Dans le repaire champêtre de la créatrice de bijoux Valérie Messika

Au coeur d'un parc aux arbres centenaires, cette maison de campagne est un véritable havre de paix, en osmose avec la nature. © VALÉRIE MESSIKA'S COUNTRY HOUSE - XAVIER BÉJOT

A la tête de sa propre maison de joaillerie, cette Parisienne, aidée de son amie, l’artiste Sophie Reulet, a fait de cette demeure familiale un havre de paix. Elégante et poétique, l’habitation permet à la citadine de se ressourcer le week-end, au coeur d’un parc luxuriant.

« Je voulais faire de cette maison un lieu où se créer des souvenirs familiaux.  » C’est avec ce souhait de jeune maman qu’il y a une poignée d’années, Valérie Messika aborde la rénovation de cette très belle demeure du xixe siècle, nichée dans un espace vert de quinze hectares, dans l’Eure-et-Loire, à une bonne heure de route de la capitale française. Le bien appartient à son papa, un diamantaire réputé à qui la jeune femme doit sa passion pour la joaillerie. Et la businesswoman, aujourd’hui à la tête de son propre label de bijoux, y a déjà passé du temps, plus jeune.  » Mon père a refait sa vie avec une femme qui aimait la campagne et ne supportait pas bien le quotidien citadin. Avec elle, il a eu deux garçons qui avaient besoin de surface pour se dépenser. Quand il a déniché cette propriété, il est tout de suite tombé sous le charme… « , raconte-t-elle. Il faut dire que le site est splendide et très arboré, la villa ne se laissant découvrir qu’au bout d’une allée plantée, majestueuse.  » L’habitation a cependant été longtemps vide et elle était devenue très vétuste, relève la nouvelle occupante. Certains sols étaient abîmés, les menuiseries, les huisseries… Tout était à refaire. Il fallait conserver l’esprit de l’endroit mais en y intégrant du confort, de la sophistication et un côté plus pratique…  »

Le carrelage en damier du grand salon a servi de fil conducteur à tout l'aménagement. Le canapé vient de chez Maisons du Monde et la table en chêne a été réalisée sur mesure.
Le carrelage en damier du grand salon a servi de fil conducteur à tout l’aménagement. Le canapé vient de chez Maisons du Monde et la table en chêne a été réalisée sur mesure.© VALÉRIE MESSIKA’S COUNTRY HOUSE – XAVIER BÉJOT

Forte de cette envie de préserver le passé et de le ramener dans le présent, Valérie engage son amie Sophie Reulet, qui fut autrefois l’une des chevilles ouvrières de Messika, pour s’atteler à cette métamorphose douce.  » Nous nous connaissons depuis longtemps et c’était l’alibi parfait pour pouvoir rebosser ensemble. Quand on travaille à deux, on est comme des gosses, tout excitées « , explique la joaillière.  » C’est vraiment fluide, on n’a presque pas besoin de se parler et il n’est pas nécessaire de faire des concessions « , rétorque l’artiste en décochant un sourire à sa copine avant de poursuivre :  » J’ai abordé cette transformation en me disant que Valérie avait vécu là des choses importantes et que je ne pouvais pas tout bouleverser. Il fallait qu’elle puisse à son tour passer de bons moments sur place avec ses enfants à elle.  » Et pour sûr, les deux femmes ont pris grand plaisir à mener ce lifting en binôme… Et de se remémorer l’emballement qui régnait dans la voiture, lorsqu’elles partaient certains matins vers la province, pour une réunion de chantier.

La chambre des fillettes se veut très bucolique, avec des teintes douces et de jolis branchages garnis d'oiseaux.
La chambre des fillettes se veut très bucolique, avec des teintes douces et de jolis branchages garnis d’oiseaux.© VALÉRIE MESSIKA’S COUNTRY HOUSE – XAVIER BÉJOT

Tout en nuances

Dans ce coin cosy, à la déco ethnique datant des anciens occupants, un canapé géant permet de contempler le jardin étendu.
Dans ce coin cosy, à la déco ethnique datant des anciens occupants, un canapé géant permet de contempler le jardin étendu.© VALÉRIE MESSIKA’S COUNTRY HOUSE – XAVIER BÉJOT

