Féministe et engagée | Mariama Bah: « C’est important d’oser questionner notre rôle dans la société » (3/8)
Arrivée en Belgique en 2017 après la mort de son mari, Mariama a dû affronter nombre d’obstacles pour reconstruire une carrière semblable à celle qu’elle avait en Guinée. Et a choisi de la dédier à celles qui, comme elle, ont vécu l’excision, via le Groupe pour l’abolition des mutilations sexuelles.
« En tant que réfugiée, trouver du travail a été un défi, parce que mes diplômes n’étaient pas reconnus en Belgique et que je n’avais pas d’expérience professionnelle dans le pays. Un jour, on est allé jusqu’à me dire que ma voix n’était pas adaptée au profil des clients belges, et ça m’a donné envie de changer de voie et de faire partie des personnes qui mettent la multiculturalité de la Belgique à profit. C’est comme ça que je suis passée de l’administration des affaires au secteur socio-culturel, parce qu’il me semblait offrir un terreau fertile pour faire changer les mentalités. Le temps que je finisse ma formation, un poste s’est libéré au Gams et j’y ai postulé. »
L’engagement comme forme de guérison
C’est qu’en Guinée déjà, Mariama, qui a elle-même été excisée à l’âge de 6 ans, luttait contre les mutilations sexuelles. « C’est une pratique qui cause énormément de problèmes de santé, mais en même temps, c’est important de ne pas donner l’impression aux communautés concernées qu’on les rabaisse ou qu’on déshumanise leur culture. Je suis fière d’être Peule, mais ça ne m’empêche pas de questionner des pratiques qui nuisent à la santé », explique celle pour qui cet engagement est une forme de guérison.
Même si Mariama n’est pas immune au burn-out militant : « Ce n’est pas simple tous les jours, parce que ça fait écho à mon histoire et certains témoignages sont très difficiles à entendre, mais je ne lâche rien, parce que même si c’est trop tard pour moi, ce n’est pas trop tard pour les autres ».
« Même si c’est trop tard pour moi, ce n’est pas trop tard pour les autres. »
Mariama Bah
Et pour cette maman de cinq enfants, l’engagement est aussi l’affaire de toute une année. « C’est tous les jours qu’il faut mener le combat pour les droits des femmes, car il y a encore énormément de chemin à parcourir », martèle celle qui a d’abord enseigné à ses fils qu’il ne fallait pas pleurer, avant de réaliser son erreur. « En tant que femmes, on reproduit parfois inconsciemment le schéma d’oppression dans lequel on grandit, c’est important d’oser questionner notre rôle dans la société. »
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