La scandaleuse vie sexuelle de la nature dévoilée

Accouplement d’écureuils sur un arbre mort au Botswana. © Mathieu Pujol
Accouplement d’écureuils sur un arbre mort au Botswana. © © Mathieu Pujol

Homosexualité chez les lions, oiseaux polyandres, poisson clown transgenre… sans tabou et avec humour, l’exposition Sex-appeal, la scandaleuse vie de la nature, au Muséum de Toulouse (sud-ouest de la France), dévoile l’intimité méconnue de la biodiversité et bat en brèche les clichés.

« Lorsque vous offrez un bouquet de fleurs, vous offrez des organes sexuels (…) pistils et étamines », lance amusé Ali Akbari, chef de projet pour cette exposition inédite, démontrant que « l’humain n’a rien inventé en matière de pratiques sexuelles! »

Au sous-sol du muséum, une obscurité bleutée rappelle les profondeurs aquatiques où la vie est apparue. Une vidéo sur grand écran retrace l’union des premières cellules, origine de cette sexualité déterminante pour l’évolution des espèces, donc moteur de la biodiversité.

Puis des cercles concentriques mènent au coeur de la « sexualité discrète » des plantes. L’existence de leurs organes mâles, femelles ou hermaphrodites n’a été admise qu’au XVIIIe siècle.

Avant, les végétaux étaient symbole « de chasteté et de virginité » – en témoignent des tableaux, dont la nymphe Daphné métamorphosée en laurier pour échapper au désir d’Apollon – « toute une symbolique qui va contribuer à cacher leur sexualité », explique Ali Akbari.

Jusqu’au 7 juillet, l’exposition révèle le florilège d’odeurs et de stratégies déployées par les plantes pour séduire insectes ou animaux, qui les pollinisent.

Coasser de plaisir

Ainsi les savants se sont longtemps interrogés sur la fécondation de l’orchidée de Madagascar, Angraecum sesquipedale, son pollen semblant hors d’atteinte au fond d’un éperon de près de 30 cm.

l’Angrecum sesquipedale), Ile Aux Nattes, Madagascar

Ainsi les savants se sont longtemps interrogés sur la fécondation de l’orchidée de Madagascar, Angraecum sesquipedale, son pollen semblant hors d’atteinte au fond d’un éperon de près de 30 cm.

« La sexualité ne se réduit pas qu’à la reproduction »

En fait, elle a comme « assistant » le sphinx Xanthopan morganii praedicta, papillon nocturne muni d’une fine trompe assez longue pour atteindre le nectar. Le mystère, qui intriguait Charles Darwin, ne sera élucidé qu’en 1903, 21 ans après la mort du naturaliste britannique.

Chauve-souris sérotine en érection François Pons © Muséum de Toulouse
Chauve-souris sérotine en érection © François Pons/Muséum de Toulouse © François Pons © Muséum de Toulouse
Os péniens de blaireaux, putois, renards, ours paresseux et ours bruns.
Os péniens d’ours, de putois et de blaireaux © François Pons/Muséum de Toulouse © François Pons © Muséum de Toulouse

Puis l’exposition, qui s’étend sur 300 m2, aborde la « sexualité bestiale » des animaux, leurs mille et une façons de séduire – chants, danses, joutes – et de s’accoupler.

« L’idée était de traiter de la biodiversité sous un angle inattendu, surprenant », précise à l’AFP Isabel Nottaris, directrice adjointe du muséum, sur fond de bande sonore de cris, rugissements ou coassements de plaisir des bonobos, des lions ou des grenouilles car « la sexualité ne se réduit pas qu’à la reproduction ».

Le risque étant de tomber dans le graveleux ou le trop aride, le thème est abordé « sous un angle poétique, esthétique et sensible, avec la petite dose d’humour nécessaire, tout en ayant un propos scientifique parfaitement vérifié », note-t-elle.

Un recoin « Classé X » lève ainsi le voile sur le kamasutra animal et des positions étonnantes, comme des papillons formant un losange en s’unissant par leurs parties postérieures.

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« C’est un aspect de la biodiversité dont on ne parle pas beaucoup. C’est très intéressant. Je n’avais jamais rien vu de pareil! », se félicite une visiteuse, Alba Gomez, 26 ans, étudiante en Sciences environnementales à Murcie (Espagne).

Bijoux cachés

En préparant l’exposition, l’équipe s’est penchée sur des planches botaniques anciennes, des gravures, et a découvert des « pépites », comme un coït d’éléphants en « position, très humaine, du missionnaire », se souvient Isabel Nottaris en riant.

Derrière une vitrine, barrée de bandes rouges simulant une grille, se dressent tels des sex-toys de couleurs vives toutes sortes de pénis: à piquants, en tire-bouchon, à quatre glands…

Il s’agissait de traiter autant les femelles que les mâles: près d’os péniens de différentes tailles sont exposés des os clitoridiens, présents seulement chez certains spécimens et minuscules.

« L’os pénien est largement étudié. Ce que l’on sait beaucoup moins, c’est qu’il existe des os clitoridiens et nous avons réussi à en trouver, qui n’ont jamais été exposés. C’est une première mondiale ! », dit Isabel Nottaris devant un « Baubellum » (bijou, en latin) présenté, avec d’autres, dans des écrins de velours noir.

Mais le mâle n’est pas toujours le plus grand, le plus fort. Ainsi l’argonaute: la femelle de ce mollusque dispose d’une vaste coquille où stocker les oeufs. Pour l’accouplement, le tout petit mâle est muni d’un « pénis missile », détachable, qu’il projette vers sa partenaire.

L’exposition montre aussi que des lions s’aiment quand les femelles sont à la chasse, que des oiseaux polygames construisent plusieurs nids, puis passent de l’un à l’autre, que les chauves-souris pratiquent le 69… en fait, que toutes les formes de sexualité sont dans la nature.

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