Cimetière, parc et monument à la fois: le délicat équilibre du Père-Lachaise (en images)
Plus d’animaux et d’herbes folles, toujours autant de touristes, une poignée d’emplacements libres très prisés… Après la parenthèse du Covid-19, le cimetière du Père-Lachaise à Paris cherche à concilier des usages parfois contradictoires, tout en conservant son aspect pittoresque.
Du belvédère où les touristes profitent d’une pause sur un banc pour admirer la vue sur Paris, des visiteurs dégringolent l’escalier et se dispersent dans les allées, plan à la main, dans l’incertitude d’être sur le bon chemin. Quelques mètres plus bas, le « Chant des partisans » retentit pour clore une inhumation à laquelle assiste un groupe. Une scène habituelle au Père-Lachaise, où une douzaine d’agents d’accueil voient passer chaque jour 7.000 personnes en moyenne. Malgré l’affluence, le respect et la quiétude attendus sont de mise.
Faire cohabiter les publics
Finie, l’époque des confinements où les agents devaient faire la chasse aux pique-niques et aux enfants qui jouent, où la police avait interpellé six exhibitionnistes… Même si une dizaine de joggeurs quotidiens, et quelques cyclistes aventureux, doivent toujours être rappelés à l’ordre. « Tout l’enjeu, c’est que les publics cohabitent et qu’il y ait le moins de frictions possibles », résume le conservateur Benoît Gallot, en poste depuis 2018.
Jim Morrison, Oscar Wilde, Edith Piaf, Molière et La Fontaine, ou plus récemment Gaspard Ulliel… Après la parenthèse de la crise sanitaire, le lieu de repos des célébrités, aménagé au XIXe siècle et partiellement classé aux monuments historiques, a retrouvé ses 2 à 3 millions de visiteurs annuels, souvent perdus parmi les 70.000 sépultures. Et ainsi, son titre officieux de cimetière le plus visité au monde.
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Renards stars
Mais depuis le Covid-19, ce qui est aussi le plus grand parc de la capitale – mis à part les bois de Boulogne et Vincennes – avec 43 hectares abrite une colonie de renards, dont la découverte a fait la gloire de Benoît Gallot sur les réseaux sociaux. Le conservateur les scrute depuis son logement de fonction, puis part à leur recherche une fois les visiteurs ramenés tant bien que mal à la sortie. Renardeaux, fouines, mésanges: ses clichés reflètent les efforts fournis pour la « renaturation » du site.
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En 2015, la mairie a d’abord interdit l’emploi de tout produit phytosanitaire dans les cimetières parisiens. Pissenlits, orchidées sauvages, luzernes ou trèfles ont alors fait leur réapparition dans certaines allées vidées de leurs dalles ou laissées en friche, hormis une petite bande tondue pour laisser l’accès aux tombes, tandis qu’un gazon plaqué au sol a remplacé le gravier sur certains trottoirs. Des « mètres carrés (de verdure) précieux gagnés au final » à l’heure des canicules, justifie Benoît Gallot, qui a dû faire face aux « plaintes des familles » jugeant les abords des tombes mal entretenus. Pour trouver cet « équilibre » entre le besoin de recueillement et « le retour de la nature », la vingtaine de cantonniers préfère laisser pousser dans des divisions sans tombe récente, explique le patron du cimetière.
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Priorité au végétal
Quant aux arbres dits « nécrophages » qui poussent à l’intérieur des tombes à l’abandon, dévorant stèles et grilles, « on ne va pas abattre l’arbre pour revendre le terrain, on va le laisser vivre », assure M. Gallot. Les 4.000 arbres du cimetière posent pourtant bien des problèmes, avec « une dizaine de tombes endommagées à chaque tempête », selon M. Gallot. Et les abattages décidés « à contre-coeur » peuvent parfois « durer une semaine voire deux », sur un terrain escarpé et dense où les nacelles ne peuvent pas accéder.
Surtout visibles dans la partie sud du cimetière, la plus ancienne, les dégâts des derniers orages se règlent entre les familles, les services juridiques de la mairie et les assurances.
Cette priorité donnée au végétal ne passe pas inaperçue. « Il y a beaucoup plus de nature qu’avant, plus de feuillages, des allées plus sauvages », remarque Florence Masson, 44 ans, de retour deux décennies après une première visite. Luc Morel, retraité venu d’Avignon (sud), repart « déçu » en grommelant, notamment parce que « beaucoup de tombes sont mal entretenues ».
« Le côté anarchique du cimetière fait aussi partie des lieux », défend Benoît Gallot, qui réfléchit à de nouveaux moyens financiers pour restaurer les tombes à l’abandon. Notamment via de nouveaux occupants, avec une restauration aux frais de la famille, dans un cimetière prisé où l’on s’arrache une centaine d’emplacements relotis chaque année.
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