Renée Fleming, la guérisseuse lyrique

Renée Fleming, soprano superstar et guérisseuse lyrique © Belga

La soprano star américaine Renée Fleming se passionne depuis des années pour les vertus thérapeutiques de la musique. Forte d’une expérience de rééducation respiratoire auprès de patients souffrant d’un « Covid long », elle rêve de voir les arts faire « partie intégrante » des systèmes de santé.

« Nous sommes des experts de la respiration, c’est la base de notre métier, tout comme les nageurs ou instrumentistes à vent », sourit la soprano lors d’un entretien via Zoom avec l’AFP. Celle qui est appelée en Amérique « la diva du peuple » est en France pour un gala de l’Opéra de Paris mercredi au Palais Garnier, dans un format inhabituel monté par son complice, le metteur en scène Robert Carsen, avec Lambert Wilson comme récitant, deux autres chanteurs, Renaud Capuçon au violon et deux danseurs du Ballet de l’Opéra. En août 2021, elle lance avec d’autres chanteurs, dont Angélique Kidjo et des stars de Broadway, l’initiative « Healing Breath » (souffle guérisseur) « dans laquelle on partage nos exercices de respiration favoris (…) pour permettre aux patients souffrant du +Covid long+ ou toute personne souffrant de problèmes de poumons de développer leur souffle », explique la soprano.

« NeuroArts »

Dans certains établissements, comme le Houston Methodist Hospital qui applique un programme de thérapie par la musique, « les thérapeutes font de tels progrès avec les patients que l’établissement veut faire appel à davantage d’artistes car ça marche vraiment! », poursuit-elle. La soprano, qui tente avec des chercheurs d’étendre le projet pour parvenir à « mesurer la santé des poumons », n’en est pas à son premier projet sur le lien entre arts et santé. En collaboration avec le Kennedy Center à New York, dont elle est conseillère artistique, et les Instituts nationaux de santé (NIH), elle travaille depuis 2017 sur « Sound Health », une initiative pour explorer comment la thérapie par l’art peut améliorer la santé et même avoir un impact direct sur des troubles neurologiques, sur l’anxiété ou le syndrome de stress post-traumatique (PTSD).

Et avec l’hôpital américain Johns Hopkins et d’autres institutions, elle travaille depuis 2019 sur « NeuroArts Blueprint », un projet qui va plus loin en voulant créer un réseau de chercheurs et d’artistes pour promouvoir l’utilisation des arts pour améliorer la santé. « J’espère que les +NeuroArts+ pourront devenir un domaine à part entière, (…) j’adorerais l’idée que les arts fassent partie intégrante de notre système de santé », plaide Renée Fleming. « L’humain connaît la musique depuis au moins 55.000 ans au vu des découverte d’instruments de cette époque. C’est dans notre ADN de réagir à la musique et aux arts ».

Trac paralysant

Ne craint-elle pas une résistance du milieu médical? « Bien sûr qu’il y a de la résistance », même si ce type d’initiatives s’étend, notamment au Royaume-Uni et dans certains Etats américains, remarque-t-elle. Sa passion pour la convergence entre santé et arts est née de son propre corps, car malgré une carrière exemplaire qui l’a amenée au sommet de son art, elle a souffert de tracs horribles avant de monter sur scène. « Chaque cellule de mon corps criait +non, je ne peux pas faire ça!+ Quand vous avez le trac, vous vous sentez comme si vous allez mourir avant d’aller sur scène », écrit-elle dans son autobiographie « The Inner Voice » (2004). Au printemps 2023, la soprano de 63 ans reviendra à l’Opéra de Paris, où elle n’a pas chanté dans un opéra depuis dix ans, pour interpréter Pat Nixon dans « Nixon in China », opéra phare de John Adams.

Et au Metropolitan Opera de New York, elle créera l’évènement en faisant son retour très attendu, après cinq ans, lors de la première mondiale de « The Hours » du compositeur Kevin Puts, une adaptation du roman de Michael Cunningham qui avait été porté à l’écran en 2002 avec Meryl Streep, Julianne Moore et Nicole Kidman.

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