Croisière insolite au creux du Rhin, en mode slow tourisme
Partir à la découverte du plus célèbre fleuve d’Europe rhénane en combinant navigation et vélo: la formule, séduisante, répond à une envie d’évasion très en vogue. Plus lente, plus simple, plus douce.
Pour certains, naviguer en suivant le fil tranquille du Rhin peut sembler un brin trop contemplatif. C’est la raison pour laquelle la compagnie CroisiEurope, spécialisée dans les trips fluviaux, a lancé une formule plus dynamique: un combiné croisière et vélo. Une escapade qui transforme le parcours classique en découverte approfondie des pays et des terroirs. Nul besoin d’être un champion pour y prendre part: tout au long de la semaine, le voyageur-cycliste avance sur des routes paisibles, sans grands dénivelés, le long de paysages magnifiques et à travers de véritables villages de carte postale. Aussi, les coups de pédale au bord de l’eau ne donnent jamais l’impression d’exiger le moindre effort…
La France éternelle
La croisière démarre à Bâle, non loin de la source d’un Rhin déjà bien large et puissant. Au loin, s’étend la plaine d’Alsace, terrain de jeu de la première étape cycliste qui, au départ de Vieux-Brisach, suit d’abord une longue piste cyclable ombragée avant de rapidement serpenter à travers les vignes, reliant les hameaux aux maisons de poupées s’égrainant le long de la célèbre Route des Vins. Les vélos, légers et confortables, permettent d’avaler sans trop de peine la seule grosse côte du voyage: une coriace grimpette au milieu des raisins, entre Ribeauvillé et Riquewihr. La récompense? Une vue plongeante depuis les coteaux sur les remparts et les toits de l’un des plus beaux villages de France.
Tandis que le MS Douce France II poursuit sa route sur le fleuve, les cyclistes ont le choix entre un itinéraire court ou une étape plus fouillée, permettant tantôt une découverte culturelle, tantôt une visite de cave. Avec, comme décor, le joli canal de Colmar. Notons que les montures sont équipées de GPS programmés avant chaque circuit du jour. Des ravitaillements, eux, sont assurés tous les vingt kilomètres, tandis qu’un véhicule garantit une assistance rapide en cas de souci mécanique… ou physique. Au volant, Killian et Flavien connaissent les escapades comme leur poche, ainsi que les plus beaux endroits pour pique-niquer.
La vallée romantique
Après les vignobles, dès le lendemain, le rythme et le décor changent radicalement. Une première halte à Strasbourg permet notamment de pédaler jusqu’à sa majestueuse cathédrale. Le bateau pénètre ensuite en Allemagne pour aborder l’un des tronçons les plus célèbres du fleuve, là où le Rhin se fraie un chemin à travers des montagnes de schiste, entre châteaux haut perchés et vignobles escarpés, plantés jusque sur les pentes les plus raides. L’itinéraire cycliste du jour emprunte en grande partie le chemin de halage qui longe le fleuve. Un tracé inclus dans la Véloroute Rhin qui s’étire des sources jusqu’à l’embouchure sur 1.230 km, offrant des surprises renouvelées à chaque méandre. La section entre Bingen et Coblence est incontournable, empreinte d’une aura mystérieuse à l’approche de la Lorelei, énorme roche aux flancs presque verticaux. Le Rhin se fait alors étroit et sournois. Seuls les marins confirmés sont capables de franchir ce passage en évitant les récifs, en affrontant ses courants violents, mais aussi, dit-on, le chant de la sirène.
Le défi est relevé haut la main par notre équipage, qui dépasse le mythique rocher en même temps que le groupe cycliste. Au loin, apparaît déjà la petite ville médiévale de Sankt Goar, dominée par son imposant château qui constituait jadis la plus puissante forteresse du Rhin. Puis se profile Boppard, site magnifique s’il en est, blotti au fond d’un méandre. La pause est inévitable face aux tours de l’église Saint-Séverin. De l’autre côté du bourg, on peut encore découvrir une partie du rempart romain. L’étape du jour s’achève à Coblence, à la confluence du Rhin et de la Moselle, sur cette agréable langue de terre appelée « Deutsches Eck » dominée par la monumentale statue équestre de l’empereur Guillaume Ier. Un vrai bonheur que de circuler sur ces jolies rives plantées de jardins. Coblence se démarque aussi par plusieurs édifices contemporains assez réussis. Ainsi, le Musée du Rhin moyen, un élégant vaisseau de verre, abrite plusieurs collections de peinture, mobilier, textile, armes… retraçant 2.000 ans d’histoire de la région.
