Sophie Lauwers, une femme à la tête de Bozar
On connaît le nom du nouveau directeur du Louvre. Et pour la première fois de son histoire, c’est une femme, Laurence des Cars. Dans la foulée, à Bruxelles, Bozar accueille sa première directrice générale, Sophie Lauwers. Plus qu’un symbole, une victoire.
A Bozar depuis 2002, d’abord comme coordinatrice puis comme directrice des expos, Sophie Lauwers est depuis novembre directrice générale de cette institution bruxelloise.
« Quelle belle nouvelle, cette nomination de Laurence des Cars à la direction du Louvre. Je ne la connais pas personnellement et j’ai très envie de la rencontrer. C’est une grande professionnelle ; elle est historienne de l’art, spécialiste du XIXe siècle et a occupé le poste de conservateur au musée d’Orsay pendant treize ans. Puis elle a dirigé le musée de l’Orangerie avant de revenir à Orsay, comme directrice. Elle s’y est distinguée par son engagement à ouvrir les collections à tous, notamment aux plus jeunes. Etre la première à accéder aux commandes du plus grand musée du monde est une victoire pour toutes les femmes… De mon côté, quand j’ai posé ma candidature à Bozar, c’était à la dernière minute. J’y ai été poussée et j’avais besoin de l’être. Parce que j’hésitais… On dit souvent qu’un homme avec 10% de qualités se lance avec l’aplomb de celui qui en aurait 90%. Pas une femme. J’avais besoin de confirmations de la part de mes amis. Je n’ai fait aucun lobbying, je voulais que l’on me choisisse pour mon expérience et ce que je peux représenter pour cette maison. Je me suis lancée par amour pour Bozar et pour les arts – j’ai passé la moitié de ma vie dans cette institution, elle m’a fait grandir. Certes, le monde a changé, la ville a changé, la concurrence – même si je n’aime pas ce terme – est forte. Mais nous avons une position unique, sur le Mont des Arts, et des qualités. A commencer par notre multidisciplinarité et par l’architecture de notre bâtiment. L’extérieur en est modeste, et j’aime cela. J’ai constaté que l’on arrive toujours plus loin avec la modestie. C’est un trait que je partage avec d’autres femmes: si on désire mettre en avant le projet, c’est comme une grossesse, on se met d’office à l’écart. J’ai le sentiment que l’on peut faire naître et aboutir des projets parce que l’on travaille en équipe, que l’on motive les gens, qu’on les inspire et les féconde.
Ma nomination est symboliquement importante pour toutes les femmes: elle montre que c’est possible. Je suis certes la première femme CEO de Bozar mais je ne suis pas la seule. Il y a notamment Carmen Willems et Jacqueline Grandjean, aux musées royaux d’Anvers, Kasia Redzisz, directrice artistique de Kanal, et Laurence des Cars bien sûr… Je ne pense pas être un argument marketing. Je n’ai pas eu l’impression que l’on m’ait nommée parce que j’étais une femme. Mais c’est une décision importante. Par le passé, j’étais contre les quotas. J’ai changé d’avis, en ce qui concerne le genre mais aussi pour la diversité et l’inclusion. Nous souffrons d’un manque de représentation et de visibilité, le plafond de verre existe encore. Je suis positive et constructive, même si nombre de choses me font peur, la polarisation notamment. L’art ne sauvera pas le monde, j’aimerais le penser, mais je sais que ce n’est pas tout à fait réaliste. Cela dit, on a beaucoup à apprendre des artistes: ils voient ce que nous ne voyons pas, ils peuvent nous transmettre des choses que nous ne comprenons pas d’emblée. Je désire remettre l’imagination au centre, l’émerveillement aussi. »
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