Le résultat est à la hauteur des espérances que nourrissaient alors les deux complices, occupées à rêver cet endroit jusque dans ses moindres détails. C’est d’ailleurs de l’un d’eux que découle le fil conducteur de ce réaménagement. Valérie désirait en effet garder le sol en damier du salon principal – le séjour est en réalité divisé en trois entités, les deux autres étant pour l’une une salle de jeux, pour l’autre un petit coin télé avec divan géant.  » C’est de ce carrelage qu’est née l’idée de jouer avec la teinte noire, à travers tout le bâtiment « , explique la décoratrice. Les châssis ont ainsi été peints dans ce ton, intérieurement, pour former de véritables cadrages du paysage environnant. Les escaliers du hall, plusieurs lampes sur mesure et même le lit de la maîtresse des lieux, pensé comme un baldaquin contemporain et implanté au centre de la chambre, cernent par ailleurs l’espace de lignes noires très graphiques.

Cette partie du jardin a été aménagée dans un esprit guinguette avec du mobilier scandinave.
Cette partie du jardin a été aménagée dans un esprit guinguette avec du mobilier scandinave.© VALÉRIE MESSIKA’S COUNTRY HOUSE – XAVIER BÉJOT

Répondant à ces éléments sombres, on retrouve une palette de blancs, de crème, de gris clair et des matières telles que le lin, le bois… et le béton qui est utilisé pour le plan de travail de la cuisine, l’immense baignoire panoramique de la salle de bains principale ou la cheminée de marbre, rhabillée par-dessus avec ce matériau moderne, à la texture  » à la fois rude et veloutée « , comme l’apprécie Valérie. La chambre des filles de la créatrice illustre parfaitement cette recherche d’une gamme de nuances douces.  » C’est la première pièce que j’ai composée, relate Sophie. Je suis une fillette dans l’âme mais j’ai eu un garçon. Ici, j’avais envie de me lâcher, d’imaginer quelque chose de très princesse mais pas gnangnan, avec des brindilles glanées dans le jardin, de petits oiseaux…  »

Quelques touches plus flashy viennent cependant booster l’aménagement général, comme ce bleu canard utilisé sous la charpente pour le home cinéma et pour le tapis du salon.  » C’est une couleur qui devenait à la mode à l’époque et que je trouvais chaleureuse et audacieuse « , justifie Valérie.  » L’envie aussi de s’éclater « , relance sa comparse. Un assemblage de couleurs qui finalement apparaît des plus maîtrisés et est mis en relief par une lumière incroyable, plusieurs baies ayant été élargies et des fenêtres condamnées ayant été libérées.

Sous la charpente, le home cinéma est équipé d'un canapé à deux niveaux. Un bleu canard donne du peps à cette pièce cocoon.
Sous la charpente, le home cinéma est équipé d’un canapé à deux niveaux. Un bleu canard donne du peps à cette pièce cocoon.© VALÉRIE MESSIKA’S COUNTRY HOUSE – XAVIER BÉJOT

Mise en récit

La baignoire en béton est surpombée par un lustre composé par Sophie Reulet avec des branches du jardin et des cristaux.
La baignoire en béton est surpombée par un lustre composé par Sophie Reulet avec des branches du jardin et des cristaux.© VALÉRIE MESSIKA’S COUNTRY HOUSE – XAVIER BÉJOT

Mais au-delà de cette composition colorée, aux accents champêtres et authentiques sans tomber dans un travers rustique trop prononcé, ce qui frappe surtout lorsque l’on parcourt cette maison, c’est la foultitude de clins d’oeil qui font que les espaces  » racontent une histoire « , comme le suggère la propriétaire. On trouve ainsi peu de meubles de grands designers, l’idée étant plutôt de créer du mobilier sur mesure, de détourner des standards – notamment du géant suédois de l’ameublement – ou encore de dénicher quelques articles remarquables aux puces. Certains éléments d’origine, comme les miroirs, les bibelots africains du salon TV ou encore un grand plateau indien désormais placé dans l’une des chambres, ont par contre été récupérés.  » Sophie a un talent incroyable pour mettre les choses en récit. Il y a une vraie poésie dans sa réflexion. Moi, je planchais sur l’esprit du projet, le moodboard en quelque sorte. Elle, s’est vraiment attelée à cette recherche d’objets. Avec un autre concepteur, on se serait arrêté à de belles peintures sur les parois, une jolie table, des chaises… « , s’enthousiasme son amie. Et de montrer, pour donner corps à ce compliment, ce lustre suspendu au-dessus de la baignoire et fait d’un bouquet de branches ramassées par la décoratrice dans le jardin, assemblées et garnies de LED et de petits cristaux… Ou encore ces appliques réalisées au départ de chapeaux de paille ! De même, dans le hall, l’artiste a voulu donner un caractère équestre, en hommage à un cheval qui vécut longtemps sur le site. En résulte une petite table-selle plutôt inédite et des bottes et bombes accrochées aux murs.

