Maud Bamps-Michotte, seule gagnante belge de Koh-Lanta et passionnée de montagne
Responsable vente en imagerie médicale à la ville, la seule gagnante belge de l’émission Koh-Lanta, en 2019, est aussi une passionnée de montagne qui rêve de boucler les Seven Summits, les sommets les plus élevés de chaque continent. La quinqua brabançonne vient ainsi d’achever l’Everest, au profit de l’opération Cap 48.
La montagne, c’est apaisant. Il y a des gens qui vont dans des temples bouddhistes pour se ressourcer. Moi, la montagne est ma retraite. En grimpant, on se retrouve avec soi-même. On sent son cœur qui bat, on est dans ses pensées, tout en ayant quelque chose de merveilleux autour à regarder. Ma maman nous a initiées, jeunes, mes sœurs et moi, au ski. Mais plus tard, une amie savoyarde rencontrée aux Guides et sa famille m’ont appris à ne pas juste descendre les pistes à toute allure, à prendre le temps de vivre avec la montagne.
Au sommet de l’Everest, on plane comme un oiseau. Pour y arriver, on doit partir à la tombée du jour et marcher toute la nuit. Quand le soleil se lève et qu’on aperçoit les crêtes, c’est déjà magnifique. La montée est difficile physiquement et arrivé au bout, on a envie de s’écrouler de fatigue, mais en même temps de sauter en l’air tellement c’est beau. Là-haut, j’ai fait des choses très fortes qui n’appartiennent qu’à moi… ça restera un moment unique. La descente a par contre été très dure. On a manqué d’eau et d’oxygène, on a dû se dépêcher. Le guide prévu était malade et je me suis retrouvée seule avec celui qui devait être mon porteur. C’est vrai qu’il a fait des erreurs. Mais c’est aussi vrai que j’avais une petite expérience et que j’aurais pu vérifier. Je n’ai pas eu peur de la mort mais lorsqu’on s’est endormi au camp de base, à 7 400 mètres, ma saturation était très basse et j’avoue que je me suis dit: «Pourvu qu’on se réveille demain.» Mais finalement, ce sont autant de choses qui nous apprennent l’humilité.
Quand on est en survie, on a l’esprit concentré sur l’essentiel et on sent son corps exister, jusqu’au moment où il refuse d’obéir.
Survivre, c’est en réalité sur-vivre. Et c’est encore mieux que la vie. Quand on est en survie, on a l’esprit concentré sur l’essentiel et on sent son corps exister, jusqu’au moment où il refuse d’obéir. Comme quand mes jambes m’ont lâchée sur l’Everest. J’étais pendue au bout de mon baudrier, je n’avais jamais connu le fait que mon corps m’abandonne. Je me disais: «Je n’y arrive plus et je suis bien comme ça.» Et en même temps quand je réfléchissais, je savais que je devais continuer…
Il ne devrait pas y avoir de séparation entre les valides et les moins valides. Il faudrait qu’il y ait une solidarité et qu’on puisse vivre ensemble. Ce n’est pas normal que dans notre société, toutes les différences soient laissées sur le côté. J’avais déjà fait les 100 km pour Cap48. Depuis toujours, j’aime cette association pour des raisons personnelles. On a tous autour de soi quelqu’un qui a des difficultés, visibles ou pas. Je tiens toutefois à souligner que j’ai d’abord fait l’Everest pour moi. Mais j’ai profité de ma notoriété et 20 000 followers pour aider cette œuvre.
Quand les gens sont en dehors des smartphones et de l’apparence, ils sont vraiment eux-mêmes. Après deux jours, on ne peut plus composer… C’est ce que m’a confirmé l’émission Koh-Lanta. Là-bas, pendant cinquante jours, j’ai été à nouveau un môme. C’est extraordinaire à 50 ans de ne plus se soucier de rien, d’autant que ce sont mes enfants qui m’avaient inscrite par surprise, je n’avais donc aucune culpabilité. Après, je pense qu’avoir gagné a surtout été une question de chance. Même si le fait de donner leur place aux autres et de ne pas les écraser, de les aider sans pour autant être leur «petite maman» a joué en ma faveur. C’est comme dans la vie, quand on n’est pas un danger pour les autres, ils sont rassurés et ça fédère. Cette émission a confirmé mon idéal du vivre-ensemble.
Le monde est fou, il va beaucoup trop vite! On s’en est tous rendu compte en revenant de Koh-Lanta. On se sentait agressé par le bruit, même ceux qui, plus que moi, avait l’habitude de la ville, des réseaux, etc. avant l’aventure. Je n’ai pas envie de critiquer la société mais moi, je me sens chez moi quand je suis sur cette île ou dans la montagne. J’aime vivre en pleine nature, pieds nus. Quand je vais travailler, je dois me déguiser. C’est amusant mais ce n’est pas l’essentiel. Je préfèrerais que le monde aille moins vite, qu’on se déplace tous à vélo et qu’on ne bousille pas notre planète. C’est malheureux que la politique et l’économie soient au-dessus de tout. S’il n’y avait pas d’économie, il n’y aurait pas d’argent et je crois qu’on aurait beaucoup moins de problèmes.
La vie n’attend pas. C’est Emily Brontë qui disait ça. Quand on a un rêve, on se dit souvent qu’on n’a pas le temps ou l’argent de le concrétiser. J’avoue que j’ai eu la chance de gagner 100 000 euros à Koh-Lanta car réaliser les Seven Summits est un challenge particulièrement cher – il m’en reste encore trois, je ne sais pas encore si j’y arriverai un jour, peut-être que j’aurai 80 ans le temps d’avoir le budget nécessaire… Mais il faut saisir chaque opportunité et, tout en restant bienveillant, mettre toutes les chances de son côté. Il parfois oser être non raisonnable, et vivre son petit paradis sur terre.
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