), qui compte 3.200 habitants permanents, le triple en été, avec plus de 40% de résidences secondaires.
Après avoir réservé un premier lotissement aux résidences principales, dont la revente avant dix ans était soumise à pénalité, elle vient d’en créer un deuxième qui privilégie en outre les primo-accédants, afin d’attirer de jeunes couples. En contrepartie de ces contraintes, la commune fait un « effort sur le prix du terrain », explique la maire Nathalie Bernard (PS). « L’idée est d’attirer et fixer des résidents à l’année. On a des actifs mais ce sont malheureusement des petits salaires. Il faut avoir une offre de logement adaptée », justifie l’élue. Pour le locatif, la commune travaille avec des bailleurs sociaux « parce que malheureusement, le privé va souvent à ce qui rapporte le plus, le court séjour touristique ».
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