Le croissant XL, la gourmandise tout en démesure adorée par la Gen Z
Ah, le croissant, cette petite douceur pleine de beurre, de sucre et si réconfortante. Le cliché français par excellence. Tantôt fourrée, tantôt salée, ce n’est pas la première fois que la viennoiserie subit des mutations. Il y a quelques mois, elle a pris une nouvelle dimension avec sa version XL.
Que ce soit les viennoiseries maxi, les gourmandises hybrides ou encore les trompe-l’œil, une chose est sûre, les pâtissiers rivalisent d’inventivité pour séduire le public. Vincent Grégoire, expert en tendances à Paris, s’intéresse de près au croissant géant: « Les pâtissiers sont dans une course un peu folle à la créativité et la nouveauté. Comme il y a de la compétition, ils doivent régulièrement produire de nouvelles douceurs pour faire parler d’eux ».
Manger avec ses yeux
Des œuvres qu’on passerait plus de temps à admirer qu’à manger. Le moteur du monde sucré est avant tout le visuel, qui prime même sur le goût. « On goûte d’abord avec ses yeux », ajoute l’expert. « Ce n’est pas pour rien que depuis quinze, vingt ans, il y a une tendance de « food porn » sur les réseaux sociaux. La nourriture, c’est l’un des vocabulaires les plus importants de la jeune génération. Ils mangent du visuel. Essayez de photographier un pot-au-feu ou un osso bucco sur Instagram, ce n’est pas un succès assuré ».
Le célèbre Chef pâtissier Philippe Conticini a enflammé les réseaux sociaux avec son croissant géant. La pièce pèse près d’un kilo, est à partager entre huit à dix personnes et disponible pour la coquette somme de 32 euros. Certes, ça fait cher le croissant… Mais le succès de cette grande douceur n’est pas dû au hasard, il correspond parfaitement aux attentes des consommateurs. « Avant, les tendances se portaient sur les petites bouchées, les réductions, le XXXS. Aujourd’hui, il y a une véritable tendance au maxi. On va créer quelque chose d’énorme, d’oversize à partager en famille, entre amis. Dans une période de crise où les gens ont besoin de se faire plaisir, quelque chose d’exagéré, c’est très intéressant à promouvoir », analyse encore Vincent Grégoire.
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Viennoiserie photogénique
C’était le 7 avril dernier, lors d’une avant-première de « Challengers », que l’actrice Zendaya s’est vue offrir le fameux croissant de Conticini. D’abord perplexe, elle finit par prendre la pose avec la viennoiserie. Une vidéo qui a rapidement fait le tour des réseaux sociaux et qui relance la trend de plus belle. Vous l’aurez compris, les viennoiseries et autres douceurs sucrées sont donc maintenant conçues pour avoir un certain attrait sur les réseaux sociaux. Autrement dit, elles doivent être instagrammables. C’est le cas du croissant XL, il est viral, fait pour être consommé via les réseaux sociaux. Sur TikTok, les vidéos de personnes goutant cette fameuse viennoiserie comptabilisent des millions de vues. Viennoiserie qu’elle laissent généralement de côté après un croc.
« Les consommateurs veulent de la fantaisie dans le classique »
Cette quête de visibilité et de contenu instagrammable influence réellement nos choix alimentaires. Selon Vincent Grégoire, on fonctionne à l’imitation et on n’a pas envie de se faire exclure du paysage culturel et social. « Quand on voit beaucoup de fois la même information, au bout d’un moment ça nous donne envie de vivre l’expérience aussi. Il y a deux ans, le phénomène de la quequetterie (pâtisseries aux formes… suggestives, ndlr) était assez similaire. Ça marque le coup et ça amuse la galerie. De manière générale, les confiseries et le monde de la viennoiserie sont très investis sur les réseaux sociaux. Des aliments permettant de découvrir d’autres cultures comme les mochis, les ramens ou encore les bubble tea sont aussi très tendances », poursuit Vincent.
La folie des grandeurs
Étant donné qu’il s’agit d’un produit Instagrammable, TikTokable, ses consommateurs sont naturellement ceux des réseaux sociaux, donc les Millennials et surtout la Gen Z. « Ces jeunes générations, désireuses d’oublier le contexte anxiogène, veulent du plaisir, du sucre, de la gourmandise. Et, très important, ils veulent aussi faire du « show-off », explique Vincent Grégoire. Le monde de la pâtisserie l’a bien compris et se démène pour offrir un véritable spectacle à ses consommateurs. C’est notamment ce que fait Cédric Grolet dont les vidéos de créations trompe-l’œil cartonnent sur les réseaux sociaux.
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Une jeune génération pour qui, selon l’expert, l’argent n’est pas un problème. « Les jeunes peuvent être radins, trouver tous les moyens pour économiser mais à côté de ça, claquer un maximum d’argent pour un gros kiff. Dernièrement, on a organisé des tables rondes avec des Gen Z qui nous disaient qu’ils avaient des problèmes de fin de mois mais parallèlement qu’ils pouvaient acheter deux bubble tea par jour, allant de 7 à 10 euros. Ils sont prêts à mettre de l’argent à condition de pouvoir vivre une expérience collective, être dans la lumière. La nourriture c’est très puissant parce que ça leur permet de créer du lien social, culturel et générationnel », ajoute Vincent.
« Oui Oui Baguette »
Le croissant géant doit aussi sa réussite au fait qu’il part d’un produit culturellement iconique. « En ce moment, il y a beaucoup de questionnements sur l’identité française et donc on observe un retour aux valeurs sûres, à la tradition. Il y a aussi un retour aux clichés culturels, un peu accentué par des séries comme « Emily in Paris ». Ici, on prend le croissant, un classique, et on lui apporte un twist, ce qui lui donne un côté jeune et dynamique. Il ne faut pas vraiment inventer mais plutôt revisiter. Les consommateurs ne sont pas tellement dans la nouveauté pour la nouveauté car le trop expérimental les effraie. Ils veulent de la fantaisie dans le classique », explique Vincent.
Ce n’était qu’une question de temps avant que le croissant XL se développe à l’international. Il a entre autres élu domicile à Londres et, plus récemment, dans notre plat pays, à la boulangerie Fine Bakery à Bruxelles. Ce produit est le véritable chouchou des voyageurs, influenceurs et célébrités. « Le phénomène a aussi énormément été porté par les touristes, notamment les Américains. Rien d’étonnant dans le fait que ça leur plaise car après tout, chez eux, tout doit être « bigger than life » », conclue notre chasseur de tendances.
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