Après des variantes au guacamole, au chimichurri ou encore à la sauce au poivre, McDonald’s Belgique dévoile une version de son burger Maestro à la truffe. Au boeuf ou au poulet, et accompagnée de frites truffées elles aussi si le coeur vous en dit, la proposition a de quoi surprendre. Mariage réussi ou insulte à la gastronomie? On a testé dès sa sortie et voici notre avis.
Le mail est arrivé un lundi tout gris, et pour peu, on aurait presque pensé « fishing » tant son sujet était incongru. « Pur plaisir chez McDonald’s avec les nouveaux Maestro Truffle Tina et Truffle McFlavor Fries ». Un burger à la truffe à la carte du géant de la restauration rapide aux célèbres arches jaunes? Vous comprendrez aisément qu’il nous ait fallu lire l’info deux fois pour y croire et la digérer.
S’il restait le moindre souvenir du temps pas si lointain où la truffe était un ingrédient d’exception, aussi rare que cher et réservé aux tables les plus raffinées, on oserait presqu’affirmer que son incursion à la carte du McDo ait définitivement achevé son obsolescence amorcée il y a un moment déjà. Huile d’olive, tapenade, sel et autre mayonnaise à la truffe ne sont plus l’apanage des chefs depuis belle lurette, et c’est précisément cette sauce particulièrement appréciée des gourmets soucieux d’apporter une touche de raffinement aux mets les plus basiques qui s’invite dans la nouvelle gamme de McDonald’s.
Dans le communiqué de presse arrivant son arrivée, la chaîne promet « une expérience culinaire inoubliable », rien que ça, grâce à « une mayonnaise onctueuse aromatisée à la truffe noire, véritable star de cette création, qui transforme chaque bouchée en un moment d’exception ». Vous comprenez que notre curiosité journaliste a été piquée, et qu’il nous a fallu en avoir le coeur net: au-delà de l’attrait marketing plutôt génial, bâti sur le contraste entre l’or noir de Toscane et le clown Ronald, et si c’était réussi? Si un burger à la truffe préparé en une centaine de secondes s’avérait gourmand et raffiné, d’autant plus alléchant qu’on se l’offre en menu dès 12.2 euros?
La truffe version McDonald’s
Voici comment on se retrouve au drive-in le jour de la sortie d’un nouveau burger McDo, presque parés à devoir jouer du frein parmi des hordes d’inconditionnels déterminés à y goûter en avant-première, mais l’arrivée de la truffe au menu n’a pas encore fait l’objet d’une campagne de matraquage, et c’est en moins de temps qu’il n’en faut pour se demander si ce drôle d’hybride tient du génie ou du grotesque qu’on récupère notre sachet en papier brun immédiatement reconnaissable.
On était évidemment déterminés à goûter toute la gamme, soit la version boeuf, la version poulet croustillant et les frites assorties, mais il semble avoir eu un souci au moment d’assembler notre commande, et ce sont deux Maestro Double Truffle Tina qu’on déballe. La cuisine en 112 secondes (le temps d’assemblage moyen d’un burger sur place) a ses limites.
Qu’à cela ne tienne: Tina, puisque c’est son petit nom, fait plutôt bonne impression au premier regard. Le pain, légèrement luisant, rappelle ceux des meilleures chaînes de burger premium apparues ces dernières années, et sa profusion de graines rappelle immanquablement la pub avec Fabien Barthez après l’inoubliable finale de 1998. On a l’âge qu’on a. Un petit bémol, peut-être, sur base purement visuelle: pourquoi tant de roquette? Si cette profusion de verdure parviendrait presque à nous convaincre que le mastodonte qu’on s’apprête à engloutir est, si pas sain (il faut après tout le tenir à deux mains) du moins, relativement équilibré, reste que le contenant en carton est littéralement rempli de feuilles, qui s’échappent d’un sandwich où elles constituent une couche épaisse. Suffisamment pour masquer l’arôme délicat de la truffe avec leurs notes poivrées?
Comme souvent chez McDo, la sauce, plutôt que d’être répartie uniformément sur l’ensemble de la surface du pain et de la viande, est plus généreuse de certains côtés que d’autres. On décide donc d’entamer ce test improvisé par une bouchée dégoulinante de mayo aux éclats noirs immédiatement reconnaissables. Si, au nez, on décèle surtout la roquette et le boeuf et pas la moindre note de champignon, en bouche, on est agréablement surpris de constater que la mayonnaise à la truffe choisie par McDonald’s appartient clairement aux meilleures variantes du genre.
Malheureusement, entre le boeuf, le pain, la salade, la tomate, le fromage et le bacon, son goût est noyé passée la première bouchée. Tout juste si une délicate note terreuse titille ci et là le palais, mais les inconditionnels de la truffe risquent de rester sur leur faim.
Le luxe des plaisirs simples
Quant à savoir si, comme demandé dans le titre de cet article, ce burger McDo à la truffe est « chic », les mauvaises langues diront que poser la question, c’est y répondre. On pourrait leur rétorquer que la chaîne aux arches dorées est appréciée d’une série de chefs Michelin aux papilles pourtant bien affûtées, et qu’il peut parfois y avoir une forme d’élégance gustative dans la simplicité, mais le fait est que la profusion d’ingrédients et l’aspect costaud de cette Tina décidément pas timide en goût est à l’opposé du raffinement.
Les frites truffées, par contre? Elles arrivent tièdes, forcément, froides le temps de passer de l’assiette à la bouche, mais c’est là le lot de toutes les frites McDo, avec ou sans champignon précieux et curieusement, loin de nuire à leur goût, ça l’exalte. Généreusement nappées de la mayonnaise à la truffe susmentionnées ainsi que de pépites de bacon, elles ne demandent qu’à être servies sur un plat élégant, en argent ou en inox, par exemple, même si une assiette en porcelaine fera parfaitement l’affaire.
Salées à l’excès mais pas à outrance, elles ont le don d’aller activer les centres de plaisir à chaque bouchée croustillante, grasse et épicée, et sans une multitude d’accoutrements plus ou moins nécessaires, la truffe a la place de « star » qu’elle mérite et que McDo nous a promis dans son communiqué de presse.
Envie d’enjoliver le quotidien d’un peu de raffinement à moins de 5 euros la portion? Inspirez-vous de la tendance qui fait saliver tout ce que New York a de gourmets branchés, soit la combinaison de frites et de cocktails (le plus souvent des Martinis) et préparez-vous un moment insolite et gourmand. Sortez le shaker, le champ’ même ou bien votre bouteille de spiritueux sans-alcool favori, osez les flûtes ou les verres en cristal de Mamy, l’argenterie – on ne vit qu’une fois, et vu l’état actuel du monde chaque plaisir est bon à prendre.
Une fois votre table de fête dressée et votre boisson de choix au frais, passez récupérer votre commande et transvasez vos frites sur un plat chic. L’ensemble vous aura pris une trentaine de minutes et coûté 4.5 euros pour peu que vous ayez déjà les boissons en stock, mais chaque bouchée truffée arrosée d’une gorgée festive vous emmènera loin, très loin du quotidien. Et ça, c’est classe.
