Destination la Laponie suédoise, pour frissonner au pays des Samis
A l’extrémité nord de la Suède, s’étend une Laponie connue pour son soleil de minuit, ses aurores boréales, ses éleveurs de rennes et ses contrées couvertes de neige jusqu’au printemps. Le terrain de jeu idéal pour les férus de grand air, d’expériences insolites et même de découvertes culturelles.
« Vous verrez, ce n’est pas difficile, il suffit de trouver le bon rythme de glisse, un pied puis l’autre, sans essayer de marcher. » Pour Anette Niia, l’exercice est un jeu d’enfant: les lattes constituent son principal moyen de locomotion une bonne partie de l’année. Entre la ferme familiale d’élevage de rennes en pleine campagne, son bureau de production audiovisuelle en ville, son laboratoire de photographe, les écoles et espaces culturels où elle s’attache à perpétuer les traditions et la langue de son peuple, et l’accompagnement de visiteurs étrangers, notre guide parcourt chaque jour des dizaines de kilomètres en ski de fond. Pour nous, c’est une autre paire de manches… Ou de pantalons imperméables, pour résister aux chutes dans la neige épaisse!
‘Une expérience où les énergies et la méditation se combinent parfaitement.’
Terre de lumières
En ce mois d’avril lumineux, elle couvre tout le paysage désert et vallonné d’un manteau blanc immaculé. Les plaines et les montagnes, les bois et les rivières, les routes et les maisons… Ah non, pas de maison dans notre champ de vision. Seulement quelques cabanes de pêcheur en rondins (ou de chasseur, c’est pareil ici) accrochées aux berges du lac… que nous traversons allègrement avec ce mouvement de balancier typique des skieurs nordiques (c’est plus facile sur terrain plat). Nous sommes à 200 km du cercle polaire et la glace est encore assez épaisse en ce début de printemps, non seulement pour supporter notre poids, mais aussi celui des motoneiges dont les innombrables traces s’entrecroisent – tel est l’autre principal moyen de déplacement une bonne partie de l’année dans la région.
Bien moins connue et visitée que sa voisine finlandaise, popularisée par le tourisme lié au prétendu domicile du Père Noël, la Laponie suédoise offre encore ce mélange de tranquillité et d’authenticité qui rend certains voyages exceptionnels. Particulièrement au sortir de l’hiver, quand il fait jour jusqu’en soirée au pays du soleil de minuit, que la vie animale reprend son cours et qu’il fait encore assez froid pour profiter des joies de tous les sports et activités qui se pratiquent idéalement l’hiver. Le pays des Samis – nous les appelons Lapons mais le terme est en réalité péjoratif car il évoque la pauvreté en suédois – couvre le quart septentrional de la Suède aux frontières de la Norvège et de la Finlande. Ses habitants, dont les spécificités ethniques et culturelles sont aujourd’hui reconnues par les gouvernements des trois pays sur lesquels s’étend leur territoire, vivent d’abord de l’élevage et de la pêche, ensuite du tourisme. Surtout national: la région abrite une partie des 250 stations de sports d’hiver du pays.
Chiens, rennes et élans
En arrivant à Kiruna et tout au long de votre séjour, vous aurez peut-être la chance d’apercevoir une aurore boréale, la région y est propice vu sa proximité avec le pôle et l’absence de pollution lumineuse qui règne en ces contrées isolées. Surtout si vous suivez les pas du photographe Jove Guttorm, le mari d’Anette, qui organise des safaris photo thématiques dans toute la Laponie. Nous avons passé une nuit en sa compagnie au bord d’un lac gelé – il y en a beaucoup dans le coin… – cerné de montagnes pour profiter du spectacle stellaire. Grandiose. Avis aux amateurs, l’activité se pratique aussi en motoneige. Un engin qu’il faut au moins avoir essayé une fois en raid diurne, tant il se joue des terrains les plus accidentés pourvu qu’ils soient assez enneigés. Sportif et décoiffant, mais à la portée de tous.
