Nancy Lahoud, influenceuse @theguide_brussels: « Bruxelles est très, très belle »
Avec son compte theguide_brussels aux 100 000 abonnés sur Instagram et 69 400 sur TikTok, la Libanaise Nancy Lahoud (34 ans), devenue Bruxelloise de cœur, découvre et redécouvre la capitale comme seule une jeune femme sans a priori peut le faire. Tout l’étonne, tout l’enchante, ou presque.
La guerre
Personne ne peut comprendre la guerre. Sauf quand on l’a vécue. Je suis née à Beyrouth en 1988, j’avais 2 ans quand la guerre civile s’est terminée, je ne m’en rappelle pas vraiment, à part les trous d’obus dans les murs de notre appartement à Bourj Hammoud. Et la légende familiale veut que mes parents m’y aient un jour oubliée dans leur fuite lors d’un bombardement… Quand la guerre a éclaté à nouveau, j’avais 17 ans. Je me suis enfermée dans ma chambre pendant un mois, je n’arrêtais pas de pleurer, je ne voulais pas que cela recommence, que nous revivions ces quinze ans de malheur.
Mon rêve
Découvrir le monde, il n’y a rien de mieux. Petite fille, je ne sais plus de quoi je rêvais mais à l’adolescence, j’étais accro à CNN, je voulais devenir reporter comme Christiane Amanpour. C’était vraiment une addiction, je la regardais tous les matins. En 2006, quand j’ai eu mon bac de Français, je me suis inscrite en journalisme à l’Université libanaise, mais la rentrée n’a jamais eu lieu parce que c’était la guerre entre Israël et le Sud-Liban. Et j’ai laissé tomber mon rêve de journalisme.
L’exil
Faire un métier doit servir une cause. J’ai été banquière pendant onze ans, à la banque franco-libanaise, mais cela faisait quelques années que je n’y étais plus heureuse – avant la crise économique, cela sentait déjà le cramé. Je ne voulais plus travailler dans ces institutions qui ont été malhonnêtes vis-à-vis des déposants, ni faire partie de ce système qui contribue à rendre les voleurs plus riches et les pauvres plus pauvres. Mais si je critique la gestion de mon pays, cela ne veut pas dire que je ne l’aime pas, pour moi, c’est le plus beau des pays et j’aime sa culture… Mais il y a eu l’explosion du port de Beyrouth et cela a été un élément déclencheur. J’ai démissionné et trois jours plus tard, j’arrivais en Belgique; cinq jours après, je commençais mon Instagram. Je me suis réinventée ici. J’ai juste regardé devant moi, je n’ai surtout pas regardé derrière.
‘Je n’ai pas peur de ce qui est différent de moi, au contraire.’
Etre soi-même
Sur les réseaux sociaux, la critique est facile. Au début, sur Instagram, je ne me montrais pas, j’ai été anonyme pendant un an. Parce que je ne savais pas à quoi m’attendre, je n’étais pas prête à supporter des insultes. Je ne voulais pas m’exposer, j’avais peur. Encore aujourd’hui, une de mes insécurités quand je poste, c’est mon accent et le fait que je ne parle pas le slang. Mais après tout, il faut être soi-même. Et tout le monde sait que je ne suis pas née ici, je pense que je suis excusée.
Bruxelles ma belle
Bruxelles est très, très belle. Je me rappelle quand j’y suis arrivée par l’avenue Louise, pour la première fois, ça a été le coup de cœur. Je me suis dit: «Waouh!» J’ai posé mes valises, j’ai rangé un peu et j’ai marché vers le centre, en passant par le Sablon et la Grand-Place. Je pensais: «How stylish is it!» Et j’ai pris l’habitude d’aller me balader là chaque matin, c’est my morning walk. Que demander de plus? Je ne voudrais pas vivre à New York, ni à Tokyo, la slow life, cela me convient. Je ne suis pas naïve, et mon coup de cœur dure. Je marche dans les rues, je regarde le ciel, les gens, l’architecture, et je me dis que j’ai de la chance de vivre ici. Il y a tant de choses que vous n’appréciez pas parce que vous n’en avez pas connu d’autres… Ici, on peut traverser la rue sans problème simplement parce que l’on y respecte le code de la route!
Vive la différence
Il ne faut pas avoir peur d’aller voir ailleurs. On prétend que certains quartiers de la ville sont dangereux mais il ne m’est jamais rien arrivé, alors que je suis la personne qui se déplace le plus dans la ville et en transports en commun! On est ennemi de ce qu’on ne connaît pas, dit-on, mais je n’ai pas peur de ce qui est différent de moi, au contraire. Peut-être est-ce parce que j’ai habité dans un quartier pauvre mais que j’allais dans une école riche et que j’ai vécu dans un pays avec 18 religions différentes. Je n’ai pas de barrière, pas de cliché et j’aime dire que tout Bruxelles est à vous.
Vivre
Je veux juste vivre des expériences. A la toute fin, c’est de cela dont je me souviendrai. Je me rappellerai de ce qui m’a fait rire et de ce qui m’a impressionnée.
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