Jeunes et jolis: pour ou contre les cosmétiques dès le berceau?

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Le marché des cosmétiques pour enfants et bébés se développe à toute allure… Mais la peau des petits a-t-elle vraiment besoin de toutes ces crèmes et soins?

Il y a quelques années encore, la plupart des jeunes parents jetaient leur dévolu, au rayon soins pour bébé, sur un flacon jaune ou bleu et blanc, dont les odeurs rappelaient immanquablement celle de leur propre période couches-culottes. Aujourd’hui cependant, la donne a changé et des marques comme Zwitsal, Mustela et Galenco doivent faire face à la concurrence de labels plus verts, plus propres… mais aussi plus chers, comme Dr. Barbara Sturm, Minois, Chantecaille Bébé, Naïf ou Most Gentle. Faisant fi des tarifs, de nombreux papas et mamans sont prêts à mettre la main au portefeuille, convaincus (parfois bien à tort) que ces produits sont plus doux et plus sûrs pour la peau des mômes que leurs équivalents traditionnels.

Inutile d’ajouter à l’eau des shampoings et savons qui abîmeront la couche adipeuse qui protège la peau.

Cette tendance n’a pas échappé à Ciska Dings, qui propose, sur sa boutique en ligne Things by Dings, une gamme de cosmétiques la plus naturelle possible. « Les femmes soucieuses de ce qu’elles appliquent sur leur propre peau le seront à plus forte raison pour leurs enfants. Elles veulent des produits parfaitement adaptés à l’épiderme du bambin ou du jeune ado et sont d’accord d’y mettre le prix. »

Préserver la peau

D’après le bureau d’études de marché Mintel, les trois quarts des mères dépensent même plus volontiers de l’argent en soins pour leurs kids que pour elles-mêmes. Le secteur de niche des produits de soins pour enfants et bébés représente environ 3,6 milliards de dollars au niveau mondial, se compose à environ 45% d’articles haut de gamme et a connu une croissance de près de 9% en 2018. Pour le reste, c’est une copie miniature de la version adulte: une course aux formules de plus en plus naturelles et souvent « sans » divers ingrédients comme les parabènes ou les huiles minérales. La tendance s’observe d’ailleurs aussi chez les acteurs traditionnels: Zwitsal, par exemple, a lancé en 2018 une gamme Naturals, à base de formules naturelles à 98% au moins et exempts de parabènes, de savon, de colorants et de SLES (un agent moussant).

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Faut-il pour autant culpabiliser de ne pas utiliser ces soins dits « verts » pour nos têtes blondes? Pas forcément. On trouve en réalité du bon dans toutes les catégories sur le marché. « On s’imagine souvent que des ingrédients naturels sont d’office préférables pour les plus jeunes, explique le docteur Jetske Ultee, chercheuse en dermatologie cosmétique, maman de quatre enfants et responsable d’un blog consacré au sujet. Des problèmes peuvent toutefois également se manifester avec des substances comme l’eucalyptus, le thym ou encore la lavande », cette dernière étant parfois utilisée dans les brumes d’oreiller relaxantes ou même des crèmes pour nourrissons…

La question fondamentale est toutefois avant tout de savoir de quoi a (ou n’a pas) besoin la peau des fillettes et garçonnets, qui reste pendant environ six ans beaucoup plus fine et moins pigmentée que celle des plus grands. Plus sensible, aussi, « notamment parce que ses barrières sont facilement endommagées », souligne notre spécialiste. Pour elle, « la peau d’un bébé est cinq fois moins épaisse que celle d’un adulte, ce qui explique notamment pourquoi une exposition excessive au soleil a un effet tellement marqué chez les tout-petits. Toutes sortes de substances sont également plus facilement absorbées par l’organisme. En outre, comme sa couche de graisse protectrice n’est pas encore complètement développée, la peau se déshydrate plus facilement et est plus sensible aux irritations et inflammations. »