Le lit à baldaquin suit la thématique noire et graphique qui traverse tout ce projet.
Le lit à baldaquin suit la thématique noire et graphique qui traverse tout ce projet.© VALÉRIE MESSIKA’S COUNTRY HOUSE – XAVIER BÉJOT

 » Tout cela fait que l’on se sent bien dans cet endroit. Dès qu’on arrive ici, si possible au moins une fois par mois, on est complètement déconnecté et tout devient un plaisir, comme le simple fait d’aller voir les poules au fond du jardin ou de regarder les paons qui s’y promènent. On prend, en fin de compte, le temps de vivre.  » Si la fondatrice de Messika reconnaît que cet intérieur cosy n’a que peu à voir avec l’épure de ses collections de bijoux, elle y voit néanmoins un point commun, la lumière :  » Elle est primordiale pour moi, que ce soit dans mes bureaux parisiens ou à la campagne. Et puis, on retrouve dans cette habitation, comme dans les créations de notre marque, un aspect assez géométrique, avec des lignes bien dessinées, tout en gardant une grande délicatesse. Après, la comparaison s’arrête là car pour les couleurs, c’est un tout autre univers.  »

Partout dans l'habitation, on retrouve des allusions au monde équestre, comme avec cette table-selle, en arrière-plan.
Partout dans l’habitation, on retrouve des allusions au monde équestre, comme avec cette table-selle, en arrière-plan.© VALÉRIE MESSIKA’S COUNTRY HOUSE – XAVIER BÉJOT

Une vision esthétique commune en filigrane donc,  » typiquement féminine sans doute « , avance le duo, mais aussi une envie de bien faire les choses, avec passion. Car nul doute qu’à la tête de cette luxueuse maison, Valérie Messika aime ce qu’elle fait et entend atteindre l’excellence. Alors que sa griffe ne présentait que douze pièces de haute joaillerie l’an passé à Bâle, elle en a exposé le double cette année. En parallèle, six ou sept boutiques devraient ouvrir en 2018, au Moyen-Orient et probablement à Londres et Genève, et une nouvelle collection avec la top Gigi Hadid, devenue ambassadrice du label en 2017, est en gestation… Une année qui s’esquisse comme trépidante donc, mais sans aucun doute ponctuée de pauses méritées dans ce coin de paradis.

Valérie Messika en 7 dates

Dans le repaire champêtre de la créatrice de bijoux Valérie Messika
© VALÉRIE MESSIKA UGO RICHARD

1976 : Naissance près de Paris.

1999 : Elle fait un passage chez Chanel, au département montres et bijoux, après avoir étudié le marketing et la communication à la Sorbonne.

2000 : Elle rejoint l’entreprise de son papa, l’un des plus grands diamantaires de France.

2005 : Elle lance Messika et imagine, en 2007, le bracelet Move, devenu l’un des best-sellers de la marque.

2008 : La griffe introduit la collection Skinny, des bijoux en diamants portés à fleur de peau, tels des tatouages.

2013 : Elle ouvre un flagship store à Paris. Désormais, sa marque est vendue dans plus de 300 points de vente de par le monde.

2017 : Pour célébrer les 10 ans du bracelet Move, la top Gigi Hadid devient ambassadrice du label et cosigne une ligne avec la maison de luxe.

Sophie Reulet en 5 dates

Dans le repaire champêtre de la créatrice de bijoux Valérie Messika
© SOPHIE REULET

1973 : Elle voit le jour.

2003 : Après avoir obtenu un Brevet des métiers d’art, en joaillerie, elle rejoint la griffe Messika, comme dessinatrice.

2011 : Elle réalise ses premières oeuvres. Son concept :  » Voler  » en rue des affiches usagées et ensuite y apposer des visages de célébrités réalisés au pochoir. Son pseudo : Official Bill Stealer (Voleuse officielle d’affiches).

2016 : Elle achève le chantier de la maison de Valérie Messika, débuté un an plus tôt. Elle ne désire toutefois pas devenir décoratrice à temps plein, elle préfère se consacrer à son travail de plasticienne.

2017 : Elle participe à la foire d’art contemporain Art Up ! , à Lille, et présente une expo personnelle lors du Festival du film francophone d’Angoulême.

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