Il fut longtemps l’homme de l’ombre de l’empire Ottolenghi. Dans Boustany, son nouveau livre, le chef palestino-britannique Sami Tamimi (57 ans), coauteur de la Bible culinaire Jérusalem, rend un vibrant hommage aux traditions de sa patrie.
Il y a des souvenirs gustatifs qui restent ancrés en vous à jamais. Et qui peuvent même, dans certains cas, faire naître une vocation. Sami Tamimi a 6 ans lorsqu’il découvre pour la première fois l’alliance sucrée salée de la pastèque et du jibneh, un fromage de brebis maison.
«Nous avions quitté la chaleur de Jérusalem, en plein été, pour rouler vers des contrées plus fraîches, se souvient le chef palestinien. Nous avions fait halte près d’un ruisseau et nous nous étions baignés, mes frères et sœurs et moi, avant de déballer le déjeuner que ma mère avait préparé la veille. Même si j’étais encore très jeune à l’époque, j’ai l’impression de ressentir encore aujourd’hui le craquant de la pastèque sur ma langue.»
La cuisine, c’est une forme de méditation et d’évasion.
Sami Tamini
Boustany signifie «mon jardin» en arabe. Et c’est dans un joli coin de verdure justement que le coauteur du best-seller Jérusalem nous a donné rendez-vous en plein cœur d’Amsterdam. «Ce titre, c’est un hommage au jardin de mes grands-parents Hassan et Khanum. Un décor luxuriant et coloré que mon grand-père entretenait toute l’année avec passion. Je garde des souvenirs merveilleux de mes courses effrénées dans ce «boustan».»
Sami Tamimi a commencé son parcours culinaire dans les cuisines de Jérusalem, avant de se poser au Lilith, un resto branché de Tel-Aviv. Il a alors une vingtaine d’années. «Une Britannique propriétaire d’une boulangerie à Londres a demandé à me voir pour me remercier, raconte-t-il. Quand je lui ai dit que je songeais à m’y installer, elle m’a répondu: «Passe nous voir quand ce sera le cas, tu pourras travailler chez nous.»»
En 1997, à 29 ans, Tamimi traverse la Manche. C’est dans sa boulangerie qu’il rencontre Yotam Ottolenghi. «Avec le temps, une forme d’amitié s’est créée. Deux ans plus tard, quand Yotam a voulu ouvrir sa propre affaire, lui et son associé m’ont proposé de les rejoindre.» C’est ainsi que naîtra le label Ottolenghi duquel, depuis 2020, Sami Tamimi reste aujourd’hui associé de l’ombre.
«Quand je suis triste, je cuisine, c’est une forme de méditation, d’évasion, pointe encore celui qui a l’intention de faire entendre sa voix pour dénoncer ce qui se passe aujourd’hui dans son pays d’origine. J’entends souvent les gens dire qu’ils se sentent impuissants. Ma réponse, c’est qu’on peut toujours faire quelque chose.» Et cela peut passer par un hommage poignant à la Palestine de son enfance.
«Elle est au cœur de toute mon inspiration, insiste-t-il. Ce livre est ma manière d’exprimer ma gratitude pour le privilège d’y avoir grandi. J’ai quitté Jérusalem il y a vingt-huit ans, mais je l’appelle toujours ma maison. Tous mes souvenirs culinaires viennent de là-bas. Aujourd’hui, les Palestiniens voient leur territoire rétrécir sans cesse. J’ai ressenti l’urgence de tout consigner.» Pour que l’on n’oublie jamais.
Les recettes de Sami Tamini
- Beignets de couscous et yaourt au citron confit
- Fattouch
- Biscuits au citron et à la pistache
Les beignets de couscous et yaourt au citron confit
«Ce plat s’inspire du couscous à la tomate et à l’oignon de ma maman. Non seulement il est facile et rapide à préparer, mais il permet aussi de finir des restes de couscous. Avec un simple mélange d’ingrédients, votre couscous se transforme en de délicieux beignets, dorés à la perfection à la poêle. Ils sont croustillants et réconfortants, servis avec un yaourt au citron confit acidulé. Pour une version végane, il vous suffit de remplacer l’œuf par 1 à 2 cuillères à soupe supplémentaires de fécule de maïs, bien que les beignets aient une texture légèrement plus délicate et friable que la version à base d’œuf.»
Ingrédients
2 c à s d’huile d’olive
1 oignon de taille moyenne, haché finement (160 g)
1 c à s de concentré de tomates
1 c à s de pâte de poivrons rouges
1 poivron rouge, haché finement 4 grosses tomates mûres, coupées en dés de ½ cm (350 g)
3 carottes de taille moyenne, pelées et râpées grossièrement 150 g de couscous
22 cl de bouillon de légumes bouillant
1 œuf
4 c à s de fécule de maïs
1 c à s de zeste de citron bio
4 c à s d’huile de tournesol
Pour le yaourt au citron confit:
150 g de yaourt grec
1 c à s de citron confit, haché finement
1 c à s de câpres, hachées finement
1 c à s d’aneth frais, haché finement
1 c à c de feuilles de menthe fraîche, ciselées
sel et poivre noir au moulin
Préparation
- Commencez par préparer le yaourt au citron confit: mettez tous les ingrédients dans un bol de taille moyenne, avec ¾ de c à c de sel et un bon tour de moulin à poivre. Fouettez bien, puis couvrez et réservez au réfrigérateur.
- Versez l’huile d’olive dans une sauteuse de 30 cm de diamètre sur un feu moyen. Ajoutez l’oignon et faites-le revenir 5 min, en remuant souvent, jusqu’à ce que ce soit tendre, mais pas coloré. Incorporez le concentré de tomates et la pâte de poivrons rouges et laissez cuire 1 min. Ajoutez le poivron rouge, les tomates, 1 c à c de sel et un bon tour de moulin à poivre. Laissez cuire pendant 3 min. Ajoutez les carottes et faites cuire encore 3 min.