Le lendemain, lever presque aux aurores pour pratiquer une autre activité-phare qui constitue, elle aussi, un mode traditionnel de déplacement sami: la randonnée en traîneau à chiens. On ne se contente pas de se laisser tirer, on apprend réellement à soigner et à diriger les huskys, à dialoguer avec eux pour une expérience où les énergies et la méditation se combinent parfaitement, puisqu’on partage un attelage à deux. Alternance promise entre l’excitation et la concentration de la conduite puis la relaxation quand on se laisse piloter assis dans le traîneau. Bien protégé par des vêtements adaptés aux conditions polaires, on glisse au coeur du parc national d’Abisko à travers bois, sur des rivières gelées, dans un relief montueux, avec vue imprenable sur le mont Kebnekaise, point culminant des environs.
Nous sommes en pleine nature sauvage et que l’on se promène en traîneau, en raquettes ou à skis de fond, il n’est pas rare de croiser des élans, des rennes, des renards polaires et d’autres animaux arctiques, dont de nombreux oiseaux qui entament leurs couvées. Nous avons longtemps suivi les traces d’un glouton, sans parvenir à trouver ce carnivore vorace. Après un après-midi d’activités revigorantes, joues rouges et poumons frais, nous nous sommes posés sur des peaux de rennes au bord de la rivière pour déguster un thé chauffé à même le sol, sur un brasero improvisé, et de délicieuses sucreries locales confectionnées par Anette. Et finir la journée dans cette immensité paisible avant de s’offrir un dîner dédié à la viande… de renne, bien sûr, dans l’un des excellents restaurants gastronomiques de la ville voisine. En guise d’apéro, rien de tel qu’un sauna suivi d’un Jacuzzi extérieur, verre à la main sous une température ambiante de -5 à -10 °C et le soleil couchant, avant de se rouler dans la neige pour fouetter notre circulation. Ici, le terme de « vie au grand air » n’est jamais usurpé.
Dans la peau d’un éleveur
La petite ville de Kiruna, 18 000 habitants, offre bien d’autres attraits. Elle est bâtie sur la plus grande mine de fer du monde, en partie à ciel ouvert, en partie souterraine, que l’on peut visiter. Son exploitation depuis la fin du XIXe siècle a eu raison de la stabilité du terrain, au point que les habitants sont progressivement contraints d’abandonner leurs maisons pour s’établir dans une ville nouvelle construite quelques kilomètres plus loin. Elle constitue aussi un foyer vivant de la culture sami, peuple nomade aujourd’hui partiellement sédentarisé. L’une des meilleures façons d’appréhender leur mode de vie consiste à passer une journée en compagnie d’une famille d’éleveurs de rennes – rares sont d’ailleurs celles qui n’en possèdent pas, on compte en Laponie plus de ces cervidés que d’habitants.
Au coeur de Sápmi, comme les Sami désignent la Laponie, on comprend mieux à quel point la vie de ce peuple acclimaté aux rudes conditions polaires est intimement liée à celle de son animal fétiche, dont il tire ses moyens de subsistance. Lait, viande, peau, os… Rien ne se perd chez le cousin européen du caribou, bien plus facile à domestiquer. Il vit en immenses troupeaux qui se déplacent au gré des huit saisons que l’on distingue ici vu les fréquentes variations du climat, mais peut aussi être dressé à l’attelage. On le vérifie en jouant au Père Noël dans une course de traîneau à rennes, avant d’assister nos hôtes au nourrissage des bêtes puis de visiter le village pour découvrir comment les autochtones vivent aujourd’hui, entre traditions et modernité. Certains portent encore le « kofte » au quotidien, ce costume typique dont les motifs colorés indiquent l’origine géographique de son propriétaire.
