Trois recettes de Colombie: le chef Juan Arbelaez retourne à ses racines
Chef télégénique et entrepreneur habile, Juan Arbelaez publie son troisième livre, Recuerdame. Un voyage dans le pays qui l’a vu naître et lui a transmis un certain sens de la persévérance et d’une cuisine qui se partage.
Coriandre, piment, citron vert. Voilà en quelque sorte l’odeur de la Colombie pour Juan Arbelaez. « Ce mélange des trois arômes, coupés sur une planche et mélangés, me fait voyager chez moi. Je ferme les yeux et j’ai l’impression d’avoir 5 ou 6 ans et d’être dans la cuisine à côté de ma mère qui prépare l’aji, cette sauce typique que l’on mange avec beaucoup de plats. Ça me transporte. »
Un retour aux racines, pour ce natif de Bogota. Car avant la télévision (Top Chef, Quotidien…), avant le petit empire de la restauration, il y a une arrivée en France à 18 ans. Un hiver beaucoup trop froid pour la garde-robe emportée. Le cumul de plusieurs boulots. Il y a pas mal d’audace aussi, en demandant de passer l’examen de l’Institut le Cordon Bleu – où il préparait le repas des chefs – le jour où un élève ne s’y présente pas. Ou plus tard, en appelant Weimar Gomez, chef colombien alors en poste au George V, à Paris.
Une cuisine colombienne intense et colorée
Beaucoup de culot, encore plus de travail. « Il m’a donné cette grosse opportunité de pouvoir travailler dans des palaces. Mais si le fait d’être Colombien a créé un lien de sympathie, derrière, il fallait travailler le double pour montrer que ma place, je la méritais », se souvient celui qui insiste, dans un pays d’accueil qui célèbre surtout les succès, sur l’existence « de nombreux échecs et de coups durs ».
Il s’était fixé comme objectif d’ouvrir un restaurant avant ses 40 ans. Il a aujourd’hui 35 ans et dix ouvertures derrière lui. Pourtant, il faudra attendre Bazurto, inauguré en 2021 du côté de Saint-Germain-des-Prés (puis également à Tignes), pour voir la première carte 100% colombienne du chef. « Il fallait du temps. Je suis parti de Colombie et j’ai voulu apprendre la cuisine française ici. Je me suis retrouvé face à plein d’univers, à plein de pays, de cultures et de racines différentes. Je trouvais ça génial, et avec le temps, je revenais petit à petit chez moi. De plus en plus avec le mal du pays, aussi. A un moment, je me suis senti la maturité suffisante pour pouvoir faire un mix de tout ce que j’avais appris et de tout ce qui m’avait créé, qui est cette Colombie intense et colorée. »
Un livre comme compagnon de voyage
Cette énergie si particulière de son pays natal, c’est elle qu’il a voulu raconter dans Recuerdame. « Ce n’est pas juste un livre de recettes. C’est un premier compagnon de voyage en Colombie ; des paysages, des artisans, des artistes, de la danse, des histoires. C’est aussi Comuna 13, cet endroit qui était le plus dangereux au monde il y a quinze ans et où, aujourd’hui, on peut se balader tranquillement en découvrant une palette absolument incroyable d’artistes, graffeurs. »
Une histoire de passion et d’endurance qui fait écho à son parcours. On y retrouve à la fois la superbe adresse à ne pas manquer lors d’un voyage en Colombie et les bons gestes pour réussir ses empanadas. Celui qui a hérité son intense envie de cuisiner de sa mère et son grand-père transmet à son tour. « C’était un grand rêveur, un mec qui pensait que tout était possible avec l’envie, le travail acharné et je pense que ça, il me l’a transmis. On voit ma maman sur des photos au marché avec moi, mais lui, il est partout dans ce livre. D’ailleurs, il s’appelle Recuerdame, ça veut dire « souviens-toi de moi ». C’est aussi pour me souvenir un peu de lui. Se souvenir d’où l’on vient, de cette famille, de ces racines, de ce pays qui m’a formé et m’a endurci. »
Recuerdame, Carnet de cuisine de Colombie, par Juan Arbelaez, éditions First, 336 pages.
Ses recettes qui flairent bon la Colombie
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