Oosterwold, quartier utopique près d’Amsterdam, qui « rend la terre aux gens »
Chacun construit à son rythme et selon ses envies à Oosterwold, un espace vert de 43 kilomètres carrés près d’Amsterdam. A condition de respecter certaines règles, comme dédier au moins la moitié de son terrain à l’agriculture urbaine.
Libérés de toute contrainte, un artiste a bâti une maison perchée sur un arbre, un couple vit dans un conteneur et des caravanes abritent ceux qui ont fait passer leur potager avant la construction d’une maison.
« On peut tout construire nous-même et tout décider », explique Barbara van Schaick, 45 ans, au milieu de sa parcelle où pommes de terres, oignons et arbres fruitiers poussent à proximité de sa maison toujours en construction.
« C’est très agréable », « surtout combiné avec la promotion de l’agriculture urbaine« , ajoute-t-elle auprès de l’AFP. Cette bio-informaticienne passionnée de jardinage a quitté la capitale néerlandaise pour se lancer dans « l’expérience Oosterwold » il y a près de deux ans.
Le terrain, situé sur des « polders », ces zones gagnées sur la mer, était longtemps dédié à l’agriculture biologique, avant que la terre ne soit « rendue aux gens » en 2016 pour cette initiative imaginée par la firme MVRDV et un politicien néerlandais.
Image romantique
Leur parcelle achetée, les résidents ont quartier libre pour construire logement et infrastructures, sous certaines conditions: les habitations doivent être bien isolées et les habitants doivent privilégier les énergies renouvelables et pompes à chaleur. La moitié du terrain doit être consacré à l’agriculture urbaine et il doit y avoir des espaces de vie et de circulation publiques.
Oosterwold est « unique », affirment fièrement ses habitants, même si tout n’est pas si simple, concèdent-ils.
Devant une élégante bâtisse qui semble se fondre dans son vaste terrain vert, construite à l’aide d’un architecte et d’un entrepreneur, Nadine Alsaz, 55 ans, dit vivre dans un « paradis ». Arrivée à Oosterwold en 2017, elle souligne que l’initiative permet aussi des échanges fondamentalement différents de ceux en ville, « où on se connait à peine ».
Les gens ont toutefois souvent une « image romantique » du projet, et peuvent sous-estimer la flexibilité nécessaire à sa mise en œuvre, explique-t-elle. La construction des routes, qui se définit entre associations d’habitants, fait par exemple l’objet de discussions houleuses, que ce soit sur les matériaux à utiliser, la façon de procéder et ou la division des coûts.
« On aurait pu croire que construire une route serait plus facile », explique Barbara, alors que le chemin de terre cahoteux menant à sa parcelle attend toujours que les voisins se mettent d’accord.
La construction coûte « beaucoup d’énergie », explique-t-elle, surtout pour ceux qui, comme elle, construisent tout de A à Z. Certaines parcelles sont abandonnées et laissées en friche.
Et pour ceux qui n’ont pas d’expérience dans le domaine, l’agriculture urbaine est « un défi », ajoute Jeroen Dobber, 39 ans, qui a surtout choisi Oosterwold pour s’éloigner des contraintes dans les villes traditionnelles.
« Bonne pour le monde »
De nombreux terrains proposés par l’initiative ont été achetés par des développeurs de projets immobiliers, et leurs locataires ne sont pas toujours aussi conscients de ce qui est attendu d’eux, observe-t-on. Certains déplorent également l’absence de services publics et d’école à proximité, mais selon M. Dobber, « ça va venir ».
Les habitants sont de tout âge, et de différentes opinions politiques, selon M. Dobber, mais la plupart ont un niveau d’études élevé, note-t-il.
Et si des logements sociaux sont également en construction, l’augmentation des prix de la terre ne favorise pas la diversité.
L’endroit est très populaire. Une deuxième phase du projet doit commencer en 2025 et tirera des leçons des premières années de l’expérience, en rendant par exemple la charge de l’évacuation des eaux et la construction de certaines routes à la municipalité d’Almere, à proximité.
Oosterwold comptera 15.000 lots, dont un dixième a déjà été vendu, mais ne grandira pas plus que ça, garantit Nadine. Elle espère néanmoins que l’initiative, « bonne pour le monde », sera imitée ailleurs.
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