On a testé: un atelier drag king

© Sakigraphie
Florence Mendez

Cette semaine, j’ai fait un tour du côté du genre masculin, grâce à ce que l’on appelle un atelier drag king. Nous étions cinq copines, dont une plus aguerrie qui animait.

« Il y a encore des brosses à dents Pikachu, mais plus que des roses, ça ne t’ennuie pas? » « On s’en balek », c’est tout ce que mon fils a trouvé à répondre à cette pauvre dame au magasin, faisant une nouvelle fois la promotion de mes talents en matière d’éducation. Il n’empêche que j’en suis plutôt fière de ce gamin, il semble imperméable au concept de masculinité toxique. J’aime à croire que la manière dont je l’élève y est pour quelque chose: pas de « les garçons ça ne pleure pas » ou de « tu cours comme une fille », on lit des histoires mettant en scène des femmes dans de passionnants rôles de premier plan et on discute beaucoup sur ce qu' »être un homme » signifie. Vaste question bien sûr, mais du haut de ses 8 ans, Raphaël semble avoir compris que sa boîte à tartines fuchsia et ses draps de lit licorne n’étaient pas une menace pour sa virilité. C’est un combat que je mène depuis qu’il est petit, et j’en ai entendu, des bêtises, comme par exemple le fait qu’il allait « devenir gay » (quand bien même?!) parce que je refuse de le laisser jouer avec des répliques d’armes à feu ou qu’il est libre de se déguiser en princesse Disney s’il le souhaite. Du moment qu’il ne chante pas… Je me permets une parenthèse: si vous tenez tant que ça à ce que vos gamins, au carnaval, aient l’air hétéro, les costumes d’indien, de militaire, de cow-boy ou d’ouvrier, c’est pas forcément la meilleure idée.

Trêve de bêtises, je vous raconte cela car, cette semaine, j’ai fait un tour du côté du genre masculin, grâce à ce que l’on appelle un atelier drag king. Nous étions cinq copines, dont une plus aguerrie qui animait. Elle nous a d’abord aidées à nous grimer en hommes, en accentuant et vieillissant nos traits à l’aide de maquillage, en nous équipant de fausses barbes très réalistes… Pour le corps, nous avons évidemment bandé nos poitrines, et flanqué dans nos slips des préservatifs remplis de coton. Le résultat fut immédiatement saisissant, je connais les frères de certaines de mes amies présentes, j’avais l’impression de les avoir en face de moi. Nous avons ensuite travaillé notre attitude, tâché de nous donner une posture, plus masculine, sans tomber dans le cliché.

Nous nous sommes inventé une identité, puis nous sommes allées dans le centre de Bruxelles. J’ai tout de suite eu le sentiment de ne plus être une proie, ce qui est agréable, mais également celle de devoir « donner le change », faire le malin, occuper l’espace quand dans mon rôle de femme je veille, en rue, à me faire la plus discrète possible. Les regards sur moi étaient différents, je me sentais libérée d’un poids. Toujours dans nos rôles de mecs nous avons bu un verre dans un café puis nous sommes rentrées pour débriefer. Ce fut une expérience très enrichissante, qui permet de réfléchir grandement à comment femmes et hommes occupent l’espace public et le subissent. Je vous la conseille fortement, surtout si vous êtes tout à fait contre l’idée, je suis à peu près sûre que c’est une pratique qui pourra faire de nous de meilleurs citoyens et êtres humains.

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