Autre ambiance, autre décor: les amateurs ne quitteront pas la Laponie sans s’adonner aux joies du ski alpin dans l’une des stations qui émaillent toute la région et n’ont rien à envier à leurs cousines alpines en termes de qualité de neige – surtout qu’ici, elle est garantie jusqu’à la fin du printemps, voire en été. Pas besoin de monter très haut, la plupart des domaines culminent à 1 000 ou 2 000 mètres, ce qui ne les empêche pas d’offrir des dénivelés de classe mondiale et des hors-pistes bien engagés – que l’on peut aussi rejoindre en hélicoptère. Le dépaysement réside dans les décors: ici, pas de pics acérés mais une alternance de montagnes enneigées, de forêts denses et de lacs gelés, dans lesquels on a littéralement la sensation de plonger lorsqu’on dévale une piste abrupte typique de la région. Jusque tard dans la journée.
En pratique
–Organiser
Grand connaisseur du Grand Nord, le voyagiste belge Bruno Van den Bossche a cofondé l’agence Nordic Inspiration Travel, spécialisée dans les voyages thématiques vers les pays scandinaves, les destinations arctiques et subarctiques comme la Laponie. Il se fera un plaisir de vous aider à organiser le voyage sur mesure qui vous ressemble. nordicinspiration.travel
–Y aller
Plusieurs possibilités de vols quotidiens en combinaison avec Brussels Airlines, Lufthansa et/ou SAS vers Kiruna via Stockholm. Entre 300 et 500 euros A/R selon la saison.
–Se loger & se restaurer
ICEhotel.
Avec ses 20 suites artistiques, son bar et sa galerie de glace, cet hôtel de Jukkasjärvi, à 15 minutes de Kiruna, exige une réservation un an à l’avance en période de vacances. Chaque hiver, artistes et maçons s’attaquent à d’énormes blocs de glace du fleuve Torne gelé afin de tailler les pièces. Possibilité de s’initier à la sculpture sur glace… jusqu’au printemps, où l’hôtel fond. icehotel.com
Camp Ripan.
Plus classique mais charmant, cet établissement familial est entouré d’une nature montagneuse et situé à 10 minutes de marche du centre-ville de Kiruna. Chambres confortables de style chalet et restaurant réputé pour sa cuisine dédiée aux spécialités et produits locaux. ripan.se
SPiS Mat & Dryck.
Une véritable institution, réputée pour la qualité de sa cuisine familiale et l’originalité de son décor. Le restaurant dispose aussi d’un bar branché, d’une épicerie fine dotée d’une grande variété de charcuteries et de fromages artisanaux, et d’une boutique à souvenirs. spiskiruna.se
Fjället. Dans la station de Bjorkliden, n’hésitez pas: cet hôtel est idéalement situé au bord des pistes et doté de deux restaurants, dont un gastronomique réputé dans toute la région. bjorkliden.com/boende/hotell-fjallet
—S’habiller en hiver
Le secret pour rester au chaud et à l’aise dans l’hiver arctique? Porter plusieurs couches de vêtements, en commençant par des sous- vêtements en laine (de mérinos idéalement). Une couche de base pour contrôler la chaleur et l’humidité, une couche intermédiaire pour garder la chaleur (veste polaire ou pull en laine épaisse) et une couche extérieure imperméable. Si les températures descendent très bas, tous les prestataires locaux d’activités extérieures vous prêteront aussi une combinaison thermique, des bottes et des gants adaptés.
—A ne pas manquer
De nombreux établissements comme le Camp Ripan proposent l’expérience complète d’un spa dont les traitements se basent sur les anciennes traditions médicinales suédoises et sami de la vallée de Torne. Vous recevez un seau comprenant un gommage aux feuilles de bouleau, des sels pour les pieds aux baies de genévrier, au citron et au sel marin, un gommage au café et une huile pour le corps à base d’huile de colza cultivée dans la région. A vous de jouer à votre rythme, en alternant enduisages et rinçages avec des immersions dans les bassins aux eaux parfumées.
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