« L’enfer »: Stromae aborde le sujet du suicide au JT de TF1

Stromae a mis des mots sur ce que c’est de vivre avec une maladie mentale. © BELGA IMAGES
Isabelle Willot

En clôture du 20h de TF1, Stromae répond à la journaliste Anne-Claire Coudray en chantant L’Enfer, un titre qui évoque son mal-être et les pensées suicidaires qui ont pu l’habiter.

Dimitri Haikin, psychologue clinicien, est le directeur de la plate-forme d’aide de première ligne psy.be. Il plaide pour une société plus tolérante à la fragilité.

«J’ai assisté à cette confession en direct et j’ai trouvé ça très fort du point de vue de l’impact émotionnel. On ne l’avait pas vu depuis longtemps, on savait qu’il avait rencontré des problèmes psychologiques, voire psychiatriques. Cette chanson est arrivée comme une validation empreinte de beaucoup d’authenticité. C’était une manière pour lui de faire quelque chose de ce qui lui est arrivé. Une forme de résilience intéressante aussi. En tant que personnalité publique, il pouvait difficilement éviter la prise de parole sur son absence. Il a aussi un pouvoir d’influence certain. Beaucoup de gens se sont sentis touchés par son expérience et se sont retrouvés dans ce qu’il a vécu. Enfin quelqu’un mettait des mots sur ce que c’est de vivre avec une maladie mentale, d’entendre des voix dans sa tête, de se sentir impuissant. Cela a humanisé le fait qu’un être humain puisse décompenser psychiquement.

« Toutes les personnalités publiques qui s’expriment aident à une meilleure tolérance à la fragilité »

Parler de la santé mentale est aussi beaucoup moins tabou aujourd’hui, notamment grâce à une certaine forme de proximité relationnelle instaurée par les réseaux sociaux. Et c’est peut-être une bonne chose, finalement, de pouvoir ainsi parler vrai pour faire comprendre qu’il y a des zones d’ombre dans chaque être humain, des moments de vie plus difficiles que l’on peut surmonter. Toutefois, la prudence doit rester de mise avec les termes qu’on utilise. C’est un revers inhérent à toute forme de vulgarisation. On qualifie beaucoup trop facilement les gens de bipolaires ou de pervers narcissiques. Il n’est pas rare de voir arriver dans mon cabinet des patients qui se pensent atteints de certaines pathologies, qui se posent des questions. C’est tout le travail du professionnel de les encadrer, d’évaluer leur état psychologique, leurs comportements, et grâce à cela, de les rassurer bien souvent.

La manière dont Stromae a médiatisé ce qu’il a vécu permet aussi de faire comprendre à la population que ce n’est pas parce qu’il y a une pathologie mentale que la personne risque de sombrer dans la folie et de devenir dangereuse. Que ce n’est pas réservé à des forcenés qui passent à l’acte. En ce sens, toutes les personnalités publiques qui s’expriment, les artistes mais aussi les sportifs comme Naomi Osaka, aident à une meilleure tolérance de la fragilité. Nous ne sommes pas des êtres robotisés et parfaits. L’important, c’est de trouver de l’aide, du soutien, auprès de ses proches et des professionnels quand cela arrive.»

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