VRAI/FAUX | Quelle est la véritable influence de la lumière dans notre vie quotidienne
Beaucoup de présupposés et de théories circulent au sujet de la lumière artificielle. Nous avons demandé à cinq experts de clarifier les choses et d’élucider pour nous ces zones d’ombre.
« Les supermarchés éclairent leurs produits différemment pour les rendre plus attractifs »
Réponse : VRAI
«On accorde énormément de soin à la lumière dans les endroits où des produits sont vendus», confirme Geert Cautreels, consultant pour Dr. Light. Pas seulement dans les supermarchés, mais aussi dans les boulangeries, les boucheries ou chez les vendeurs de fruits et légumes. Paul Thursfield, de Signify, est du même avis: «Un bon éclairage permet non seulement de faire vendre mais aussi de garder les consommateurs plus longtemps dans le magasin.»
Le pain sera par exemple présenté sous une lumière chaude, alors que le poisson frais a évidemment besoin d’un décor plus froid. On joue aussi abondamment avec la mise en évidence des promotions et l’éclairage des différentes zones du magasin pour les rendre plus attirantes pour les groupes-cibles spécifiques. Un magasin hard discount utilisera une lumière plus blanche pour accélérer les achats et le passage en caisse, un supermarché haut de gamme tentera au contraire de garder plus longtemps ses clients dans ses murs grâce à une ambiance lumineuse agréable.
Et ça ne s’arrête pas là: certains tentent même de faire varier l’éclairage en fonction du trafic, pour favoriser la bonne circulation de la clientèle. Par ailleurs, la température de la lumière peut aussi contribuer à faire diminuer le gaspillage alimentaire, souligne Ton Borsboom, de Signify: «On peut par exemple ralentir le verdissement des pommes de terre ou la décoloration de la viande.» Quant aux magasins de vêtements, avez-vous déjà remarqué qu’on a plus ou moins bonne mine d’une cabine d’essayage à l’autre? Là aussi, la couleur de la lumière permet de mettre en beauté.
« Les lampes qui imitent le lever et le coucher du soleil favorisent le cycle du sommeil et sa qualité »
Réponse: FAUX
«La simulation du lever et du coucher du soleil n’est en soi pas responsable d’un cycle de sommeil qualitatif», affirme Paul Thursfield. Geert Cautreels considère plutôt ce type de lampe comme une tendance, qui se limite à installer une certaine atmosphère. «Mais, poursuit le premier, c’est vrai que le rythme lumineux naturel a un impact énorme sur notre bien-être. Il nous aide à contrôler notre cycle du sommeil. J’aime illustrer cela par un exemple. Lorsque nous partons en vacances, nous cherchons le soleil et nous passons une grande partie de notre temps dehors. Cela nous rend plus éveillés et énergiques, ce qui fait que nous dormons aussi souvent mieux la nuit. Mais lorsque nous retournons chez nous ou au travail, nous passons à nouveau plus de 90% de notre temps à l’intérieur. Et c’est ce manque de rythme lumineux naturel qui perturbe notre cycle de sommeil.»
Il existe d’ailleurs différents systèmes d’éclairage qui peuvent aider, par exemple, dans certains hôpitaux, hôtels et bureaux à la pointe. A l’aide de LED, on imite les variations de la lumière naturelle extérieure afin de contenir (nous gagnons en énergie grâce à une lumière vive et bleutée) ou juste stimuler (nous sommes ralentis et détendus par une lumière douce et jaune) la production de mélatonine dans notre cerveau. Mais c’est encore un domaine émergent. Même chose pour les lampes qui aideraient à lutter contre le spleen hivernal. «La meilleure solution est encore de s’exposer – à plus forte raison le visage et les yeux – à la lumière naturelle.»
« Travailler de manière concentrée, cuisiner, se préparer dans la salle de bains ou lire: tout cela peut se faire sous la même lumière »
Réponse: FAUX
La source lumineuse la mieux adaptée est cruciale. Même la plus jolie des lampes design ne donnera pas une bonne lumière si sa puissance et sa couleur ont été mal choisies. Oliver Nieto-Tröger, chez Louis Poulsen, recommande une lumière jusqu’à 2700k dans les espaces où l’on se détend, et à partir de 3000k pour un bureau à la maison.
Selon Geert Cautreels, une lumière chaude mais un peu plus blanche convient aussi dans des zones où il y a plus d’activité comme la cuisine ou la salle de bains. Si on aime parfois s’y relaxer, on peut alors envisager un dimmer qui permet d’adapter l’intensité et la couleur de la lumière en fonction de son humeur et de son activité. Un dîner romantique, les devoirs ou une soirée jeux sur la table de la cuisine peuvent se faire chacun sous une couleur différente, tout comme la douche. Pareil pour la lecture. Si on lit activement – étudier ou se concentrer –, il vaut mieux opter pour 3000k ou jusqu’à 4000k.
Mais si on a envie de feuilleter quelques pages avant de s’endormir, une lumière chaude et douce de 2200k sera plus confortable pour les yeux. On peut parfaitement dimmer avec des LED, qui peuvent diffuser aussi bien une lumière froide que chaude.
1,42 milliard d’euros
C’est la somme que tous les Belges pourraient économiser ensemble chaque année s’ils passaient aux LED pour chacun de leurs points d’éclairage. Ce serait aussi une bonne chose pour l’environnement car on émettrait par la même occasion 0,7 million de tonnes de CO2 en moins.
