Body positive: « Instagram est à double tranchant »
Le body positive, ce mouvement qui prône l’acceptation de son corps quel qu’il soit, ne cesse de monter en puissance. Y compris en Belgique.
Sur une photo, cinq femmes posent de trois quarts, en file indienne. Toutes sont en sous-vêtements. Leurs corps sont bruts. Aucun filtre, aucune retouche. Il y a des ventres relâchés, des chutes de rein dessinées, des os qui ressortent. Sur un autre cliché, une femme s’agrippe et plante ses doigts dans les bourrelets de son ventre.
Ces photographies, délicates et pleines de force, font partie du projet Real Women Project, imaginé en janvier 2018 par trois femmes: Marie Brabant, Sybille Wallemacq et Ophélie Longuépée. Le shooting s’est déroulé au mois d’avril dernier. L’exposition, elle, se tient jusqu’au 30 septembre dans le salon de beauté Idyl conscious beauty, dans le quartier du Châtelain, à Ixelles. Le point de départ de ce projet ? Faire en sorte que « les femmes s’aiment dans leurs imperfections. Toutes ont des complexes, qu’elles soient grosses, minces, noires, blanches. Mais toutes doivent avoir confiance en elle, en leurs corps. Qu’elles aient conscience de qui elles sont » explique Ophélie Longuépée, la photographe de Real Women Project.
« Un corps c’est comme une histoire d’amour, il y a des hauts et des bas »
Real Women Project s’inscrit dans le mouvement dit du Body Positive, apparu en 1996 aux Etats-Unis, grâce à deux Américaines Connie Sobczak et Elisabeth Scott, qui souhaitaient mettre en avant une représentation différente du corps pour gagner en estime et confiance en soi.
Le mouvement est né il y a 22 ans, mais s’est démocratisé depuis seulement trois ans environ. Pourquoi un tel décalage ? Pour Caroline, fondatrice du blog Le salon de frivolités dédié à la lingerie grande taille, il y a eu un vrai ras le bol. « Les personnes veulent simplement vivre comme elles l’entendent« . Les réseaux sociaux ont aussi eu un impact comme l’explique Ophélie Longuépée. « Instagram est à double tranchant. D’un coté, c’est la dictaure de l’image et de l’autre une véritable ouverture. Les femmes ont l’opportunité de se faire entendre et de se montrer« .
En France, l’humoriste Laura Calu a lancé le #objectifbikinifermetagueule sur Instagram au mois d’avril dernier. Plus de 6000 utilisateurs ont repris ce hashtag et participé à son succès. Les utilisatrices d’Instagram se prennent en photo, affichent leurs corps et de se montrent telles qu’elles sont au quotidien, dans leur jean ou leur culotte.
1.0👙👌🏻❤️❤️❤️
Bienvenue dans la période proche de l’été. Ou les médias (réseaux sociaux, pub, télé). Nous rappellent constamment que la chose la plus importante pour les femmes c’est l’objectif Bikini. Je pense que la chose la plus importante c’est de se sentir bien comme on est. Il paraît même que quand on se sent bien on est vachement plus belle. Puisque des photos de femmes parfaites le plus souvent retouchées envahissent nos écrans voici des photos de femmes comme elles sont. La beauté est dans l’œil de celui qui regarde, il n’existe pas de perfection. J’ai envie une fois de plus de crier haut et fort que toutes les femmes sont belles. Merci à toutes celles qui jouent le jeu, merci pour vos photos. Prévenez vos amies et continuez de vous assumer. Bravo les filles ! On continu ? Postez vos photos avec le hashtag 👉🏻 #objectifbikinifermetagueule #obftglaura_caluhttps://www.instagram.com/laura_calu3675789191767415683300633784_367578919Instagramhttps://www.instagram.comrich658
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#objectifbikinifermetagueule #labrigadedupositif #bodypositive #bodyacceptance #Nantes #nantaise #paris #parisienne #fitfam #nevergiveupanaisscrishttps://www.instagram.com/anaisscris5082201271818284024968723911_508220127Instagramhttps://www.instagram.comrich658