- Ajoutez le couscous dans la sauteuse et mélangez bien. Versez le bouillon chaud, remuez et couvrez. Baissez le feu et laissez cuire pendant 10 à 12 min, jusqu’à ce que le liquide ait été absorbé et que le couscous soit tendre et gonflé.
- Retirez du feu et laissez refroidir. Ajoutez l’œuf, la fécule de maïs et le zeste de citron et mélangez bien. Façonnez 12 à 13 galettes (de 60 g chacune), d’environ 6 cm de largeur et 3 cm d’épaisseur. Faites chauffer le four à 180°C (th. 6) en mode chaleur tournante et chemisez une plaque de papier cuisson.
- Faites chauffer l’huile de tournesol dans une poêle à frire ou une sauteuse antiadhésive sur un feu moyen-vif, puis faites cuire les galettes 3 min de chaque côté, jusqu’à ce qu’elles soient dorées. Débarrassez-les sur la plaque chemisée et enfournez-les pour 5 min, jusqu’à ce qu’elles soient brûlantes à cœur.
Servez chaud, avec le yaourt au citron confit et une salade.
Fattouch
«Difficile de résister à une salade qui associe des tomates gorgées de soleil en été, des concombres frais et des morceaux de pain dans une même assiette. Jouez avec les ingrédients, selon la saison ou ce qui se trouve dans votre réfrigérateur.»
Ingrédients
2 à 3 pains pitas complets rassis
350 g de tomates de plusieurs couleurs
1 grand concombre (300 g)
1 poivron rouge (150 g)
1 grosse gousse d’ail, écrasée
3 c à s de jus de citron
1 ½ c à s de vinaigre de vin blanc
1 ½ c à s de mélasse de grenade
4 c à s d’huile d’olive
½ c à c de graines de cumin, grillées et écrasées grossièrement
¾ de c à c de graines de coriandre, grillées et écrasées grossièrement
1 c à s de sumac, plus un peu pour saupoudrer
sel
120 g de radis, tranchés finement
1 gros échalion, tranché finement (70 g)
3 à 4 cébettes, ciselées finement
20 g de persil frais, ciselé finement
15 g de menthe fraîche, ciselée finement
10 g de coriandre fraîche, hachée grossièrement
Préparation
- Préchauffez le four à 180°C (th. 6) en chaleur tournante.
- Ouvrez les pains pitas en deux et disposez-les sur une plaque du four, en veillant à ce que les tranches ne se chevauchent pas. Mettez-les à griller dans le four pendant 10 à 12 min, ou jusqu’à ce qu’elles soient dorées. Retirez-les et laissez-les refroidir, puis rompez-les en petits morceaux de la taille d’une bouchée.
- Coupez les grosses tomates en quartiers de 1 cm et les petites en deux, puis mettez-les dans un grand bol. Épépinez le concombre et coupez-le en cubes de 1 cm, puis faites-en de même avec le poivron rouge.
- Ajoutez les ingrédients restants, à l’exception du pain. Saupoudrez de ¾ de c à c de sel, puis mélangez bien et assurez-vous que les légumes soient uniformément nappés de sauce.
- Avant de servir le fattouch, ajoutez le pain grillé et mélangez la salade. Parsemez de sumac et servez sans tarder.
Biscuits au citron et à la pistache (15 pièces)
«Les ma’akaroon du Moyen-Orient n’ont rien à voir avec les macarons français. La version orientale est traditionnellement préparée à partir de semoule, d’huile d’olive et d’anis et consiste en une cuisson par friture avant un bain dans du sirop de sucre. Voici une façon un peu plus saine de préparer ces biscuits au beurre, qui sont assez faciles à faire. J’aime en préparer une grande quantité et les offrir à Noël.»
Ingrédients
125 g de pistaches en poudre fine
125 g d’amandes en poudre
100 g de sucre semoule
½ c à c de mastic, moulu
¼ de c à c de levure chimique
sel
2 c à c de citron confit haché finement
1 c à c de zeste de citron
1 c à c de pâte de gousses de vanille
1 c à s de miel liquide
1 œuf, fouetté légèrement
15 g de beurre doux, à température ambiante
2 à 3 c à s de sucre glace, tamisé
- Mettez la poudre de pistaches, la poudre d’amandes, le sucre, le mastic, la levure chimique et ⅛ de c à c de sel dans un grand bol mélangeur. Remuez juste pour mélanger les ingrédients entre eux. Ajoutez le citron confit, le zeste de citron, la vanille, le miel, l’œuf et le beurre. Mélangez bien le tout, à l’aide d’une cuillère en bois ou d’une spatule. L’appareil doit être légèrement collant.
- Mettez le sucre glace sur une grande assiette et commencez à façonner des boules de pâte de la taille d’une noix, d’environ 30 g chacune. Roulez délicatement les boules dans le sucre glace, en vous assurant qu’elles sont enrobées de part et d’autre. Disposez-les sur une grande plaque chemisée de papier cuisson, en les espaçant bien. Couvrez la plaque et réservez au réfrigérateur pendant 30 min.
- Préchauffez le four à 175°C (th. 6-7) en chaleur tournante et mettez les biscuits à cuire pendant 10 à 12 min, jusqu’à ce qu’ils commencent à dorer. Laissez-les refroidir complètement avant de servir.
- Une fois façonnés, les biscuits peuvent être conservés pendant quelques semaines au congélateur, dans un récipient hermétique. Quand ils sont déjà cuits, ils se conservent cinq jours dans un récipient hermétique.
Boustany (34,99 euro) de Sami Tamimi chez Hachette
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