« Une maison éclairée se voit moins vite cambrioler »
Réponse: VRAI
Plusieurs éléments entrent en ligne de compte. La première étape est bien sûr de verrouiller portes et fenêtres. Si l’on associe cela à un éclairage intérieur et extérieur, on obtient, selon Tineke Van Iseghem, du SPF Intérieur, et le rapport de l’EUCPN sur les cambriolages d’habitations sur lequel elle se base, la combinaison la plus efficace pour éviter les mauvaises surprises.
Quand on sait que neuf cambrioleurs condamnés sur dix avouent qu’il n’entrera jamais volontairement dans un logement occupé, il est intéressant de simuler sa présence quand on n’est pas là. «L’éclairage intérieur est donc une mesure de sécurité importante», d’après l’experte. On peut le faire en programmant un minuteur ou un dispositif smartlight, et le contrôler à distance avec une appli. Même chose pour l’éclairage extérieur.
La lumière dans sa globalité a par ailleurs un impact sur le sentiment général de sécurité en rue. Les experts de Signify précisent que les chiffres de la criminalité baissent de 21% et les accidents de 30% quand des systèmes lumineux intelligents sont installés. «En plaçant des capteurs intelligents, précise Ton Borsboom, on peut détecter entre autres le bruit, le mouvement, la pluie ou la circulation et adapter l’éclairage en conséquence. Ce qui peut contribuer à améliorer la sécurité des habitations.»
80%
Tels sont les coûts énergétiques que l’on peut économiser chaque année par lampe en remplaçant une ampoule traditionnelle (60 watts – 806 lumens) par un LED (7 watts). Un ampoule traditionnelle coûte 34 euros chaque année et par lampe ; le LED, moins de 4 euros.
« La manière de percevoir la lumière varie en fonction des origines géographiques »
Réponse: VRAI
«On remarque en effet des différences géographiques dans la manière de percevoir la lumière, avance Paul Thursfield. Les gens, les plantes et les animaux du Nord et du Sud de notre planète sont habitués à un cycle lumineux différent de celui de leurs semblables vivant sur ou à proximité de l’équateur.»
Et cette habitude s’est enracinée dans notre cerveau pendant des dizaines de milliers d’années. En Asie, en Afrique ou au Moyen-Orient, la lumière naturelle est synonyme de chaleur et reste pour cela tenue le plus possible hors de la maison. «La lumière blanche est ressentie comme agréable parce qu’elle rafraîchit mentalement. En l’utilisant, on a vite l’impression qu’il fait un ou deux degrés de moins.»
Une sensation que l’on préfère éviter près des pôles. «En Belgique nous utilisons principalement du 2700k, une couleur de lumière que l’on rencontre peu dans les pays plus chauds, ajoute Geert Cautreels. Là-bas, on penche pour une lumière froide jusqu’à 4000k. C’est aussi une question de style. Dans les régions chaudes, la lumière blanche est perçue comme plus moderne.»
Cela peut être lié à des traditions bien ancrées. Paul Thursfield cite l’habitude d’utiliser dans les habitations d’Asie un plafonnier central puissant. «Autrefois les maisons étaient construites autour d’un atrium ou avaient une ouverture dans le toit pour laisser entrer la lumière du jour. Cette lampe au plafond en est une interprétation contemporaine.»
« À la maison, un seul point lumineux central suffit par pièce »
Réponse: FAUX
C’est peut-être le cas pour simplement voir dans le noir, mais pas pour créer une atmosphère agréable. Dans ce domaine, les spécialistes sont les Scandinaves. En raison de leurs longs hivers très sombres, ils accordent beaucoup d’attention à leur plan d’éclairage, où l’on distingue l’éclairage général et celui par zone.
Le premier concerne la lampe que l’on allume pour illuminer tout l’espace en un clic ; pour le second, il s’agit de la lampe au-dessus de la table de la salle à manger, ou le lampadaire de lecture à côté du fauteuil, qui permet de créer un îlot de lumière. Oliver Nieto-Tröger conseille, en fonction de l’espace, quatre ou cinq points lumineux (qui peuvent aussi être des bougies ou un feu ouvert) répartissant la lumière différemment: vers le bas, vers le haut et latéralement. On retrouve ce principe de stratification chez les experts de Signify.
L’éblouissement est l’ennemi numéro un d’un bon plan d’éclairage. «Non seulement ça dérange les yeux mais ça rend aussi impossible de bien voir l’espace.» Oliver Nieto-Tröger privilégie pour cette raison les sources lumineuses qui ne sont pas visibles ou au moins protégées.
Le seul endroit où Geert Cautreels recommande un seul point lumineux central, ce sont les chambres d’enfant. «Parce que celles-ci sont régulièrement réaménagées au fil des années. Un unique point central donne la liberté de changer la disposition des meubles et de compléter avec des lampes mobiles en fonction des besoins.»
Lexique
La couleur de lumière ou la température de couleur désigne les variations de la lumière froide à la lumière chaude, et jaune, qui correspond par exemple aux bougies. Celle-ci s’exprime en kelvin. Une valeur élevée (4000k) renvoie à la première catégorie, une valeur basse à la seconde (2200k).
On énonce en lumen la quantité de lumière diffusée par une source lumineuse. La puissance d’une lampe halogène de 50 watts équivaut à 350-400 lumens.
Les experts
Geert Cautreels, consultant spécialisé en étude d’éclairage, Dr.Light. Ton Borsboom, design manager, et Paul Thursfield, light designer en chef, Signify (ancien département de Philips).Tineke Van Iseghem, porte-parole Sécurité et Prévention au SPF Intérieur. Oliver Nieto-Tröger, brand manager, Louis Poulsen.
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