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Depuis quelques semaines, le mouvement a gagné en médiatisation grâce au livre Body Positive Attitude de l’influenceuse française Ely_Killeuse. Dans une interview accordée à Brut, elle explique se sentir mieux dans son corps en 42, qu’en 36. Elle soulève aussi un point important : « le body positive n’est pas le gros positive. C’est tout le monde, c’est tous les corps«
https://twitter.com/brutofficiel/status/1010834166584414209Brut FRhttps://twitter.com/brutofficiel
Pour Ely Killeuse, les régimes à répétition, c’est terminé. Aujourd’hui, elle défend le #bodypositive sur les réseaux sociaux. Voilà pourquoi, selon elle, il faut regarder son corps avec bienveillance. pic.twitter.com/tQdcZ4a4xR
— Brut FR (@brutofficiel) June 24, 2018
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Des actions prometteuses, mais insuffisantes
En Belgique, Caroline s’inscrit dans la démarche du body positive avec son blog, fondé en décembre 2015. Son premier article revient d’ailleurs sur sa démarche militante et son souhait de prôner la diversité des corps. Le salon de frivolités a été créé pour prouver « qu’il n’existe pas de mauvaises tailles pour la lingerie sexy« , mais aussi pour « encourager les femmes à etre fières d’elles, quels que soient leur morphologie« .
La jeune femme de 29 ans se retrouve dans le body positive, mais préfère le terme de body neutral. « Avec le body positive, il y a une certaine pression, comme si il fallait être tout le temps être heureuse avec son corps. On a aussi le droit de le détester par moment. C’est comme une histoire d’amour, il y a des hauts et des bas« .
Avec des blogueuses comme Caroline et le Real Women Project, le mouvement body positive gagne petit à petit la Belgique. Originaire de la Côte d’Azur, Caroline constate d’ailleurs que les Belges ont un rapport plus décontracté à leurs corps.
A l’étranger, certains magazines ont franchi une étape et mis à leur une des vrais corps, ceux qu’on ne voit que trop rarement. En 2016, Ashley Graham, mannequin grande taille, était en couverture de Sports Illustrated. Elle a mis « un bon coup de pied dans la fourmilière » glisse Caroline en souriant.
1.0ashleygrahamhttps://www.instagram.com/ashleygraham2114849661803973371350689115_211484966Instagramhttps://www.instagram.comrich658
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En 2012, en France, un collectif de femmes noires s’était mobilisé. Dans les colonnes du Monde, elles posaient la question suivante : »A quand une femme noire en couverture du magazine Elle ?« . Une semaine plus tard, l’ancienne ministre de la Justice française Christiane Taubira était en couverture de l’hebdomadaire féminin.
Mais pour Ophélie Longuépée, il manque encore « des actions coup de poing » capables de réveiller les consciences et faire bouger les choses. La photographe espère un changement dans la presse féminine. « Il faudrait des éditos pronant la diversité des corps, plus de publicités avec de vraies femmes pour coller à la réalité. On met une femme noire ou ronde en une, c’est bien, mais quand on tourne les pages, ce sont toujours le meme type de femme qui est sur le papier sans défauts et retouchées. Il faudrait, je ne sais pas, un numéro spécial avec de vrais corps« .
Pour sa prochaine exposition qui se déroulera au mois de septembre prochain, Real Women Project souhaite aller « encore plus en profondeur » dans la présentation des corps féminins en insistant notamment sur leurs marques, leurs bosses, leurs creux. Des détails qui pourraient être qualifiés d’imperfections, mais qui ne le sont pas.
Plus de cinquante femmes ont candidaté, c’est beaucoup plus que pour le premier shooting. « On veut faire évoluer le projet« . Nul doute que les mentalités suivront aussi.
Audrey Morard
Real Women Project, jusqu’au 30 septembre 2018, Rue Tasson-Snel 37, 1060 Bruxelles.
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