En images: la renaissance du palais impérial de Berlin, un bâtiment très controversé
Symbole de puissance puis rasé, le château de Berlin dévoile mercredi son nouveau visage après des années de débats passionnés sur cette reconstruction du palais des rois de Prusse, encore aujourd’hui au coeur d’une polémique sur le colonialisme.
Avec ses imposantes façades surmontées d’une coupole baroque, le complexe trône au coeur de la capitale allemande, voisinant la célèbre Ile aux Musées. Coronavirus oblige, l’inauguration se déroulera de façon virtuelle alors que l’Allemagne vient de décider un confinement partiel pour combattre la deuxième vague de la pandémie.
Lancé en 2013, l’énorme chantier a été accompagné, un peu à l’image de l’aéroport international BER, par les controverses, les retards et un dépassement de son budget. La pertinence d’installer en ce lieu un musée contenant près de 20.000 pièces originaires d’Afrique, d’Asie ou d’Océanie, issues en grande partie des anciennes colonies, a dès le début fait polémique. L’édifice fut en effet jusqu’à la chute de l’Empire allemand, à la fin de la Première Guerre mondiale, la résidence principale des Hohenzollern, princes colonisateurs.
Les travaux ont par ailleurs coûté quelque 677 millions d’euros, soit près de 100 millions de plus que prévu à l’origine.
Soubresauts de l’histoire
Le château a épousé tous les soubresauts de l’histoire berlinoise très marquée par la Seconde guerre mondiale et la division entre l’Est et l’Ouest. Partiellement détruit par les bombardements alliés, ses vestiges furent rasés, après la défaite du IIIe Reich, par le pouvoir de la RDA communiste.
A sa place fut érigé le « Palais de la République », imposant bloc aux vitres fumées orange qui abritait le Parlement du régime et un centre culturel et de loisirs. Le « clone » du château historique, conçu par l’architecte italien Franco Stella, est doté aux trois quarts des mêmes façades baroques que l’original, dont les éléments les plus anciens dataient du 15e siècle, mais dont les parties principales avaient été érigées au tout début du 18e siècle. Derrière les façades refaites s’étendent quelque 40.000 m² d’un bâtiment moderne, également dédié à l’organisation de conférences.
La reconstitution du château a fait l’objet d’une violente controverse dans les années 2000, car elle a entraîné la destruction du Palais de la République, cher à de nombreux Allemands de l’est pour lesquels il symbolisait une part de leur histoire et de leur identité.
Une grande partie de l’espace du nouvel édifice est occupé par le Forum Humboldt, qui abrite essentiellement des collections issues du Musée ethnologique et du Musée d’art asiatique de Berlin. Leur déménagement devrait être achevé d’ici la fin 2021.
Bronzes du Bénin
A une semaine de l’inauguration, l’ambassadeur du Nigeria en Allemagne Yusuf Tuggar a jeté un pavé dans la mare en réclamant de nouveau le retour dans son pays de « Bronzes du Bénin », dont environ 180 doivent être exposés au musée l’an prochain.
Ces plaques avec leurs bustes et sculptures en laiton fabriquées entre le milieu du XVIe et XVIIIe siècle dans l’ancien Royaume du Bénin avaient été réparties dans plusieurs musées européens après le pillage du pays par les Britanniques à la fin du XIXe siècle. Le diplomate affirme avoir adressé « une lettre formelle » au nom de son pays à la chancelière Angela Merkel et Monika Grütters.
La fondation du patrimoine culturel prussien, qui gère les musées publics berlinois, assure de son côté « ne pas avoir pas reçu de demande officielle de restitution », mais être en contact « depuis longtemps » avec les autorités nigérianes pour trouver des solutions afin de montrer les oeuvres dans leur pays d’origine.
En Europe, la plupart des anciennes puissances coloniales ont lancé ces dernières années des réflexions sur la réappropriation de leur patrimoine par les anciens pays colonisés, surtout africains.
L’Allemagne a ainsi entamé en mars 2019 un projet visant à « identifier les oeuvres issues du contexte colonial dont l’appropriation a eu lieu de façon contraire à la loi ou éthiquement injustifiable », souligne-t-on au ministère des Affaires étrangères, une démarche devant ouvrir la voie à leur restitution.
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