Bas Smets, le paysagiste belge qui veut « rafraîchir les villes »
« Rafraîchir les villes », en plantant des arbres et en créant des réservoirs d’eau: le credo du paysagiste belge Bas Smets, choisi pour réaménager les abords de la cathédrale Notre-Dame à Paris, connaît un retentissement croissant avec le réchauffement climatique.
A Hong Kong, Bahreïn, en Amérique, au Portugal, à Bordeaux ou à Arles en France; son cabinet fondé en 2007 à Bruxelles était déjà sollicité partout dans le monde avant d’être sélectionné fin juin par la Ville de Paris pour concevoir le futur parvis de Notre-Dame, à l’horizon 2027.
Mais l’architecte paysagiste de 47 ans voit dans ce projet l’opportunité rêvée pour accroître encore la visibilité de son travail, qu’il envisage comme « un laboratoire d’expériences » pour « inventer une sorte d’écologie urbaine », et végétaliser l’espace public bien au-delà de quelques squares. « Notre ambition est de transformer la ville pour la rendre résiliente, habitable, agréable », explique Bas Smets à l’AFP. « Et si on arrive à le faire sur l’île de la Cité, autour de Notre-Dame, on peut le faire partout », poursuit-il lors d’une rencontre à son cabinet, dans un openspace avec vue panoramique sur Bruxelles où il emploie une vingtaine de jeunes collaborateurs.
A Paris, sur un site fréquenté par des touristes du monde entier, Bas Smets veut développer les pelouses arborées de part et d’autre de la cathédrale, et « imaginer le parvis comme une clairière », au milieu de laquelle de l’eau de pluie récupérée dans une cuve ruissellerait au sol par forte chaleur, sur une pente très légèrement inclinée. « Il y aura des réflexions éphémères à photographier, et cela produira l’effet d’une averse d’été qui rafraîchit l’air », poursuit ce Belge néerlandophone, diplômé de l’université de Louvain.
« On peut aussi imaginer que ce ruissellement devienne un rendez-vous quotidien de quelques minutes, comme le scintillement de la tour Eiffel », ajoute-t-il. Le chantier doit commencer en 2024 après les Jeux olympiques et l’achèvement de la rénovation de l’édifice lui-même, gravement endommagé par un spectaculaire incendie en 2019.
Inspiré par Central Park
Côté sources d’inspiration, Bas Smets cite le New-Yorkais Frederick Law Olmsted, qui a conçu entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe quantité de parcs urbains aux Etats-Unis, dont le célèbre Central Park de sa ville natale. « Il a réfléchi au stockage de l’eau pour amener la nature en ville, organisait les espaces verts en réseau en les reliant entre eux. Il pensait presque déjà au climat avant le global warming (réchauffement climatique) », sourit celui qui aime se décrire en « architecte de paysages ».
Pour ses projets à travers le monde, le bureau de Bas Smets s’appuie sur des collaborations locales, et le Bruxellois bénéficie pour la botanique des conseils de spécialistes dont ceux du neurobiologiste italien Stefano Mancuso (auteur de « L’intelligence des plantes »), rencontré il y a six ans à Florence.
La réflexion avec eux porte notamment sur la nécessité de choisir une végétation adaptée à la nature du sol, au climat. Et qui sans doute devra se montrer plus résistante à la chaleur et aux épisodes de sècheresse susceptibles de se multiplier à l’avenir. Pour la « promenade plantée » créée sur une place du centre-ville de Waregem, en Belgique, Bas Smets a choisi des micocouliers, une espèce méridionale. « J’ai dû me battre parce qu’on sortait de la liste des plantes indigènes », raconte-t-il, « mais dans 50 ans un micocoulier a plus de chances d’avoir survécu qu’un arbre d’ici ».
Il classe cette réalisation parmi « les projets exemplaires qui montrent qu’on peut réfléchir autrement »… sa formule pour définir tout ce qu’il entreprend. Bas Smets doit aussi transformer et verdir dans les années à venir le quartier de la Gare centrale à Bruxelles, où il déplore le manque d’avenues arborées. « Envisager une réponse au changement climatique est très difficile tellement il semble inévitable. Mon espoir est que les villes agissent toutes en même temps pour créer ces réservoirs écologiques, fait-il valoir. « Mais il faut le faire maintenant, pas dans dix ans ».
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