De Cologne à Arnhem
Plus tard, alors que le fleuve s’élargit toujours plus, le MS Douce France II accoste les quais de Cologne, pour le départ d’une étape cycliste qui nous amènera jusqu’à Düsseldorf. Anecdote glanée et insoupçonnable: la cathédrale de Cologne attire plus de visiteurs que le palais de Versailles et quasi autant que la Tour Eiffel. Avec ses 142 mètres, elle est d’ailleurs longtemps restée la plus haute construction d’Europe, jusqu’à ce que la tour parisienne de 157 mètres ne lui ravisse le titre. Dès la sortie de la ville, le Rhin s’immerge à nouveau dans des paysages verdoyants. La bonne nouvelle, c’est qu’au fur et à mesure du voyage, les corps se font plus entraînés et se mettent à avaler les kilomètres avec aisance…
Notre bateau longe ensuite la Ruhr – qui ne faillit pas à sa réputation de région dense et industrielle – avant d’aborder les Pays-Bas. Passé la frontière, le fleuve devient delta et se divise en plusieurs gigantesques bras dont les deux principaux, le Waal et le Rhin inférieur, prennent deux directions fondamentalement différentes. Pour rejoindre Amsterdam, c’est le second bras qui se justifie. Comme dans les compétitions officielles, les cyclistes ont droit à un jour de repos, consacré à la visite du musée en plein air d’Arnhem. Un écomusée plus que centenaire qui retrace de façon vivante la vie d’antan. Ses maisons et bâtiments ont été acheminés de tout le pays afin de reconstituer un grand village où oeuvrent des artisans en costumes d’époque. Le charron, le forgeron, le charpentier de marine, le meunier et les fermiers accueillent les visiteurs dans leurs chaumières et leurs jardins. Certains réclament même un petit coup de main…
Au pays de la petite reine
Un fleuve assoupi poursuit sa route vers la mer, même s’il faut à présent le laisser derrière nous pour remonter via un canal vers la capitale néerlandaise. Notre hôtel flottant s’amarre en bordure de l’une des pistes cyclables les plus fréquentées de la ville, qui relie la gare centrale toute proche. On le sait, les Néerlandais sont des inconditionnels de la petite reine. Une expression que l’on doit à la passion précoce que vouait la toute jeune reine Wilhelmine pour les deux-roues: du haut de ses 10 ans, elle adorait se promener dans les rues d’Amsterdam sur son vélocipède. C’est donc sur ses traces que démarre la dernière étape de cette odyssée. Ici, on s’efface dans un flot de cyclistes qui empruntent de véritables autoroutes leur étant destinées, franchissent les canaux via des ponts interdits aux 4-roues et utilisent même le ferry pour traverser les voies d’eau plus larges…
Direction, enfin, la petite ville d’Edam, à une vingtaine de kilomètres au nord d’Amsterdam. Un intense vent marin s’invite à notre promenade, mais circuler à vélo est ici un délice: les pistes cyclables sont larges, parfaitement entretenues et signalisées, même au plus profond des campagnes. Edam est l’archétype de la ville idéale « à la hollandaise »: de taille humaine, elle séduit d’emblée par les charmes de son petit centre entrecoupé de canaux autour desquels se répartissent des rues bordées d’édifices historiques. Une belle et agréable conclusion, pour un voyage dont on se souviendra longtemps grâce à sa formule inédite et l’incroyable variété des chemins parcourus. Une parenthèse au grand air, à la fois conviviale et bucolique, que seule la « mobilité douce » est capable d’ouvrir…
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Y aller p>
CroisiEurope, compagnie réputée pour le confort de ses bateaux et la qualité de ses repas, propose une formule « tout inclus » (boissons, excursions, randos cyclistes, etc.) qui évite les mauvaises surprises. Les étapes à vélo sont de longueur variable, s’échelonnant entre 18 km (visite de Strasbourg et environs) à un peu plus de 80 km, tout en restant modulables. Notons aussi que d’autres croisières cyclo-fluviales figurent au catalogue: le Danube, la Gironde, la Loire et le Rhône, mais aussi, depuis cette année, sur des voies navigables plus confidentielles comme la Marne, le canal de Bourgogne ou le canal latéral de la Loire. p>
A lire p>
Le guide Lonely Planet L’essentiel de l’Allemagne reprend de façon complète toute la section du Rhin romantique et les villes allemandes évoquées dans ce reportage. p>
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