Réduire les bains

Il est donc indispensable de préserver l’intégrité de cette barrière ténue en optant pour des produits doux et en évitant les bains quotidiens. « Et surtout trop longs, insiste l’experte. Si votre petiot n’est pas vraiment sale, inutile d’ajouter à l’eau des shampoings et savons qui abîmeront la couche adipeuse qui protège la peau. Retenez aussi qu’en général, plus il y a de mousse, plus c’est agressif. » Le laurylsulfate de sodium (SLS), un agent moussant qui dessèche aussi la peau, est par exemple déconseillé chez les nouveau-nés. Il est d’ailleurs de moins en moins utilisé, même si on le retrouve parfois encore dans certains dentifrices ou gels douche. Le lauryl éther sulfate de sodium (SLES), moins desséchant, reste par contre largement répandu. De nombreuses marques naturelles et traditionnelles privilégient toutefois, en particulier dans les formules destinées aux plus jeunes, l’agent tensioactif qu’est la bétaïne de cocamidopropyl – un composant doux, mais dont les éventuelles impuretés peuvent provoquer des réactions allergiques.

Si, après une activité extérieure par exemple, l’enfant est particulièrement sale, le médecin préconise d’utiliser un gel lavant liquide doux avec un pH aux alentours de 5 qui, recherches à l’appui, équivaudra à de l’eau pure. Celle-ci n’est d’ailleurs pas particulièrement douce pour la peau non plus, et les nouveau-nés qui grandissent dans une zone où l’eau est dure sont par exemple plus sujets aux eczémas. « Après un bain trop prolongé ou une exposition à un produit de lavage trop agressif, vous pouvez utiliser une huile ou lotion douce », complète le médecin. L’emballage de la majorité des cosmétiques destinés aux enfants précisera si leur pH est neutre pour la peau (comprenez, situé entre 5 et 6).

Jeunes et jolis: pour ou contre les cosmétiques dès le berceau?
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Éviter les parfums

Le docteur Ultee recommande par ailleurs avec insistance les formules non parfumées, et ce à tous les âges. « Ce n’est pas évident, car huit produits pour les kids sur dix contiennent des fragrances », dont certaines peuvent être une cause d’irritations, d’eczémas et même d’allergies. La « gendarme des cosmétiques » (Cosmetics Cop) Paula Begoun, auteure de plusieurs ouvrages consacrés au sujet et fondatrice de Paula Begoun Skincare, préconise elle aussi de bannir à tout prix parfums et huiles essentielles des cosmétiques, pour tous les publics. « Comme les parfums synthétiques, les huiles essentielles dégagent une odeur parce que ce sont des substances volatiles. Cette propriété provoque des inflammations de l’épiderme, favorise la formation de radicaux libres et endommage le collagène. En plus, la majorité d’entre elles sont des perturbateurs endocriniens potentiels au même titre que les parabènes… alors qu’elles n’inquiètent pas du tout la plupart des utilisateurs. »

Dans l’UE, les cosmétiques légaux sont toutefois soumis à une réglementation draconienne (bien plus qu’aux Etats-Unis, par exemple). Le Comité d’experts sur les produits cosmétiques a également rédigé des directives européennes sur les substances à éviter le plus possible dans les produits de soins destinés aux enfants de moins de 3 ans, en particulier les allergènes, carcinogènes et perturbateurs endocriniens potentiels. En 2015, l’Union a aussi interdit, à titre préventif, l’utilisation des propylparabènes et butylparabènes dans les crèmes destinées aux petites fesses des bébés – si l’épiderme des enfants est globalement plus perméable que celui des adultes, c’est encore plus vrai pour la peau sensible de cette partie du corps.

« Sur la base des recherches disponibles, on pourrait affirmer qu’il n’est pas nécessaire de fuir les parabènes, nuance Jetske Ultee. Je comprends l’incertitude entourant ces produits, mais des cosmétiques dépourvus de ces substances ne sont pas toujours la meilleure solution, car ils contiennent parfois des agents conservateurs associés à un risque accru de problèmes cutanés comme le quaternium-15, l’extrait de romarin ou la méthylisothiazolinone, déjà interdite dans les produits qui restent sur la peau et les lingettes humides. Regardez donc toujours la liste des ingrédients d’un oeil critique. » Après tout, pourquoi vouloir camoufler la délicieuse odeur de la douce peau de bébé?

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