Royal Monceau: une certaine mélodie du bonheur

Royal Monceau © Reuters
Yoris Bavier

Pendant tout l’été, Le Vif Weekend visite les coulisses des palaces mythiques du Vieux Continent. Cette semaine, coup d’oeil sur un monument parisien qui a autant marqué la géopolitique mondiale que la carrière de Madonna.

Reconnaissable à sa splendide marquise en verre rouge qui baigne d’une étonnante lumière rubis bagagistes, voituriers et voyageurs, le Royal Monceau trône fièrement au numéro 37 de l’avenue Hoche, dans le très chic 8e arrondissement. Et ce, depuis 1928. Inauguré un caniculaire 1er août par Pierre Bermond et son associé André Junot – à qui on doit, en outre, le Miramar de Biarritz, celui de Cannes, le Carlton et le California de Paris -, cet antre de l’extravagance et du glamour, conçu par l’architecte Louis Duhayon, devient très rapidement le quartier général des intellectuels, des artistes et des célébrités : Ernest Hemingway, Maurice Chevalier, Joséphine Baker ou Walt Disney, pour ne citer qu’eux. Tous apprécient son service attentif et discret, son restaurant raffiné, niché entre deux jardins, son immense bar, ses salles de bridge, de tennis de table, de billard et ses salons particuliers qui servent de décor aux rencontres sociales et économiques de la IIIe République. Cette anecdote marque le début d’une histoire géopolitique riche – et pas toujours très rose. Durant toute la Seconde Guerre mondiale, l’hôtel est réquisitionné par des officiers de l’armée allemande. A sa libération, il accueille le général Eisenhower, le maréchal Montgomery et l’état-major des armées alliées. En 1947, à l’occasion de la conférence de Fontainebleau, Hô Chi Minh y séjourne sept semaines. L’année d’après, c’est David Ben Gourion et Golda Meir qui signent, entre ses murs, l’acte de création de l’Etat d’Israël.

Royal Monceau
Royal Monceau© Reuters

La prestigieuse bâtisse s’est également illustrée dans le domaine musical. Entre 1989 et 1992, Michel Polnareff y élit domicile et y enregistre son album Kâma Sutrâ. Certains affirment qu’il y serait resté 800 jours, sans mettre une seule fois le pied dehors ; d’autres sont persuadés que sa célèbre chanson Goodbye Marylou est dédiée à Marie-Louise, la standardiste. Au même moment (en 1990, pour être précis), à quelques mètres de là, Madonna déambule dans les couloirs pour filmer le sulfureux clip de Justify My Love. Au menu : sadomasochisme, homosexualité et voyeurisme ; le tout en noir et blanc. La reine de la pop frappe un grand coup, scandalise le monde et entre dans l’histoire : la vidéo devient la première création audiovisuelle bannie de la chaîne MTV. Plus tard, sur leurs pas, marcheront Michael Jackson, Britney Spears et les Spice Girls.

Royal Monceau
Royal Monceau© Reuters

Quatre-vingts ans après son ouverture, le designer Philippe Starck accepte le projet pharaonique de rénover l’hôtel qui fermera pour deux années de travaux après une apocalyptique, décadente et mythique  » demolition party « . Au terme de sa métamorphose, il rouvre ses portes sous les couleurs du groupe Raffles. Aujourd’hui, le Royal Monceau, c’est un label officiel  » palace  » (obtenu en 2013), 149 chambres et suites aussi poétiques qu’élégantes, une galerie et une librairie dédiées à l’art contemporain, son iconique Bar Long, trois restaurants (Matsuhisa Paris et ses propositions péruvo-japonaises ; Il Carpaccio et son étoile Michelin ; La Cuisine, ses petits déjeuners et ses brunchs d’exception), un club privé pour les amateurs de cigares, une salle de cinéma, un spa by Clarins, ainsi qu’une collection privée de plus de 300 oeuvres d’art et le service unique de Julie Eugène, Art Concierge – conseillère et médiatrice culturelle auprès de la clientèle, en somme. Si le palace parisien s’est assoupi, il demeure un haut lieu de rendez-vous et une adresse de prédilection pour les voyageurs les plus nantis.

Royal Monceau, 37, avenue Hoche, à 75008 Paris. www.leroyalmonceau.com Dès 800 euros la nuit en chambre double.

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